Et si on commençait par savoir de quoi on parle ? Par définir ce qu’est réellement le gluten ? Il s’agit en fait d’une protéine que l’on retrouve dans les grains de céréales (blé, orge, seigle,…) et donc dans de nombreuses farines. Parmi ses rôles : apporter de l’élasticité à la pâte à pain (par le bais des glutéines) et lui offrir des propriétés d’extension (grâce aux prolamines). En clair : si votre pain ou vos gâteaux sont gonflés et aériens, c’est en grande partie grâce au gluten qu’ils contiennent.
Problème : tout le monde ne le tolère pas. Certaines personnes y sont allergiques, « mais c’est vraiment très rare », souligne Brigitte Jolivet, président de l’Association Française des Intolérants Au Gluten (AFDIAG). Ce qui est en revanche plus courant, c’est l’intolérance au gluten, également appelée maladie coeliaque qui pourrait toucher environ 1 personne sur 100. « Mais seulement 10 à 20% des personnes seraient diagnostiquées ». Pourquoi ? Parce que les symptômes sont multiples – diarrhée, amaigrissement, crampes musculaires, etc… – et facilement assimilables à d’autres pathologies, notamment le côlon irritable.
Alors par exemple, comment savoir si des troubles digestifs sont un signe d’intolérance au gluten ? « Il faut absolument faire une recherche d’anticorps spécifiques dans le sang qui, en cas de positivité, devra être complété par une endoscopie. Et surtout ne pas commencer un régime sans gluten avant, au risque de fausser les résultats », répond Brigitte Jolivet. Une prise de sang et vous saurez donc si oui ou non, vous devez supprimer le gluten de votre alimentation. Car c’est actuellement le seul « traitement » pour les malades cœliaques. « Le moindre écart de régime peut partiellement détruire la paroi intestinale et réenclencher le système immunitaire, avec un risque accru d’avoir des complications », explique la présidente de l’AFDIAG.
Contrairement à de nombreuses idées reçues, un régime sans gluten ne se résume pas à faire l’impasse sur les pâtes, le pain et les pizzas. Gâteaux, biscuits, boulghour, chapelure, crêpes, biscuits salés, poissons panés, sont de simples exemples de la longue liste des aliments interdits. Autant dire qu’il s’agit d’un régime alimentaire particulièrement difficile à respecter à la lettre, et donc socialement excluant.
Pourtant, de nombreuses célébrités, notamment du monde sportif, affirment avoir supprimé le gluten de leurs assiettes, et avoir constaté des bienfaits immédiats. « On vient parfois me voir en me disant : « je gonfle donc je suis intolérant au gluten », raconte Véronique Rousseau, diététicienne-nutritionniste à l’INSEP. Mais ce sont des raccourcis. Souvent, il suffit de se pencher sur l’alimentation globale, de manger plus de légumes et de fruits et moins de féculents ».
Que dire alors de ceux et celles qui prétendent avoir constaté une réelle amélioration de leur confort ? « Les personnes cœliaques, hypersensibles ou allergiques, ressentent forcément un changement, pour elles c’est normal. Mais pour les autres, il n’y a aucune raison de supprimer le gluten de son alimentation. Cela dit, il y a toujours une dimension psychologique. Et puis, quand vous supprimez le gluten, vous supprimez aussi l’amidon, qui peut aussi être difficile à digérer », note Brigitte Jolivet. « Il peut y avoir des effets collatéraux, complète Véronique Rousseau. La personne qui supprime le gluten va davantage s’intéresser à son alimentation. Spontanément, elle va manger plus de fruits et de légumes, de laitages demi-écrémés non aromatisés. Son angle d’approche est peut-être l’intolérance au gluten, mais globalement elle va surtout manger plus sainement ».
Plus que la suppression du gluten, des comportements alimentaires plus conformes aux recommandations pourraient donc expliquer ces sensations de bien-être.
Quant aux supposées vertus amincissantes du régime sans gluten, Brigitte Jolivet sourit : « Bien sûr, si vous supprimer tous les gâteaux, le pain, les pâtes, etc… sans les remplacer, vous aller maigrir. Mais ça ne s’appelle pas un régime sans gluten, plutôt un régime appauvri en calories ».
Si le gluten n’est en théorie pas indispensable, il convient de le compenser par d’autres aliments pour conserver une alimentation équilibrée et répondre aux besoins nutritionnels de l’organisme. « Principalement des légumes secs : des pois chiches, du quinoa, du riz, des pommes de terre, du maïs », explique Brigitte Jolivet.
En résumé : en cas de doute sur une possible intolérance au gluten, le bon réflexe reste d’en parler à son médecin et de se faire diagnostiquer. Sinon, entreprendre un régime sans gluten ne présente aucune utilité. Ni de vrai danger, à condition de conserver une alimentation équilibrée. Et de ne pas en attendre des miracles. Car pour rester en forme et donc optimiser ses performances sportives, le mieux reste de manger de tout, dans de bonnes proportions. Certainement moins spectaculaire comme remède, mais scientifiquement prouvé.