Les appuis en course à pied. Quels muscles renforcer pour améliorer ses performances et moins se blesser ? (1ère partie)

La marche et la course sont les plus naturelles des activités humaines depuis la nuit des temps. Elles devraient être les plus simples à analyser et à décrire. Et pourtant ...
Des bibliothèques entières sont dédiées à ces deux activités avec des approches très savantes au plan anatomique, physiologique, locomoteur ou biomécanique. Lorsqu'ils existent, les échanges sur ce sujet entre les professionnels du sport et de la santé sont souvent passionnés voire conflictuels. Il est impossible d'aborder le sujet complexe des appuis en course à pied à l'occasion d'un seul article. Mais il est sans doute possible de faire passer des notions essentielles avec pour objectif l'amélioration des performances et la prévention des blessures.

Les trois phases de l’appui.

Ce premier chapitre est a priori théorique et primaire mais il doit être considéré comme essentiel.

Lorsque le membre inférieur à terminé la phase aérienne, il se pose au sol. C’est la phase de réception, nommée aussi phase d’attaque ou d’atterrissage. Il s’agit d’une phase freinatrice caractérisée par un travail « excentrique » des muscles et des tendons du pied et de la cheville en priorité. Mais les muscles et tendons de de la jambe et de la cuisse, voire du tronc, sont aussi sollicités.

Vient ensuite la phase de soutien, nommée aussi phase d’équilibre, qui est dédiée principalement à la recherche de la stabilisation de l’appui. C’est une phase « isométrique » qui va permettre aux muscles du pied et de la cheville d’aligner et de stabiliser les articulations de la cheville puis du genou et de la hanche.

La dernière phase de l’appui est nommée phase de poussée. Elle a pour objectif la propulsion et le décollage. C’est une phase plutôt « concentrique » au niveau du travail musculaire des muscles fléchisseurs plantaires, les muscles de la face postérieure de la jambe.

 

 

Les trois phases et leur répartition dans le temps

Ce découpage dans le temps va sans doute surprendre les novices et irriter les dogmatiques. Voici les chiffres moyens pour un coureur se déplaçant à 15 km/h. La phase d’attaque est très « furtive » car elle utilise environ 15 % du temps de l’appui total. La phase d’équilibre est plus longue en utilisant environ 35 % du temps de pose. Enfin, la phase de propulsion est la plus longue, environ 50%. Bien évidemment, ces chiffres varient en fonction de la vitesse de course, de l’ancienneté de la pratique, de l’économie de course et de la fatigue. Nous devons tous accepter de penser que les méthodes d’analyse, notamment  pour un coureur qui se déplace à 20 km/h ou plus, ne sont pas encore assez fines pour sérier les phases d’attaque, de soutien et de poussée de manière très précise dans le temps.

 

 

Quelle est la phase la plus importante ?

Pour un médecin du sport de terrain, voici quelques observations à débattre et modulables.

La phase de réception a beaucoup été étudiée par les scientifiques du sport et par les équipementiers. C’est sans doute la plus facile à étudier et elle a beaucoup fait évoluer les matériaux amortissants, les chaussures et les technologies.

La phase d’équilibre est primordiale pour les professionnels de santé qui accompagnent les sportifs : pas de prise en charge ou de prévention des blessures sans renforcement neuro-musculaire ou travail de stabilisation.

La phase de propulsion est reliée à la performance, donc choyée par les entraîneurs et les préparateurs physiques.

Aussi, dans le microcosme du running et du trail, il est facile d’imaginer que les échanges pluridisciplinaires concernant les appuis du coureur sont, et seront toujours riches et passionnés.

 

 

Attaque talon, médio-pied ou avant-pied : une analyse en deux dimensions

Les notions d’attaque talon, médio-pied ou avant-pied sont relativement récentes. Elles permettent de bien transcrire ce qui se passe lors de la première phase d’attaque en montrant très clairement le pic d’impact.

Mais elles ne décrivent que sommairement ce qui se passe lors des phases de stabilisation et de propulsion. Car, aussi pertinente que soit l’analyse axiale, elle n’aborde les appuis que dans deux  plans de l’espace, le plan horizontal et le plan sagittal. De plus, en classant d’une manière dogmatique les coureurs à pied selon leur type d’attaque, nous réduisons d’une manière un peu simpliste la diversité et la complexité des appuis.

 

 

Inversion et éversion : une analyse en trois dimensions

Les mouvements de la cheville et du pied sont très complexes à appréhender lorsqu’il faut les décrire dans les trois plans de l’espace. Gardons toujours en mémoire que, à l’appui, le pied et la cheville se déforment dans le plan horizontal (pied plat/pied creux), dans le plan sagittal (arrière/avant) mais aussi et toujours dans le plan frontal (intérieur / extérieur).

eversion inversion

Les sportifs qui ont été victimes d’une entorse de cheville ou du pied savent qu’il faut beaucoup de temps pour récupérer et courir à nouveau sans douleur. Ces entorses surviennent le plus souvent lorsque le pied part brutalement vers l’intérieur de la cheville a l’occasion d’un mouvement traumatique d’inversion très inhabituel. Ce mouvement complexe d’inversion associe une flexion plantaire de la cheville et du pied, une adduction et une supination. Il est responsable des lésions ligamentaires, tendineuses et osseuses qui compliquent les entorses.

Au contraire, chez les coureurs à pied, le pied part plutôt vers l’extérieur et décrit un mouvement nommé éversion. Ce mouvement est physiologique et protecteur. Il s’agit d’un mouvement naturel associant flexion dorsale de cheville, une abduction et une pronation. Ce mouvement physiologique participe activement à l’amortissement, à l’équilibre et à la propulsion. Mais, quand la fatigue s’installe, le valgus du pied et la pronation s’aggravent car les muscles du pied et de la jambe n’ont plus le tonus nécessaire pour soutenir l’arche interne du pied.

La deuxième phase de l’appui, la phase d’équilibre, s’allonge, se dégrade et le pied devient plat. Éversion et pronation dynamiques deviennent pathologiques et sont alors responsables des blessures.

Regardez, ou mieux filmez, les appuis de vos amis et amies à la fin d’une sortie longue. Vous remarquerez très rapidement que l’appui dynamique du début de séance a pratiquement disparu et que l’appui se fait arrière-pied en valgus et médio-pied à plat. Il est d’ailleurs facile et intéressant de mesurer le « drop naviculaire », c’est à dire la distance entre l’os naviculaire interne (le scaphoïde) et le sol, d’abord au repos avant la course puis à la fatigue.

PHIL DROP

Une seconde partie pour faire suite à cet article évoque la phase de stabilisation, les muscles extrinsèques et muscles intrinsèques du pied ou encore l’importance du gainage du pied avec l’explication de différents exercices: https://www.lepape-info.com/entrainement/entrainement-running/les-appuis-en-course-a-pied-quels-muscles-renforcer-pour-ameliorer-ses-performances-et-moins-se-blesser-seconde-partie/

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