S’il n’a pas été lu, commencez par le 1er volet qui vous permettra de comprendre pourquoi vous devez prêter attention à vos apports en fer et l’influence qu’il pourra avoir sur votre performance :
La quantité de fer présent dans le corps humain est très faible (0,005 % du poids corporel), soient 4 à 5 g répartis pour 70% dans le sang, 10% dans les muscles, le reste sous forme circulante ou en stockage. Malgré cette faible quantité, le fer est essentiel pour préserver une bonne santé et permettre la réalisation d’efforts prolongés et/ou répétés, soit l’essence de nos sports.
De nombreuses études ont démontré que le statut en fer, mais surtout ses possibles carences et leurs stades (voir article 1) auront un impact négatif très puissant sur les performances physiques, puisqu’une baisse des niveaux en fer sera susceptible de provoquer une diminution des capacités d’entrainement, une augmentation des temps de récupération, pour très vite porter atteinte aux performances en compétition comme à l’entraînement.
Cependant, il sera également extrêmement contre-productif de se supplémenter anarchiquement et dans des doses trop élevées sous prétexte d’être à la veille d’une compétition importante ou d’un stage intensif. Se supplémenter excessivement aura un effet pro-oxydant toxique, le fer attaquant alors certaines structures, incapables d’évacuer le surplus apporté.
Mais, le corps ne pouvant produire de fer, nos besoins devront nécessairement provenir de sources externes, l’alimentation étant dans la plupart des cas suffisante, même pour un sportif de haut-niveau.
Niveau 1 à adopter au quotidien : l’alimentation
Comme expliqué dans le 1er volet, les sportifs de façon large et les sportives de façon plus spécifique, démontreront des besoins en fer plus conséquent, allant bien au-delà de leur propre performance, mais avant tout car ils en élimineront plus que la population générale.
Cependant, le plus gros problème pour stocker du fer n’est pas l’apport en fer en lui-même, mais sa biodisponibilité, c’est-à-dire le ratio entre la quantité de fer que nous ingérons vis-à-vis de celle ensuite disponible dans notre corps. La biodisponibilité du fer est généralement assez médiocre, mais elle dépend également de la source de fer.
La biodisponibilité du fer est directement liée à la forme chimique sous laquelle il se présente dans l’aliment consommé : le fer non héminique aura une faible biodisponibilité, tandis que le fer héminique aura lui une meilleure biodisponibilité.
Les aliments d’origine animale (bœuf, volaille, œufs, fruits de mer, etc.) contiennent un mix de fer héminique et non héminique, tandis que les aliments végétaux (légumineuses, légumes verts, céréales, oléagineux, fruits secs, etc.) contiennent quasiment exclusivement du fer non héminique.
Or, l’absorption du fer non héminique est d’environ 5%, quand celui du fer héminique sera de près de 40%. Ces chiffres peuvent varier en fonction de l’étude, de la qualité d’aliments, du caractère individuel d’absorption, mais malgré tout, le fer héminique sera absorbé 8 à 10 fois mieux que le fer non héminique !
Quelques exemples d’aliments animaux et végétaux et leurs taux d’absorption :
Aliments | Quantité de fer moyenne pour 100g (mg) | Fer absorbé (mg) |
Cumin | 66 | 2 à 5,2 |
Spiruline | 35 | 1,1 à 5,3 |
Curry | 30 | 0,9 à 2,4 |
Boudin noir | 23 | 2,3 à 5,8 |
Gingembre | 20 | 0,6 à 1,6 |
Porc | 15 | 1,5 à 3,8 |
Sésame | 14 | 0,4 à 1,1 |
Chocolat noir | 11 | 0,3 à 0,9 |
Foie de poulet | 10,5 | 1,1 à 2,6 |
Palourdes | 8 | 0,8 à 2 |
Cannelle | 8 | 0,2 à 0,6 |
Haricots blancs | 8 | 0,2 à 0,6 |
Graines de chias | 8 | 0,2 à 0,6 |
Dinde | 5 | 0,5 à 1,3 |
Pois chiches | 5 | 0,2 à 0,4 |
Bœuf | 2 à 10 | 0,2 à 2,5 |
Abricots secs | 4,5 | 0,1 à 0,4 |
Moules | 4 | 0,4 à 1 |
Epinards | 3 | 0,1 à 0,2 |
Canard | 3 | 0,3 à 0,8 |
Sardines en boite | 3 | 0,3 à 0,8 |
Amendes | 3 | 0,1 à 0,2 |
Dattes séchées | 3 | 0,1 à 0,2 |
Lentilles | 2,5 | 0,1 à 0,2 |
Dattes séchées | 2,5 | 0,1 à 0,2 |
Œufs | 2 | 0,2 à 0,5 |
Thon | 1,5 | 0,2 à 0,5 |
Maquereaux | 1,5 | 0,2 à 0,5 |
Brocoli | 1 | < 0,1 |
Côte de porc | 1 | 0,1 à 0,3 |
Pommes de terre | 0,5 | < 0,1 |
Blanc de poulet | 0,5 | 0,1 |
Abricots | 0,3 | < 0,1 |
Figues | 0,3 | < 0,1 |
Booster l’assimilation du fer
1er élément, si vous consommez principalement des éléments végétaux, il faut noter que la présence de fer héminique dans votre bol alimentaire, pourra augmenter l’absorption de fer non héminique. Par exemple, il y aura tout intérêt pour un végétarien à manger régulièrement du poisson, mais surtout des œufs dont le taux de fer et d’absorption seront parmi les meilleurs.
2ème élément, la consommation d’aliments contenant de la vitamine C – principalement les fruits et légumes, avec parmi les tops : cassis, persil, poivrons, agrumes, kiwis, fruits rouges – potentialise l’absorption du fer. Un verre de 100 ml de jus d’orange maison permet de multiplier par trois l’absorption du fer !
Attention aux faux amis
A l’inverse, les aliments contenant du calcium (principalement les produits laitiers), la caféine et les tanins présents dans le thé pourront démontrer un effet inhibiteur sur l’absorption du fer et ne devront donc pas être consommés à proximité d’aliments riches en fer, si votre objectif est d’optimiser son absorption.
Niveau 2 : la supplémentation
Le réflexe de beaucoup de sportifs sera soit de se supplémenter de façon anarchique avec l’idée que plus les différents stocks seront hauts (fer, vitamine C et D, etc.), plus ils seront en forme. Ou encore de faire suivre une prise de sang jugée personnellement comme médiocre, d’une supplémentation automatique. Les choses ne sont pas aussi simples et surtout ne seront pas optimales si gérées de cette façon.
Il faut d’abord savoir que même pour un(e) sportif(ve) de très haut-niveau aux charges d’entraînement intenses et récurrentes, la supplémentation ne sera que très rarement nécessaire. Si son alimentation est variée et adaptée à ses besoins, ses relevés sanguins seront le plus souvent dans le vert. Les cas de supplémentation, pour le fer, seront le plus souvent spécifique : remonter un faible niveau en amont d’un stage en altitude de plusieurs semaines, difficulté à absorber et stocker le fer de l’alimentation, menstruations abondantes, etc.
Ces différents cas seront spécifiques et liés à un stress important ou à un profil individuel. Dans les deux cas il faudra apprendre à connaitre la réponse de son athlète au travers de mesures sanguines à mettre au regard de la période (saison, type d’entraînement, vie personnel, dossier médical, calendrier compétitif) pour les anticiper lors de leur répétition d’une saison sur l’autre par exemple. Par la suite, pour mettre l’accent sur une alimentation adaptée et réaliser des mesures sanguines anticipées. Par exemple, lors de stages d’entraînement en altitude, nos athlètes réalisent différentes analyses sanguines 3 mois avant leur commencement, pour pouvoir réajuster les différentes carences et/ou mauvaises conduites. Cette stratégie permettra de commencer le stage dans un état physiologique optimal et ainsi maximiser les gains d’entraînement.
Par ailleurs, une supplémentation de fer à trop forte doses aura une action pro-inflammatoire et pro-oxydante à l’inverse des objectifs souhaités, pouvant fortement augmenter les risques de blessures ou de forte fatigue.
Sans aller jusque-là, certains compléments ferriques pourront provoquer des dérèglements gastro-intestinaux chez certaines personnes. D’autre part leur absorption sera nettement moins efficace que pour le fer alimentaire, c’est pourquoi elle ne devra être qu’exceptionnelle pour des personnes ayant réellement besoin d’une source supplémentaire, l’alimentation ne leur permettant pas de repasser le cut minimal.
Ce constat et ces préconisations devront absolument être réalisés par un spécialiste médical, qui saura choisir le complément adapté à vos besoins, sa dose et sa prise de façon individualisée. Et, comme pour l’alimentation, un simple verre de jus d’orange ou tout autre source de vitamine C, alimentaire si possible, permettra d’augmenter son absorption et la prise lors du repas de diminuer les risques de problèmes gastro-intestinaux.
Par ailleurs, il existe différentes sources de fer, sous forme ferreuse (sulfate, gluconate, fumarate) ou ferrique (citrate, sulfate). D’un point de vue de la recherche scientifique il semble que les préparations de sulfate ferreux à libération lente restent le traitement établi et standard, compte tenu de leur bonne biodisponibilité, efficacité et tolérabilité. Cependant, comme pour tous les sujets, l’être humain a un caractère individuel et ce qui fonctionnera pour la plupart, ne fonctionnera pas nécessairement pour tous.
Niveau 3 : traitement par injection à base de fer
Cette dernière étape n’est que très exceptionnelle et décidée à la lecture du médecin, lorsque les remédiations par l’alimentation et les différentes options de supplémentation n’ont pas permis de solutionner une anémie ferriprive. Elles sont très rares et doivent demeurer exceptionnelles.
Dans de rares cas, elle peut également être choisie pour des athlètes souffrants d’importants problèmes gastro-intestinaux lors de supplémentation par voie orale, l’injection permettant de contourner l’intestin.
Mais, elle reste très exceptionnelle en France. En effet, un risque d’environ 0,1% de réaction sévère anaphylactique ou anaphylactoïde étant rapportée, elles ne peuvent être réalisées que sous surveillance médicale jusque 30 minutes après l’injection et dans un environnement disposant de matériel de réanimation.
Comme souvent donc, deux éléments se dégagent pour ces carences souvent constatées chez la femme sportive et parfois l’homme :
- Une alimentation de qualité, diversifiée et adaptée à la pratique sportive intense sera le plus souvent suffisant à la prévention de toute carence,
- Une stratégie adaptée à l’historique et aux retours de la sportive ou du sportif,
- L’empathie envers ses athlètes permettant de s’adapter à leur caractère individuel,
- Une vision large et globale du chemin vers la performance et l’épanouissement personnel.
@AUBRYANAEL Anaël Aubry Sport scientist Anaël AUBRY aubry_anael