C’est bien connu, et le monde médical ne cesse de le répéter, la course à pied, est reconnue comme l’un des sports qui engendre le plus de bigorexie (lire l’article Addiction à la course à pied : oui, ca peut exister !). « Je ne connais pas un médecin du sport ou un kinésithérapeute qui vous dira le contraire, » commente ainsi Marc Orlu, kinésithérapeute à Puteaux (92).
Ancien kinésithérapeute de la Fédération Française de Basket-ball, aujourd’hui de la Fédération Française de roller de vitesse, Marc Orlu sait de quoi il parle. Dans son cabinet, les coureurs à pied défilent. « Il y a de plus en plus de pratiquants, j’ai donc de plus en plus de patients mais ce ne sont pas les plus simples car la grande majorité demandent immédiatement s’ils peuvent continuer de courir ou quand ils vont reprendre ». «
Pour le kinésithérapeute, il est alors préférable de faire en sorte de les aider à ne pas arrêter plutôt que de les laisser continuer ou reprendre la course à pied en faisant n’importe quoi. Lorsqu’il reçoit un patient, Marc Orlu effectue donc un check up complet. Pour un coureur à pied la première question est inévitable « avec quoi courez-vous ? Je vérifie systématiquement que les chaussures sont bien adaptées à la pratique et à la morphologie du coureur, puis je l’interroge sur son entraînement. Et là très (trop) souvent il faut tout revoir, que ce soit l’entraînement ou la fréquence des compétitions. Le coureur à pied a tendance à en faire trop, surtout s’il n’est pas en club ou suivi. Il court, aussi, souvent mal en ayant oublié de faire tous les éducatifs. Je reviens parfois sur l’équipement. Ainsi on pense souvent que les chaussettes sont accessoires et que seules les chaussures sont importantes. Même si, en effet, le choix d’une paire de chaussures ne doit pas être fait à la légère, il en est de même pour la chaussette. C’est aujourd’hui un produit technique qui permet une pratique confortable et protège les zones sensibles. Il faut des chaussettes adaptées à la pratique quel que soit le sport. Et elles seront différentes selon les activités. Des chaussettes de tennis ne sont pas des chaussettes de course à pied. »
Après cet entretien, place aux tests « Je dois connaitre les capacités musculaires de mon patient, sa force et sa souplesse. Les coureurs à pied, mais il n’y a pas qu’eux, ont tendance à oublier que la souplesse est un facteur de performance. Et donc a contrario source de blessure. »
Une fois ces tests effectués, « j‘en viens à la blessure. Si c’est un coureur à pied pratiquant sur route, ce sera très souvent un syndrôme de l’essuie-glace, une tendinite du tendon d’Achille ou une entorse de la cheville; pour le traileur ce sera là aussi une entorse de la cheville mais aussi celle du genou« .
Le diagnostic effectué, une question brûle les lèvre « quand puis-je reprendre ?« . « Interdire la pratique est souvent la mauvaise réponse car de toute façon, ils vont aller courir alors je préfère trouver une solution et j’opte souvent pour l’orthèse qui permet, très souvent, de rechausser les runnings. Mais attention, il faut aussi adapter l’entraînement en fonction de la blessure et de la douleur. Et là, il faut faire preuve de pédagogie et convaincre car c’est presque le plus compliqué. » L’orthèse servira aussi dans le cadre de la rééducation et du travail avec le kinésithérapeute. « On travaille bien mieux car le patient est en confiance et de fait, va plus loin dans l’exercice sans prendre de risques.
Porter une orthèse est une protection tout comme elle contribue à la guérison
Pour une tendinite par exemple au tendon d’Achille, il faut normalement trois semaines d’arrêt. On peut raccourcir ce temps en mettant une orthèse qui va sur-élever le tendon et absorber les chocs. Pour le genou ce sera le même principe. Le coureur à pied va ainsi pouvoir dans un premier temps trottiner et étancher « sa soif ». Mais au moindre « warning » il faut arrêter et remettre à plus tard son entraînement. « Je prendrais là l’exemple du genou car plus il est chaud et moins on a mal. C’est vrai, la douleur a tendance à s’estomper au fur et à mesure de l’échauffement…mais ceci ne dure qu’un temps ! Elle finira par être présente pendant toute la durée de votre activité sportive… pire, elle pourrait dégénérer en une pathologie plus grave. Il faut consulter si la douleur est là et ne pas continuer à pratiquer en tentant de passer outre la douleur. »
Ceci dit, beaucoup d’entre-nous ont entendu cette petite phrase : « si tu mets une protection à la cheville tu seras obligé de la porter tout le temps« .
« C’est faux. Oui, on l’a tous entendue cette phrase mais c’est tout le contraire. En fait, certaines chevillères sont dynamiques et accompagnent le mouvement. Il y a une protection bien sûr mais la cheville continue son rôle de rappel proprioceptif. Une chevillère n’est pas un plâtre. Si vous êtes fragile au niveau des chevilles et/ou si la pratique comporte un risque (comme le trail), il est préférable de porter une chevillère plutôt que de prendre le risque de se faire une entorse. Pour exemple, prenons les basketteurs. Savez-vous qu’en NBA, ils sont obligés de porter une protection de cheville (chevillière ou strapping) qu’ils soient blessés ou pas ? Ce n’est pas pour des raisons de contrat avec telle ou telle marque mais parce que les dirigeants se sont aperçu qu’il y avait moins d’entorses avec que sans. Ca ne supprime pas totalement le risque d’entorse mais ça en évite un grand nombre, on considère que la chevillère limite les risques d’au moins 60% . Et je peux vous assurer que les basketteurs qui jouent en NBA n’ont pas de problème de proprioception. »
Que dire alors de la petite phrase, le port d’une genouillère favorise la fonte musculaire ?
« Même chose, c’est faux. Une genouillère dynamique, tout comme la chevillère, n’est pas un plâtre, elle permet au contraire de pratiquer (ou de reprendre) le sport en toute confiance, donc de se muscler (ou remuscler).«
Lorsque l’on parle d’orthèse, il est néanmoins difficile de parler confort et pratique sportive notamment avec les ceintures lombaires. Il est vrai que cela touche peu les coureurs à pied, mais certains sont néanmoins obligés de porter des ceintures. « La majorité des ceintures lombaires ne sont pas adaptées à la pratique sportive : elles sont trop rigides, difficilement ajustables, lourdes, non respirantes et ne tiennent pas en place. Toutefois, il en existe aujourd’hui sur le marché qui sont conçues pour la pratique sportive. Elles permettent de stabiliser la région lombaire, tout en participant activement au gainage et en améliorant la posture. Ce qui contribue à la guérison. »
Enfin, Marc Orlu rappelle que si les orthèses sont un plus, la glace est nécessaire en cas de douleurs, tendinites ou entorses. De nombreux sportifs ont dans leur congélateur des packs prêts à l’emploi mais malheureusement ce n’est guère efficace. « C’est assez simple à expliquer, pour que le froid ait un effet, il faut descendre la température en dessous de 17°C sachant que nous sommes à 37°. Malheureusement pour ces packs, il est quasiment impossible de la faire descendre sous 20° et surtout de maintenir cette température de 17° pendant 15 à 20 mn, temps nécessaire pour que le froid opère. Une des solutions qui existe est le sac de petits pois congelés car cela forme des micro-billes mais la plus efficace et la plus pratique reste la vessie pleine de glace que vous mouillez à l’extérieur pour une meilleure conduction du froid. Il existe aujourd’hui des systèmes parfaitement adaptés permettant de se faire une petite séance de cryothérapie efficace à la maison sans prendre le risque de se brûler la peau et pour moi tous les sportifs, quel que soit leur niveau, devraient en posséder un. «
Ne vous posez donc plus de questions. Si vous devez porter une orthèse en prévention ou pour vous soulager, faites le, sans vous soucier des conséquences puisqu’elles seront obligatoirement positives.
1 réaction à cet article
Florent
« Même si, en effet, le choix d’une paire de chaussures ne doit pas être fait à la légère, il en est de même pour la chaussette. C’est aujourd’hui un produit technique qui permet une pratique confortable et protège les zones sensibles. Il faut des chaussettes adaptées à la pratique quel que soit le sport. Et elles seront différentes selon les activités. Des chaussettes de tennis ne sont pas des chaussettes de course à pied. »
Une quelconque source scientifique pour confirmer cela ?
Hormis les réponses marketing du style « il y a plus de protection au niveau des zones de frottements ou des malléoles », pouvez-vous me citez des paramètres mesurables qui démontrent une quelconque différence et surtout efficacité dans la protection des « zones sensibles » pour le coureur lorsqu’on l’on porte des chaussettes dites « de course » ? (Et qu’est ce que c’est exactement une zone sensible?)
Quand vous parlez de chaussettes de course vous pensez peut être à des chaussettes constitués d’un matériau spécifique ?
Une chaussette efficace sert à protéger des ampoules ? De l’humidité ? A amortir ?
Pourquoi une chaussette technique de tennis ne fait pas l’affaire ?
Merci de m’éclairer,
Salutations,
Florent