Cette année mon activité de guide de haute montagne a été fortement troublée par de fortes douleurs au genou qui se sont soldées par des injections de PRP (Plasma Riche en Plaquette) et in fine par une intervention chirurgicale, le tout m’ayant mis sur la touche de mes activités sportives, pendant 5 mois. J’ai dû complètement réorganiser mon été, arrêter de courir et annuler ma participation à la 1ère édition de l’Els 2900 Alpine Run® en Andorre, pour laquelle j’avais été sélectionné comme 49 autres amoureux de ce genre d’aventures, parmi des centaines de candidats.
Pour ma remise sur pieds, en tant que coach en performance mentale, je me suis appliqué ce que je préconise aux athlètes qui font appel à moi dans ce genre de situation…
1 – Accepter
Encore une fois, nous ne pouvons améliorer ou corriger que ce que nous acceptons comme étant vrai… Cela prend tout son sens à l’occasion d’une blessure. Pour un sportif, un problème physique peut-être assimilé à un deuil et nous en retrouvons d’ailleurs les même étapes (Inspiré du travail sur les étapes du deuil d’Elisabeth Kübler-Ross) :
- Le choc: Dans le cas qui nous intéresse, cela peut être le diagnostic. Moins il sera clair (vous devez « limiter » votre activité), plus la rentrée dans le processus de deuil sera dur à mettre en place et plus tard viendra l’acceptation.
- Le déni, le refus, la négation: Il intervient directement après le choc du diagnostic… « Ce n’est pas possible»; « pas moi, pas maintenant» ; «vous vous trompez».
- La colère, la culpabilité: Cela peut aller du simple ronchonnement jusqu’à la fureur, en passant par l’accusateur… « Ce n’est pas juste»; « c’est de la faute de »; « mais quel c.. ».
- La peur voir la dépression: Notre monde tel que nous le connaissons ou l’avons planifié se retrouve complètement boulversé… « Comment vais-je faire»; « vous ne pouvez pas comprendre »; « qu’est ce que je vais devenir ».
- La tristesse: C’est une étape importante car elle traduit une prise de conscience de la situation réelle… Elle se manifeste le plus souvent par des silences (plus envie de discuter) ou des larmes généralement libé
- L’acceptation: Elle permet de faire un réel état des lieux, avec lucidité… « C’est dur mais c’est comme ça»; « c’est vrai que cela tombe mal, par contre ».
- Le pardon: Envers nous-même, il nous invite à renoncer à l’illusion de la toute puissance… «C’est mieux comme ça»; «cela aurait pu être plus grave».
- Quête du sens et du renouveau: De nouvelles opportunités apparaissent, c’est l’occasion de faire le point… « Grace à cette expérience je peux»; « cela me permet de »
- La sérénité: Nous sommes en paix avec nous même et sommes capable de vivre dans le ici et maintenant. Nous pouvons gérer la situation telle qu’elle est avec la bonne émotion… « Ce que je veux maintenant c’est ».
Quelque soit le niveau du sportif , un accompagnement peut aider à gérer le passage de ces différentes étapes sans stagner dans les plus pénalisantes. Cela permettra de se focaliser au mieux, sur la guérison de manière sensée et constructive plutôt que de chercher à reprendre le plus rapidement possible, au risque d’aggraver le problème et d’engendrer des lésions irréversibles pouvant occasionner un arrêt définitif de l’activité.
2 – Comprendre
Afin d’entamer un processus conscient de guérison, il est important de comprendre ce que vous avez et en rechercher les causes possibles. Cela permet d’éviter de refaire les mêmes erreurs.
C’est un réel travail d’investigation qui demande de se replonger dans vos séances d’entrainement des dernières semaines voir des derniers mois ainsi que dans votre style et rythme de vie afin de, peut-être, modifier certaines habitudes.
3 – Fédérer ceux « qui savent»
Du point de vue thérapeutique, comprendre au mieux ce qui a été et doit encore être fait, permet de fédérer le bon staff autour de soi. Chaque étape doit avoir son professionnel, il faut en être conscient afin d’éviter les « couteaux suisses »… Ceux qui savent et font tout jusqu’à un certain point.
Un kinésithérapeute n’est pas un médecin du sport, un entraineur n’est pas un kinésithérapeute et un préparateur physique n’est pas un nutritionniste. Pour votre remise sur pieds, chacun à son rôle avec son domaine de compétence, sa place et son moment d’intervention. Avoir cela en tête vous évitera de suivre plusieurs sons de cloches et par conséquent, de perdre du temps, de l’énergie voir de l’argent.
4 – S’impliquer
Adoptez une méthode globale sur votre travail de récupération en conjuguant l’aspect mécanique, nutritionnel, mental et autre…
L’Aspect mécanique est le travail effectué avec votre kinésithérapeute de concert avec votre médecin du sport et de votre chirurgien si il y a eu opération. Il est utile de provoquez la discussion entre eux afin qu’il y ait une harmonie du discours final quand à votre protocole de récupération.
L’Aspect nutritionnel a une grande importance. Il y a plus de 2400 ans Hippocrate disait déjà: « Nous sommes ce que nous mangeons… Que ton aliment soit ton médicament ». Informez-vous sur les aliments susceptibles d’aider votre rétablissement et ceux à éviter par rapport à votre pathologie initiale. (Voir les articles de Corinne Peirano, rubrique nutrition).
L’aspect mental aide considérablement à la reconstruction et à la rééducation après une blessure, notamment grâce à la méditation, l’imagerie mentale et la visualisation. Si vous êtes gêné par le mot méditation, voyez-la comme une pratique laïque permettant de vous connecter avec vous-même. Elle vous fera, par exemple, prendre conscience de vos tensions internes afin d’obtenir un réel relâchement nécessaire contre certaines douleurs. (Proposition de lecture: L’art de la méditation de Matthieu Riccard. Ed Pocket)
L’imagerie mentale conjuguée à la respiration consciente, vous permettra d’aller chercher un état ressource ayant pour effet de faire face à une situation stressante voir douloureuse (attente préopératoire, extraction d’une dent de sagesse, infiltration, etc.).
La visualisation a un champ d’action très vaste, elle peut être utilisée à tous les stades d’une démarche thérapeutique. Après une opération ou lors d’une immobilisation, la circulation sanguine est en général très perturbée. Visualiser le flux d’énergie dans la zones touchée, crée une stimulation par micro contractions musculaires facilitant ainsi la reconstitution des tissus incisés ou lésés.
La visualisation permet également de réaliser des mouvements virtuelles tout en donnant les mêmes informations aux muscles que pour un mouvement réel sans les faire bouger. Elle sera donc utile tout au long de la rééducation notamment pour travailler la fluidité, la symétrie ou l’amplitude d’un mouvement. Il faut y aller progressivement et visualiser des mouvements ou situations, en rapport avec le stade où vous en êtes. Plus tard, elle sera interessante lors de la préparation du projet de reprise.
Autre…
Soyez curieux de techniques douces telles que les massages, l’utilisation des huiles essentielles ou des bienfaits de l’argile verte. Après une opération, nous perdons de la sensibilité sur la zone incisée… Prenez en soin afin faciliter la vascularisation des tissus. C’est un peu comme une rivière qui aurait gelé, la circulation se fait en profondeur et est figée en surface. Des massages manuels ou à l’aide d’une balle de tennis permettent de stimuler la circulation d’énergie entre les différents tissus. Par les mêmes techniques, pensez également à prendre soin du membre valide qui, par conséquent, a une surcharge de travail.
5 – Ressentir
Préférez « Je ressens donc je suis » à la citation de Descartes. Tenez-vous à l’écart des « Si j’étais toi », des « Houla, j’ai eu la même chose, je te plains » ou la version 2 « ça…? J’ai eu la même chose, tu verras c’est rien ». Nous sommes tous différents dans notre constitution et dans notre manière de fonctionner… Les autres ne sont pas Vous et Vous n’êtes pas les autres.
Faites-vous confiance et fiez-vous à vos ressentis, ils vont guiderons vers le chemin du rétablissement.
6 – Fêter
La moindre amélioration doit être fêtée de manière à prendre conscience des progrès effectués. Adoptez la philosophie Kaizen: « Chaque pas, même petit, nous rapproche du sommet que nous sommes entrain de gravir. » Grâce à cela, vous verrez davantage le côté positif.
7 – Avoir des projets
Profitez de votre arrêt pour réaliser des projets que vous ne preniez pas le temps de planifier avant la blessure. Puis lorsque le chemin vers la reprise semble bien tracé, préparez logiquement votre retour, là encore, de concert avec l’ensemble de votre staff.
Grâce à cette harmonie entre thérapeutes, coach mental, nutritionniste, staff physique et technique, nous observons de plus en plus souvent de cas de sportifs réalisants d’excellents résultats après une période d’arrêt due à une blessure.
2 réactions à cet article
Pruvost Jacques
Bravo ! Passionnant et très bien décrit ! À faire lire à tous les sportifs blessés ou anciens blessés qui consultent les médecins et les kinés du sport.
Dr Jacques Pruvost
Médecin du sport. Athletologue
James Kaler
Merci pour votre commentaire Dr Pruvost!
Sportivement.