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Alimentation Trail, je mange quoi, quand, comment ?

Les semaines précédentes, nous avons envisagé l’alimentation et l’hydratation pendant la semaine précédant la course, avec rappelons-le une approche en 2 temps : je prive mon corps de glycogène, puis j’en optimise les niveaux. Nous avons ensuite parlé du jour de la course, selon que le départ soit en matinée ou en journée. Dans ces 2 articles, nous avons insisté sur la nécessité impérieuse de renforcer l’imperméabilité de la barrière intestinale et d’avoir un niveau de réserves énergétiques optimal.

 

Souffrance intestinale

Essayons d’examiner simplement les processus physiologiques mis en jeu pendant la course. Pour produire un mouvement, mon corps utilise ses ressources énergétiques (glucides, lipides) en dégageant de la chaleur évacuée sous forme de transpiration. En clair, je consomme de l’énergie et je perds de l’eau et des sels minéraux. J’améliore ma performance si à une intensité donnée je consomme moins d’énergie et si je suis capable de compenser par l’hydratation et l’alimentation les pertes occasionnées.

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Mais ce n’est pas tout. A l’effort, la circulation sanguine est concentrée au niveau des muscles, donc principalement au niveau des membres inférieurs (les jambes). Conséquence, le territoire intestinal est moins irrigué (on parle d’ischémie digestive), ce qui va fortement compliquer l’assimilation des aliments. Autre point à ne pas négliger, les chocs excentriques de la course augmentent la souffrance intestinale en provoquant des micro lésions mais aussi en rendant difficile toute alimentation solide.

Ainsi, il est logique et très courant d’entendre des coureurs se plaindre d’inconfort digestif en course, et rappelons ici que les désordres gastro-intestinaux sont la cause numéro 1 d’abandons en ultra trail (environ un quart des abandons).

 

La parade des gens heureux

Puisque nos intestins sont mis à rude épreuve à l’effort, il faut mettre en place des stratégies pour les épargner.

  1. La gestion de l’effort. Plus l’intensité est « basse » et régulière, plus la part de lipides utilisée dans le mélange de carburants lipides-glucides est importante, et plus les stocks de glycogène sont épargnés. Autre avantage, une bonne gestion de course permet un confort d’alimentation et d’hydratation en course, nous y reviendrons.
  2. Puisque l’estomac et les intestins sont en moindre mesure de faire leur travail, il faut tout simplement les épargner en limitant au maximum les apports sous forme solide.

C’est donc sous forme liquide que doivent se faire l’essentiel des apports nutritifs, avec le double avantage de fournir l’eau, les sels minéraux et tous les éléments nutritifs en qualité et en quantité. Bien entendu, l’affaire est plus compliquée que cela car après plusieurs heures de courses, au-delà de l’écœurement fréquemment provoqué par le sucre et le goût des boissons, l’envie de manger du solide, et particulièrement des aliments salés, se fait pressante. Et il est important de se faire du bien ! C’est malheureusement là qu’adviennent la plupart des erreurs, au détour d’une légère ou sévère hypoglycémie. Le coureur se jette sur les premiers aliments venus, au hasard de la table de ravitaillement. Or, la digestibilité des apports solides est une nécessité absolue.

 

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Je mets quoi dans mon eau ?

Puisque je dois m’alimenter sous forme liquide, la composition de la boisson est de la plus grande importance. Si vous choisissez une boisson du commerce, voici les éléments qu’elle doit contenir :

– Des glucides pour maintenir stable la glycémie (taux de sucre dans le sang). On les choisit pour que leurs actions soient complémentaires : à faible et à haut DE (dextrose Equivalent). Donc, en plus des dextrose, fructose, saccharose, il faut des maltodextrines.

– Des sels minéraux pour compenser les pertes minérales à l’origine d’un déséquilibre ionique, lui-même responsable de perturber les échanges cellulaires. Il faut donc du sodium (Na) (au moins 1g/litre), du Zinc (Zn), du Potassium (K), et du magnésium (Mg) si l’effort est long (> 6h) ou en conditions chaudes. Attention à choisir ces sels minéraux sous forme de citrates et de bicarbonates. Les pastilles de sel et autres chlorures sont à éviter car ils peuvent provoquer des troubles digestifs.

– Des acides aminés branchés, les fameux BCAA (leucine, isoleucine, valine), qui vont lutter contre la fatigue centrale et périphérique. Un apport en glutamine (avant et pendant l’effort) a un effet protecteur des systèmes intestinaux et immunitaires.

– Des vitamines permettant une meilleure assimilation des sucres, notamment la vitamine B1

Enfin, au-delà de la composition, il faut être attentif aux saveurs dont certaines provoquent rapidement l’écœurement. Ce phénomène est très individuel, chacun devra tester en rando-course sa boisson de compétition.

 

Combien, quand, comment ?

Tout d’abord, il faut fractionner les prises, c’est-à-dire boire par petites quantités et petites gorgées. Au total, il faut boire ~500ml/heure mais cela dépend des conditions extérieures et de votre physiologie. Ainsi, les 800ml/heure peuvent être facilement atteints. Plus les conditions sont chaudes et plus il faudra diluer votre boisson. Le coca cola ? Il fait surtout du bien à la tête mais sa composition est inadaptée aux efforts de longue durée.

Il faut boire régulièrement pour éviter une grosse prise indigeste. Certains coureurs mettent une alarme toutes les 15mn pour ne pas omettre de s’hydrater.

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Côté solide, même si on en limite les apports, ils restent indispensables sur les très longs efforts. Les aliments doivent être digestes et énergétiques : et revoilà la banane bien mûre (à prendre en 2 prises), la pâte d’amandes et la pâte de fruits, ainsi que des barres énergétiques testées. Ces prises alimentaires doivent être espacées le plus possible, et réalisées soit à l’arrêt au ravitaillement, soit dans une phase marchée, afin que la mastication soit totale et que la digestion mécanique et chimique commence bien dans la bouche.

2 questions fréquemment posées :

– après le coca, les TUC ! Comme pour la boisson américaine, le biscuit salé fait du bien à la tête mais pas tellement au corps. Il faut donc en limiter les prises.

– les gels énergétiques : leur composition est souvent inadaptée aux longs efforts, et ils favorisent l’apparition de troubles gastro-intestinaux.


Dernier conseil, la mise en place d’une stratégie nutritionnelle est un processus qui demande du temps de la réflexion, des échanges. Ce qui est bon pour moi, au niveau des quantités et de la qualité, ne l’est pas forcément pour mon voisin. Quoi qu’il en soit, je dois établir avant ma course ce que je vais boire et manger, quand et où je vais me ravitailler et refaire mes stocks. C’est au prix de cet investissement que je vais progresser dans ma performance, mon plaisir et 
mon confort de course.

Voici un article très intéressant sur Que manger le jour de la compétition ?