Lors d’un précédent article généraliste https://www.lepape-info.com/entrainement/entrainement-running/progresser/le-test-deffort-est-il-aussi-important-en-trail-que-pour-la-route/ nous avions évoqué les différences entre les tests de terrain et les tests de laboratoire, ainsi que les différents éléments qui peuvent ressortir de ces tests.
Cela étant, le constat suivant est fréquent : il existe un décalage entre les attentes des athlètes et les données fournies par les tests. Pourtant, avec davantage de concertation, il est possible de rechercher des éléments tangibles susceptibles d’améliorer les procédés d’entraînement et in fine la performance.
Des sociétés comme Sporttesting ou PerfTrail se sont engouffrées dans la brèche en proposant des batteries de tests sur le terrain. De même, les récentes vidéos de Cyrille Gindre (laboratoire Volodalen en Suisse) sur les tests de Maud Mathys démontrent tout l’intérêt de ces tests : une meilleure compréhension du fonctionnement de l’athlète, et des perspectives de travail.
Stop au VO2max
Trop souvent, l’athlète ressort d’un test d’effort avec la valeur prétendue suprême : le VO2max, c’est-à-dire la consommation maximale d’oxygène.
Certes, cette donnée est intéressante puisqu’elle indique la cylindrée du moteur, mais elle apporte peu d’informations sur l’athlète.
De plus, il faut pouvoir la comparer avec d’autres tests réalisés dans le même laboratoire car les données peuvent varier d’un analyseur de gaz à l’autre.
Ensuite, si le test est réalisé à plat, le VO2 max doit être mis en relation avec la VMA de tapis obtenue.
La relation statistique entre ces 2 valeurs est la suivante : VO2max = 3,75 x VMA.
Selon le rendement, cette relation peut varier assez fortement, entre 3,3 et 4,3 sur un récent protocole de recherche sur 20 sujets.
Concrètement, pour un VO2max de 60 mLO2/min/kg, la VMA moyenne est de 16 km/h, mais elle peut varier entre 14 et 18 km/h, ce qui fait d’énormes différences. De plus, il faut distinguer la vitesse atteinte en fin de test et la VMA.
Cette dernière est la plus petite vitesse d’atteinte de VO2max, c’est à dite la vitesse correspondant à la stagnation de la consommation d’oxygène (phase plateau visible dans l’immense majorité des cas) ; alors que la vitesse atteinte en fin de test dépend de la qualité des processus anaérobies. On peut par exemple atteindre 18 km/h à VO2 max, mais poursuivre le test jusqu’à 19 km/h. Ces différences sont à prendre en compte à l’entraînement.
Ensuite, pour mieux appréhender les écarts entre VMA et VO2max, il faut bien entendu s’intéresser au coût énergétique de la locomotion (Cr) que l’on exprime en mLO2 par unité de distance ou en kJ (kiloJoules) par unité de distance. Pour passer de l’oxygène aux Joules, on utilise le fameux Quotient Respiratoire dont la valeur nous informe sur la part de glucides/lipides utilisés à l’effort.
À une vitesse donnée, plus le QR est faible, plus la part de lipides utilisée est importante et plus l’athlète est endurant. L’évolution du QR nous renseigne également sur les parts respectives des métabolismes aérobie et anaérobie, de part et d’autre du cross-over point (QR = 1).
Pour les traileurs, s’il est important de déterminer le coût énergétique à plat, il apparaît également crucial de le déterminer en montée, et si possible à un pourcentage au moins égal à 15%. Le rapport entre les coûts à plat et en montée est également un indice important de la capacité de performance des traileurs. En effet, une bonne économie de course en montée peut aboutir à de gros écarts de performance.
La problématique des seuils
Sur chaque rapport de test d’effort figurent les fameux seuils, déterminés plus généralement par les ruptures dans le débit ventilatoire, via la méthode des équivalents respiratoires. On peut la compléter avec du lactate et les fameux seuils à 2 et 4 mmol, mais pour des raisons techniques et biologiques, cette méthode est contestable.
Si les données sont souvent valables, elles sont parfois farfelues en donnant un seuil 1 à 97% de VO2 max par exemple.
Pourquoi ? parce que cette détermination est donnée statistiquement par la machine, et que le débit ventilatoire peut ne pas présenter de ruptures.
Par conséquent, il est souvent judicieux de déterminer les seuils sur le terrain, et plus spécifiquement le seuil anaérobie, très utilisé à l’entraînement.
Un cas concret à l’étude
Voici dans le tableau ci-dessous les résultats de 2 athlètes très performants, l’un en trail long et l’autre en KV. Ont été calculés :
- 2 coûts énergétiques à plat à 12 et 14 km/h, avec les % de VO2max respectifs
- 1 coût énergétique à 15% de pente et 7,5 km/h, et le % de VO2max
- Le VO2max
- La vitesse ascensionnelle à 15% (pente constante pendant le test incrémental)
Résultats :
Ces résultats ont été collectés à l’hôpital de Toulouse dans le centre de médecine du sport dirigé par le Docteur Fabien Pillard. De nombreux athlètes étant passés dans ce même laboratoire, nous savons que les résultats sont cohérents avec le niveau objectif de chacun.
Ainsi, le VO2 max supérieur à 80 du deuxième sujet est vraiment excellent, voire exceptionnel. Il est en lien avec le niveau de l’athlète, élite en Kilomètre Vertical, et avec le 12,5 km/h de VMA asc à 15%.
Seuls des athlètes comme Sylvain Cachard, Thibaud Baronian et Baptiste Fourmont ont fait mieux sur ce même protocole.
Par contre, on voit que l’économie de course de ce sujet n’est pas bonne à plat, et même en montée, comparativement au premier sujet qui possède une bonne économie de course.
Conclusion, le deuxième coureur a un moteur puissant mais un mauvais rendement, c’est-à-dire une grosse consommation énergétique qui dégrade son niveau d’endurance.
Si on pousse un peu plus loin en examinant les courbes (non montrées ici), on voit que le QR de 1 est atteint pour 11km/h, cela veut dire que la part du métabolisme anaérobie engagée est forte (de 11 à 12,5 km/h).
Ces données viennent étayer le constat fait avec cet athlète, un décalage entre ses performances en montée (sur 30-40min) et ses performances en trail sur des durées plus longues.
L’économie de course (+ 18% par rapport au sujet 1 à plat, et moins de 12% en montée) semble nuire fortement à la performance.
En 2 mots, les pistes de travail à l’entraînement avec cet athlète sont les suivantes : travailler en endurance fondamentale, améliorer le métabolisme des lipides notamment par le croisé à intensité basse et régulière, optimiser le renforcement qui peut permettre une amélioration du rendement…
Pour le coureur 1, la problématique est inverse : un bon rendement mais un moteur à optimiser. Toutefois, malgré un VO2max inférieur de 23%, les pourcentages de VO2max à 12-14 km/h à plat et à 7,5 km/h en montée ne sont pas très éloignés de l’athlète 2 car celui-ci, moins économe, consomme bien plus d’oxygène à une vitesse donnée.
Par exemple, à 7,5 km/h en côte à 15%, l’écart n’est plus que de 12%. Ces chiffres montrent tout l’intérêt de la détermination des coûts.
Pour cet athlète, les pistes de travail sont différentes : optimisation du VO2max par un travail qualitatif sollicitant le métabolisme oxydatif à plein régime mais également le métabolisme anaérobie, travail au seuil et autour de l’intensité spécifique des courses-objectifs.
Ainsi, on peut ressortir d’un test d’effort avec des données concrètes pour orienter favorablement les entraînements. Bien entendu, nous nous sommes limités ici aux données énergétiques fournies par ce type de test. Elles peuvent être complétées parfois par des données musculaires, utiles et complémentaires.
1 réaction à cet article
Jean Marie olagnier
Merci pour ce partage . La VO2 max reste un élément desicif en prendre en compte mais comme donnée elle peut rendre étroit le spectre d analyse d un sportif . Ces dernières années ont faciliter l apport de données sur les capasites physiologiques chez tout les sportifs et créer une reelle apetance . L interprétation des donnees est la vraie valeur valeur ajoutée et permet de réduire l effet loupe.
L analyse de Cyrille Gindre est tout à fait intéressante . Merci pour votre partage