Du côté de la recherche, de nombreux physiologistes de renom ont recherché et publié sur ce sujet brûlant : Grégoire Millet, Guillaume Millet, Gianluca Vernillo…et plus récemment Marlène Giandolini, Marcel Lemire ou encore Sabine Ehrström.
Toutes ces recherches ont pour but de comprendre ce qui se passe pendant et après la descente sur les plans musculaire, neuromusculaire (c’est-à-dire la commande nerveuse), biomécanique (la foulée et ses modifications), énergétique (la consommation d’énergie calculée en dépense d’oxygène ou en kiloJoules)… et infine d’en déduire des stratégies de préparation pour être plus performant et moins impacté par les effets délétères des descentes.
Une récente étude menée* à l’Université de Calgary par Arash Khassetarash sous la direction de Gianluca Vernillo (ex-chercheur à l’ISSUL de Lausanne et l’un des meilleurs spécialistes mondiaux du trail sur le versant physiologique) s’est une nouvelle fois intéressée à la descente, et plus précisément aux effets consécutifs à la répétition de descentes, sous ces mêmes aspects neuromusculaires, biomécaniques et énergétiques.
En anglais, le terme exact est le « Repeated Bout Effect ».
Pour cette étude, 10 coureurs amateurs ont réalisé 2 descentes de 30 minutes sur une pente de -20% à la vitesse de 10 km/h, avec 3 semaines d’écart entre les 2 tests.
Les chercheurs ont ensuite mesuré la fatigue neuromusculaire, ils ont évalué la biomécanique à plat à vitesses lente ou élevée, et calculé le coût énergétique de la foulée. Ils ont répété ces mesures à différents intervalles : juste après les 2 descentes, puis 1, 2, 3 4 et 7 jours après.
Descendre… pour mieux descendre
Leurs résultats confirment le Repeated Bout Effect, c’est-à-dire l’effet « protecteur » d’une première descente sur les effets engendrés par une seconde descente. Par exemple, à l’issue de la deuxième descente, les douleurs musculaires sont moindres, tout comme la concentration sanguine en créatine kinase (enzyme dont la concentration témoigne de l’atteinte musculaire). De même, l’activation musculaire volontaire et la perte de force en contraction maximale volontaire sont moindres après la deuxième descente, quel que soit le moment de la mesure.
Le protocole de course en descente a également considérablement influencé la biomécanique de la course à plat avec un effet positif sur les paramètres mesurés après la deuxième descente. Ces modifications n’ont toutefois pas modifié le coût énergétique de la course à plat.
Les chercheurs concluent sur une adaptation neuromusculaire consécutive au premier protocole de descente. Associée à une baisse de la fatigue musculaire (moins de douleurs et plus de force), on peut parler d’une réduction des fatigues centrale et périphérique sans modification significative de l’économie de course.
En effet, de nombreuses précédentes études ont montré une modification des paramètres de la foulée allant dans le sens d’une réduction de la dépense énergétique, ou plutôt d’une non-augmentation de cette dépense. On peut parler de principe téléologique.
D’un point de vue pratique, les recommandations à visée des traileurs sont simples :
- S’entraîner régulièrement en descente pour diminuer et même en annuler les effets délétères.
- Pour les coureurs de plaine, pratiquer le renforcement en excentrique pour simuler le travail musculaire caractéristique de la descente, et réaliser le plus fréquemment possible des séjours en montagne.
- Toutefois, réduire fortement le travail excentrique à l’approche des compétitions.
*Arash Khassetarash et al., Neuromuscular, biomechanical, and energetic adjustments following repeated bouts of downhill running, Journal of Sport and Health Science (2021), https://doi.org/10.1016/j.jshs.2021.06.001