Ultra-traileur : Attention fragile !

Article écrit par Dominique Poulain, diététicienne et nutritionniste.

Chaque année, des centaines de coureurs à pied s’engagent dans des épreuves hors du commun : des ultra-trails « affolants ». Ces courses de montagne avec leurs dénivelés extrêmes fragilisent le coureur à pied, font mal, et posent question quant à leurs conséquences physiologiques et leurs nécessaires adaptations alimentaires.

Altérations biomécaniques

Les ultra-trails en montagne offrent des parcours exigeants. Les contraintes environnementales sont multiples : conditions climatiques versatiles, variations brutales de température, hypoxie en altitude, durée du parcours, privation de sommeil, poids du matériel (poids du sac, bâtons,…), terrains techniques et difficiles,…

 

Dans les nombreuses portions de course en descente, le sportif doit lutter contre la pesanteur, encaisser les chocs à répétition, amortir l’impact du pied avec le sol… Pour freiner le mouvement à chaque appui,  les muscles (fléchisseurs plantaires, quadriceps,…) subissent de fortes contraintes. Les contractions musculaires excentriques répétées (les muscles s’étirent avant de se contracter) altèrent les performances du traileur car elles créent des lésions structurelles importantes au niveau des sarcomères*, et des micro-blessures cartilagineuses et tendineuses. Elles se caractérisent par une augmentation des marqueurs sanguins de dommages musculaires (comme par exemple la Créatine Kinase – CK, le taux de myoglobine) ou des marqueurs d’inflammation  (comme la C-Reactive Proteine – CRP). Des chiffres élevés doivent faire rechercher une lyse musculaire, même en l’absence de traumatisme patent.

 

Des séances de préparation spécifiques permettent de progresser mais sont traumatisantes. Elles occasionnent de la casse et des dégâts musculaires. Une alimentation adaptée, au fil des entrainements, permet de reconstruire les fibres musculaires abimées et surtout de rendre les fibres nouvellement synthétisées plus résistantes à l’effort.

 

Cicatrisations nutritionnelles

La pratique d’entrainements et d’ultra trails en milieu montagnard impose une alimentation bien diversifiée. La surveillance des apports en protéines – éléments structuraux importants de l’organisme – est un point particulier à mentionner. La protection des protéines musculaires repose sur trois phases :

 

  • Pendant des efforts prolongés, la disponibilité en glucides protège le maintien des fibres musculaires. La consommation régulière de sucres au cours de l’exercice limite l’utilisation et l’oxydation des acides aminés constitutifs des muscles. Les temps d’entrainement permettent au traileur d’ajouter d’autres compétences, à savoir et à pouvoir s’alimenter sans nausées ni problèmes intestinaux.
  • Dès l’arrêt d’exercices de longue durée, l’augmentation des synthèses protéiques musculaires nécessite une récupération alimentaire immédiate associant protéines et glucides (exemples : bol de lait au chocolat et tartine de pain, laitage et banane, gâteau de semoule ou de riz,…). Un apport moyen de 10 à 20 g de protéines semble être optimal car « il semble exister un plafonnement des synthèses protéiques ». Cette approche nutritionnelle est inefficace si elle n’est pas complétée d’une bonne diététique au quotidien.
  • Les repas doivent optimiser, sans exagération, l’effet des apports protéiques. D’origine animale (viandes, poissons, œufs, produit laitiers) et/ou végétale (céréales, légumes secs, fruits protéo-oléagineux : noix, noisettes,…), chaque traileur trouvera bonheur dans son assiette.

 

* Sarcomères : unités fonctionnelle de base du muscle. Chaque sarcomère est constitué de myofilaments dont la contraction provoque le raccourcissement du muscle.


Dominique POULAIN, Diététicienne nutritionniste du Sport : http://www.nutritionniste-dieteticien.fr

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