Trail : La séance sans fin pour développer son VO₂max et son temps limite

Voici une idée de séance d'entraînement pour développer le VO₂max des traileurs. Utile notamment pour certaines et certains qui en ont parfois besoin. Même si les distances sont longues, travailler le qualitatif en l'occurrence la puissance aérobie n'est pas superflu loin de là.

La piste, lieu de prédilection pour développer la puissance aérobie

Une séance pour le trail … sur la piste ?

A première vue, cette séance n’a rien de spécifique pour le trail. Et bien détrompez-vous ! Les recherches en trail et ultra trail, ainsi que les constats de terrain, montrent que la consommation maximale d’oxygène (ou VO₂max) est un facteur de performance essentiel.

Cette donnée cardio-vasculaire témoigne de la capacité de notre organisme à prélever, transporter et utiliser l’oxygène de l’air, afin de dégrader les composés énergétiques (glucides-lipides) au sein des cellules musculaires et de fournir l’énergie du mouvement. Par conséquent, être performant sur du long et même très long, vallonné et technique ne dispense pas de travailler le qualitatif car la vitesse de déplacement s’exprimera toujours en pourcentages de la puissance. Ainsi, le développement de la filière aérobie doit être effectif sur les versants capacité et puissance.

Il existe de multiples voies pour développer le VO₂max et sa vitesse associée de terrain (la vitesse maximale aérobie, ou VMA) en jouant sur le volume de la séance, le nombre de séries et de répétitions, l’intensité des fractions et celle de la récupération mais tout commence évidemment par l’évaluation.

L’idéal pour évaluer la VMA est de procéder à un test progressif de type VAMEVAL. Pour autant, la détermination de cette vitesse qui va servir à calibrer de nombreux entraînements n’est pas suffisante. En effet, à VMA égales, les performances des coureurs peuvent grandement varier, et cela après quelques minutes de course seulement. C’est pour cela que la notion de temps limite est importante. Ce temps limite, richement documenté dans la littérature est le temps qu’un athlète peut tenir à VMA. Il est important que ce test complète systématiquement celui de la VMA.

Ainsi, un coureur de route mais également de trail ne doit pas s’intéresser qu’à la VMA brute, mais bien au triptyque VMA-Temps de soutien-Endurance.

Le but des séances de développement est de provoquer un stress métabolique qui va contraindre notre organisme à réagir et s’adapter. La séance présentée est basée sur la VMA et sur la capacité à la maintenir dans le temps. C’est une séance très difficile, donc à ne pas répéter régulièrement. Quand l’athlète flirte longtemps et répétitivement avec sa VMA, de nombreuses habiletés mentales sont également mises en jeu.

 

Un besoin d’expertise

Cette séance nécessite de l’expertise et de la fraîcheur physique et mentale. Pourquoi ? Parce que l’athlète va devoir aller le plus loin possible en respectant l’allure demandée. La difficulté est croissante car la distance augmente de 100m à chaque fraction, alors que la récupération ne varie pas ! De plus, l’athlète doit être en mesure de maîtriser son allure de VMA, ce qui n’est pas toujours évident. Notre conseil est de mémoriser cette allure en fin d’échauffement par 3 lignes droites courues à 100% VMA.

 

 

Paramètres Séance 2
Niveau de difficulté (1-10) Difficulté maximale 8-10
Niveau d’expertise (1-10) > 7
Objectifs Développement VO₂max et temps limite. Habiletés mentales
Place dans la saison En période de préparation physique générale(PPG). Ne pas réaliser dans les 15 jours précédant une compétition.
Echauffement Complet = 25 min course progressive + éducatifs et accélérations
Corps de séance 100m/200/300/400/500… jusqu’au décrochage
Intensité des fractions 100% VMA
Repères de fréquences cardiaques > 90% FC réserve et FC max, jusqu’à 100%
Récupération Récupération unique 100m trot
Intensité des récupérations ~50% VMA
Retour au calme 15 min de récup à 50% VMA
Validation Palier atteint, sensations, ~FC Max

 

Consignes de réalisation 

Pour cette séance, les consignes sont simples : être le plus régulier possible ! Toute erreur sur les premières fractions se paie cash sur les suivantes car l’allure demandée fait évoluer sur le fil du rasoir. Ainsi, il faut contrôler les temps de passage tous les 100m sur chaque fraction. La séance s’arrête quand on n’est plus capable de tenir l’allure, ou de récupérer en courant. Cela peut survenir au milieu ou à l’issue d’une fraction. Le port du cardiofréquencemètre est fortement conseillé pour analyser au mieux les données, comme nous allons le faire par la suite.

Quand la séance commence à être difficile (généralement après le 400m), pensez au relâchement et concentrez-vous sur des paramètres comme la foulée et la respiration.

 

Critères de réussite

La séance commence à être intéressante si vous parvenez au moins aux 600m, soit un volume global de 2100m à VMA, ce qui constitue une bonne base. L’athlète qui atteint les 1000m réalise 5500m à VMA, ce qui est une grosse séance. Sachez que pour une même VMA, la fraction maximale atteinte peut varier fortement. Sachez également que pour un(e) même athlète, la répétition de cette séance conduit généralement à une amélioration, le plus souvent due au développement d’habiletés mentales (motivation, concentration, relâchement). L’examen des fréquences cardiaques permet également de savoir si l’athlète a su solliciter au maximum ses capacités cardiovasculaires, ainsi que l’état de forme du moment.

 

BALDUCCI 3

Le relevé des FC de la séance sans fin. 900m atteints

 

Sur le relevé des fréquences cardiaques, on peut vérifier le bon déroulement de la séance. Un échauffement progressif (ici de 25 min) suivi d’éducatifs et d’accélérations (les 3 pics). On voit ensuite les 9 fractions tenues par l’athlète puis le retour au calme.

Ici l’athlète atteint la FC maximale de la séance à la 6ème répétition. Sur les premières fractions, les fréquences cardiaques sont moindres en raison du phénomène de cinétique de VO2. Sur les fractions suivantes, l’athlète plafonne à cette même fréquence, signe d’une intensité maximale de l’effort. On remarque également une dérive de la FC de récupération comme cela était attendu, puisque le temps de récupération est stable.

 

Evolution                                     

Cette séance présente la particularité de ne pas avoir de fin programmée ! L’arrêt se fait quand l’athlète n’est plus capable de soutenir la vitesse requise (sa VMA). Selon l’athlète et les objectifs, on peut choisir une vitesse inférieure à sa VMA (pour développer le temps de soutien), voire supérieure (pour développer la VMA).

Deuxième aspect intéressant, la récupération qui est unique : 100 m trot. Si elle apparaît largement suffisante sur les premières fractions, elle devient incomplète à partir du 500m, ce qui rend la séance de plus en plus difficile et qui lui permet d’atteindre les objectifs fixés. En effet, pour solliciter VO2max, il faut faire tourner la machinerie oxydative à plein régime. En raison de la cinétique de VO2 (paramètre variable selon l’expertise des athlètes), cela nécessite des fractions relativement longues (> 2min), ce qui est le cas pour cette séance.

Cette séance est à placer en début et en fin de cycle de développement de la VMA. C’est une séance de développement mais également une séance test qui servira de référence.

 

Séance tirée du livre : « Les 12 séances clés du trail » Outdoor Editions. Pascal Balducci et Anthony Berthou

 

5 réactions à cet article

  1. Voilà une séance qui fait mal aux poumons rien qu’à lire le descriptif 😀 Donc ça donne très envie d’essayer. J’imagine que pour ce type d’exercice, le contrôle de la gestuelle est également très important ? Plus la fraction à VMA augmente, plus l’économie de course (la gestuelle) doit jouer une part importante dans le maintien de l’allure ?

    Autre point, vous dites que cette séance nécessite de l’expertise. Du coup, est-ce qu’il serait intéressant de mettre en place cette séance sur, par exemple, deux séries de 100/200/300/400 (r=100m trot) avant de tenter la « course sans fin » afin d’apprivoiser la bête ?

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    • Bonjour, cette séance n’est pas une finalité, ni un objectif, donc n’a pas vocation à être « préparée »…Elle s’inscrit dans une logique d’évaluation en début puis en fin d’un cycle de VMA pour avoir une base de départ, et constater in fine les progrés réalisés…LE TOUT dans une préparation de course, qui reste bien LA vraie finalité…
      Pour moi, elle permet au coureur de bien valider les progrés réalisés au cours de sa phase de DVT général, et donc de partir sur de bonnes vitesses pour attaquer la prépa spécifique…..

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    • Bonjour. les réponses données sont bonnes. Attention, il ne s’agit pas de couvrir la plus grande distance possible en 1 seule fois (ce qui constituerait un temps limite), mais bien d’augmenter progressivement la distance et donc la durée de l’effort à une même vitesse.

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  2. Bonjour Sylvain,
    je ne suis pas sûr de bien comprendre votre commentaire.
    Pascal te répondra plus finement mais en effet, c’est un effort assez violent donc je préconiserais les semaines précédentes de travailler sur des fractions courtes pour:
    1) habituer l’organisme au travail à haute intensités;
    2) s’imprimer l’allure cible afin de pouvoir la maîtriser et éviter toute accélération excessive sur cette séance, qui se solderais alors inévitablement par un échec.

    Si votre question était de faire deux séries de 100/200/300/400 avant d’attaquer la séance sans fin, alors je vous le déconseille, car comme dit Pascal, il faut de la fraicheur physique et mental. Avant cette séance, un bon échauffement de 20′ progressif avec technique de course et déboulés progressifs sera évidement réalisé.

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  3. Bonjour , vous dites :
    Selon l’athlète et les objectifs, on peut choisir :
    – une vitesse inférieure à sa VMA (pour développer le temps de soutien),
    – une vitesse supérieure (pour développer la VMA).

    Moi je veux augmenter mon temps de soutien de ma VMA . Est-ce que je dois faire la série à 90% ou à 95% de ma VMA ?

    merci
    ps: ma VMA est de 19,5 km/h

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