Douleurs de la face antérieure du genou : les traitements pour soulager le coureur

Les sportifs qui pratiquent la course à pied, comme ceux pour qui les sauts sont essentiels dans les résultats et la performance (volley-ball, handball), vont souffrir de douleurs qu’ils situeront au niveau de la face antérieure du genou. Pour les runners, ces douleurs seront aggravées ou déclenchées lorsque les surfaces articulaires situées sur la face antérieure du fémur ou sur la face postérieure de la rotule seront sollicitées de manière trop répétée ou trop intense.

Les sorties longues, la course en descente, certains exercices de musculation vont être à l’origine de cette souffrance articulaire. L’examen clinique et les examens radiologiques (radiographies, échographies, scanner, IRM) vont permettre de préciser quelles sont les structures atteintes à l’origine de la douleur. Ces examens vont aussi orienter la mise en place d’un traitement parfaitement adapté pour soulager le sportif. Nous allons décrire les différents traitements qui peuvent être proposés aux sportifs en fonction de l’origine des douleurs.

  • Les genouillères : pourquoi tant de méfiance ?

Ces thérapeutiques sont souvent négligées par les professionnels de santé qui, pour la plupart, pensent qu’elles sont inutiles. En fait, les genouillères « rotuliennes », celles qui présentent un orifice antérieur pour placer la rotule, permettent de guider la rotule dans le bon axe et de limiter l’instabilité rotulienne.

Les études par IRM du fonctionnement rotulien avec genouillère montrent que ces attelles ont une réelle efficacité sur l’abaissement de la rotule et sur la limitation des mouvements latéraux dits de « surf ». Abaisser la rotule et la stabiliser, c’est un excellent moyen pour soulager les douleurs. Tous les sportifs ne seront pas soulagés par une genouillère rotulienne mais ceux qui ressentent une nette efficacité sur les phénomènes douloureux ne devraient pas se priver de cette aide très utile.

Les bonnes genouillères parfaitement adaptées suivent les différents mouvements articulaires sans les entraver et sans gêner le sportif. Ces genouillères vont-elles engendrer un déficit musculaire qui risque d’aggraver à moyen terme les symptômes douloureux ? Le port d’une genouillère ne doit pas être permanent. Si les genouillères rotuliennes sont utilisées pour et pendant l’exercice, elles vont au contraire éviter ou limiter les conflits donc les phénomènes douloureux.

  • Les contentions : un excellent traitement palliatif

L’utilisation de strapping par bandes adhésives élastiques ou par tape peut permettre au sportif de réaliser les séances d’entrainement prévues. Ces contentions sont aussi souvent utilisées lors des compétitions et posées alors par les kinésithérapeutes du sport qui encadrent les sportifs.

Le principe est le même que pour les genouillères : abaisser la rotule et limiter les mouvements de latéralité. Ces contentions bien posées sont souvent très efficaces mais elles nécessitent l’aide d’un professionnel de santé disponible et bien formé. Ces contentions finissent par poser un problème de budget car elles sont relativement onéreuses.

  • La rééducation : complexe, longue mais incontournable

La rééducation est essentielle et devrait être réalisée par un kinésithérapeute bien formé qui sait adapter ses soins aux problématiques du sportif. Cette rééducation est très technique car elle doit lutter contre les raideurs et les rétractions, renforcer les muscles déficients dans leurs rôles de recentrage de la rotule et dans la limitation de la rotation externe de la jambe.

La rééducation doit éliminer toutes les techniques nocives qui pourraient déclencher les douleurs. Par exemple, le travail de renforcement statique du quadriceps dit « en chaine ouverte » dans les derniers degrés d’extension du genou peut être agressif pour le cartilage rotulien. Le travail dit « en chaine fermée » sur presse oblique est mieux toléré et plus efficace lorsqu’il est réalisé avec des résistances et des amplitudes articulaires progressives.

Le renforcement du muscle vaste interne (la partie interne du quadriceps qui recentre la rotule) doit se faire dans les 30 derniers degrés d’extension et le renforcement des ischio-jambiers internes (les muscles situés derrière la cuisse) doit se faire dans le sens de la freination de la rotation externe de la jambe. L’électrostimulation est un bon traitement d’appoint pour renforcer un muscle vaste interne déficient. Le renforcement sur machine isocinétique ne devrait être utilisé qu’en toute fin de rééducation.

  • La rééducation active

Dans le chapitre précédent, nous avons tenté de montrer la complexité de la rééducation d’un syndrome douloureux fémoro-patellaire. Il n’est pas possible d’envisager un protocole de rééducation unique car les origines de la douleur peuvent être très différentes.

De plus tous les sportifs sont différents sur le plan biomécanique et ont des perceptions différentes face à la douleur. Il est donc nécessaire que les sportifs aient une bonne compréhension de leurs problématiques sur le plan biomécanique car c’est un excellent moyen pour qu’ils évoluent vers plus d’autonomie. La voie vers la guérison, c’est connaitre parfaitement et réaliser très régulièrement une petite dizaine d’exercices non douloureux.

  • Un exercice incontournable : le renforcement par la descente des escaliers

L’objectif de cet exercice est de stabiliser et de renforcer l’articulation fémoro-patellaire dans son rôle d’amortissement et d’alignement. Après un échauffement de 10-15 minutes par la pratique de la marche ou du vélo avec peu de résistance, puis quelques étirements non douloureux du quadriceps, le travail de rééducation se fera par la descente avec appui inférieur sur la jambe atteinte (le genou gauche sur les photos 1 et 2).

La colonne vertébrale est très verticale, le bassin doit rester horizontal, le genou reste dans l’axe du pied, le pied est utilisé dans sa fonction d’amortissement en prenant le temps de placer l’appui au sol. Le renforcement se fait par deux à trois séries de répétitions de la descente de 20 à 40 marches. Pour la remontée, l’idéal est d’utiliser un ascenseur ou, dans la nature, un chemin en montée sans marches.

Cet exercice ne doit pas déclencher des douleurs supérieures à 24 heures. Les difficultés concernant l’exercice peuvent être croissantes avec augmentation de la hauteur de la marche, augmentation de la vitesse de la descente, augmentation de la charge (sac à dos ou poids).

renforcement par la descente des escaliers

 

  • Modifier les adaptations posturales

1. Les semelles orthopédiques sont très souvent prescrites en cas de douleurs fémoro-patellaires et de troubles de positionnement des membres inférieurs. Peu d’études scientifiques permettent d’avoir des certitudes sur l’intérêt réel des orthèses plantaires en prévention ou en thérapeutique dans la pathologie rotulienne. En pratique, les résultats ne sont pas toujours probants. Si une partie des sportifs se dit très améliorée, une autre partie, au moins équivalente, ne trouve aucun intérêt au port des semelles pendant l’exercice.

2. Les techniques ostéopathiques peuvent, en traitant les différentes raideurs, modifier les appuis et les tensions péri-rotuliennes. Un ostéopathe bien formé et plusieurs mois sont nécessaires pour améliorer la symptomatologie. Peu d’études scientifiques et peu de reconnaissances mais les résultats sont parfois significatifs.

  • L’arthroscopie : seulement si indication précise

Soulager et rééduquer une rotule qui souffre n’est jamais simple. Les douleurs peuvent perdurer et réellement handicaper un sportif qui souhaite pourtant retrouver rapidement le plaisir de courir. Toujours impatient, le sportif va vouloir guérir vite. La consultation chirurgicale peut être légitime si les examens radiologiques ont révélé des lésions cartilagineuses ou osseuses responsables des phénomènes douloureux.

Dans ce cas, une intervention chirurgicale par arthroscopie permettra de régulariser ces lésions ou de les refixer, parfois d’éliminer un corps étranger libre dans l’articulation. Les différentes techniques concernant les greffes de cartilage évoluent rapidement et peuvent être envisagées. Ces indications chirurgicales existent mais ne sont pas fréquentes.

Trop souvent les sportifs subissent une arthroscopie avec des indications de simple exploration articulaire ou de « toilette articulaire ». L’acte chirurgical ne fait alors qu’agresser l’articulation du genou et aggraver les déficits ainsi que les rétractions musculaires. La rééducation sera ensuite plus longue, plus complexe et plus aléatoire.

  • La chirurgie osseuse : la fin de la course à pied

Chirurgie de stabilisation rotulienne, transposition de la tubérosité tibiale antérieure, ostéotomie de réaxation, trochléoplatie de creusement : voici des termes barbares utilisés par les chirurgiens spécialistes du genou lorsqu’ils proposent une technique pour améliorer le fonctionnement de la rotule sur le fémur.

Ces techniques très agressives sont indiquées chez un adolescent qui est victime de grosses anomalies morphologiques ou chez un quadragénaire qui commence à souffrir de douleurs en relation avec une arthrose sévère. Pour un coureur à pied, ces techniques chirurgicales vont systématiquement engendrer des modifications articulaires incompatibles avec leur sport préféré. La pratique du vélo ou de la natation seront ensuite les seules activités sportives envisageables.

En conclusion, les conseils du médecin du sport pour soulager les douleurs rotuliennes :

  • Calmer la douleur, c’est éliminer très vite les gestes sportifs dangereux : squats, fentes, machine à quadriceps, course en descente, position assise prolongée.
  • Genouillères et contentions devraient être utilisées sans modération dans un premier temps puis seulement lorsque les phénomènes douloureux limitent l’activité sportive.
  • La rééducation est longue, pénible mais absolument incontournable. Elle doit être régulière, adaptée et variée. Le sportif va jouer un rôle actif et intégrer totalement dans ses « gammes » les mouvements qu’il reproduira ensuite en préparation physique.
  • Semelles orthopédiques et techniques ostéopathiques sont parfois des compléments intéressants.
  • L’arthroscopie thérapeutique ne doit être envisagée qu’en cas de lésions cartilagineuses ou osseuses avérées.
  • La chirurgie osseuse peut être indiquée mais elle risque de sonner le glas de la course à pied.