Mieux comprendre l’échelle d’ESIE de Frédéric Grappe

Pour calibrer vos séances vous utilisez probablement une échelle d’intensité. C’est-à-dire une échelle qui décompose votre intensité d’effort en plusieurs zones en fonction de données personnelles (fréquence cardiaque maximale, puissance maximale aérobie, puissance au seuil, etc.). En France nous utilisons beaucoup l’échelle d’ESIE de Frédéric Grappe.
Dans cet article nous tenterons de décrypter les phénomènes physiologiques qui sont à la base de cette référence pour vous aider à mieux vous en servir.

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Un cadre qui s’appuie sur des valeurs moyennes

Avant d’explorer chaque zone il est important que vous ayez en tête que les pourcentages mis en avant dans l’échelle d’ESIE (comme dans toutes les échelles d’intensité qui ne sont pas individualisées) sont issues de valeurs moyennes récoltées chez une population donnée.

 

Or physiologiquement nous sommes tous différents. Il existe donc toujours un écart entre la théorie de ces intensités et la réalité de votre organisme.

Mais disons que ce cadre théorique permet d’approcher cette réalité et qu’il est suffisant pour bien hiérarchiser vos zones d’entraînement. Si vous désirez aller plus loin il faut alors vous tourner vers des protocoles en laboratoire ou sur le terrain mais avec un matériel spécifique.

 

 

Quelles valeurs de référence pour cette échelle ?

L’échelle d’ESIE se construit prioritairement avec la fréquence cardiaque maximale (FCmax) et avec la puissance maximale aérobie (PMA). Pour cette dernière, on prend généralement la valeur moyenne maximale mesurée avec un capteur de puissance sur un effort de 4 à 6 min (5 min est un bon compromis). Mais déjà là notons quelques pièges puisque la PMA correspond théoriquement à la puissance à VO2max (quand le système aérobie est poussé à son maximum).

Pourtant, sur un test continu de 4 à 6 min il y a nécessairement une part importante d’énergie fournie par le système lactique. Et même en laboratoire, selon les protocoles et les ergocycles, la puissance observée à VO2max peut varier.

Mais pour trancher et par soucis de simplicité nous vous conseillons de vous baser, au moins dans un premier temps, sur la puissance maximale moyenne sur 5 min comme référence pour la PMA. Et pour gagner en précision vous pouvez aussi réaliser 3 tests 5 min, un en bosse, un sur le plat et un sur home trainer pour préciser vos zones selon le terrain rencontrée (car votre rendement varie avec la pente et entre la route et le home trainer).

 

Notez que déjà là il y a matière à se creuser la tête et à débattre !

Et maintenant déroulons chaque intensité…

 

 

Intensités 1 et 2 (I1-I2)

I1

< 75% FCmax

40-50% PMA

Épuisement au bout de plusieurs heures

 

I2

75-85% FCmax

50-60% PMA

Épuisement au bout de 2 à 4h

 

 

I1 et I2 correspondent aux zones d’endurance « fondamentale ». En théorie cela signifie qu’au bout de ces zones se situe votre seuil aérobie ou SV1. Ce seuil coïncide avec le moment où votre organisme ne peut plus soutenir l’intensité de l’effort sans produire davantage de lactates (mais la concentration de lactates dans le sang reste ensuite stable dans la zone 3).

En pratique à I1 et I2 vous utilisez principalement les graisses, accumulez très peu de fatigue et votre système nerveux n’est pas mis à rude épreuve. C’est pour cela qu’il est très important de passer beaucoup de temps dans ces zones et beaucoup moins au-dessus. A I1-I2 vous construisez votre base et soignez vos mécanismes de récupération.

 

L’intensité 1 est surtout utiliser en récupération active ou lors de longues sorties qu’on ne pourrait réaliser exclusivement en intensité 2.

En intensité 2 vous allez davantage développer votre endurance. C’est, selon de nombreux entraîneurs, la zone à partir de laquelle vous tirez le plus de bénéfices en comparaison de la fatigue engendrée.

 

 

Conseils pour ces zones

– Basez-vous surtout sur la FC pour délimiter vos zones d’endurance.

85% de FCmax pour SV1 semble être une valeur assez haute que l’on retrouve plus facilement chez des athlètes très entraînés. Si vous n’êtes pas un cycliste confirmé il est probable que votre seuil aérobie soit plus proche de 80% de votre FCmax.

– Aidez vous de vos sensations pour trouver votre SV1 et le haut de votre intensité 2. En pratique SV1 correspond au premier essoufflement. Avant la conversation est aisée et au-delà elle devient plus pénible à tenir.

 

 

Intensité 3 (I3)

85-92% FCmax

60-75% PMA

Épuisement au bout de 1h à 2h

 

L’intensité 3 se situe entre les deux seuils, le seuil aérobie (SV1) et le seuil anaérobie (SV2). D’autres échelles décomposent encore cette zone en 2 parties (Tempo, SweetSpot). A cette intensité la concentration de lactates est au-dessus de son niveau de base mais reste stable (avant de décoller en passant le second seuil). Dans cette zone vous utilisez beaucoup plus les glucides et accumulez davantage de fatigue.

 

Actuellement il existe un débat sur l’entraînement entre les deux seuils. Certains, adeptes du concept de polarisation, estiment que cette zone est à éviter pour progresser. Mais d’autres, suivant la plupart du temps l’expérience de terrain, affirment que c’est une intensité à ne surtout pas négliger à l’entraînement.

 

 

Conseil pour cette zone

– Ne confondez surtout pas I2 et I3. Roulez en intensité 3 lorsque votre programme d’entraînement mentionne « endurance » est une erreur plutôt courante qui peut rapidement vous mener au surentraînement.

– Ne délaissez pas, malgré ce que disent certains, un travail spécifique à I3.

 

 

Intensité 4

92-96% FCmax

75-85% PMA

Épuisement au bout de 20 min à 1h

 

L’intensité 4 est celle du seuil anaérobie (SV2). A ce stade là les mécanismes qui servent au recyclage des lactates (et qui permettent donc de maintenir le niveau de lactatémie stable) commencent à être « débordés ». Le taux de lactates dans le sang augmente donc rapidement au-delà de ce seuil (il en va de même pour l’acidité produite). C’est la transition vers la zone rouge !

Le seuil anaérobie est évidemment important dans le puzzle de la performance. Le repousser au maximum (vers la PMA) vous permettra d’être plus économique sur les efforts longs et intenses.

 

 

Conseils pour cette zone

– Se fixer sur la fréquence cardiaque est moins précis à ce stade car la dérive est importante (pour une intensité fixe au seuil anaérobie ou au-delà vous allez commencer à une FC en dessous de 92% de FCmax et vous finirez peut être proche des 100% si l’effort est suffisamment long pour être épuisant). Privilégiez donc la puissance pour vous réguler dans cette zone.

– Vous pouvez aussi faire appel à vos sensations pour mieux cibler cette intensité. En effet, SV2 correspond normalement au second essoufflement. Cela signifie qu’à partir de ce seuil il vous sera très compliqué de parler (impossible de tenir une conversation).

– l’entraînement au seuil anaérobie est difficile et épuisant. Ne commencez à travailler cette intensité que lorsque votre base est suffisamment solide (foncier + intensité 3).

 

 

Intensité 5

96-100% FCmax

85-100% PMA (voire jusqu’à 120% si on élargit la zone)

Épuisement au bout de 5 à 10min

 

L’intensité 5 est celle de la PMA et donc de la VO2max. Pour faire simple on pousse son système aérobie et la consommation d’oxygène à son maximum ou proche de son maximum. A cet instant le système anaérobie lactique fonctionne lui à haut régime. On a donc le système aérobie (oxygène) et le système anaérobie lactique (sans oxygène avec production de lactates) qui alimentent de manière importante les muscles en énergie. C’est efficace (beaucoup de puissance) mais c’est coûteux bien sûr.

Cette zone est une des « stars » de l’entraînement car elle fait référence à la VO2max qui elle-même est souvent citée comme un des facteurs clés de la performance en endurance.

 

 

Conseil pour cette zone

– Comme pour l’intensité 4, se référer à la puissance et non à la FC pour vous réguler dans cette zone.

 

 

Intensité 6

FC non significative (proche du max en fin d’effort)

Au-delà de 150% de PMA

Épuisement au bout de 30sec à 1min

 

L’intensité 6 correspond à un effort qui sollicite principalement la filière anaérobie lactique (sans utilisation d’O2, avec une production de lactates très importante).  La demande d’énergie est en fait trop importante pour être couverte par le système aérobie (plus l’inertie de ce système) donc l’organisme va puiser « en urgence » dans ses réserves en glycogène sans utiliser l’oxygène. En général la FC monte malgré tout mais avec un temps de retard. Il n’est donc pas possible de se fier à elle pour gérer son effort.

 

Pour résumé c’est l’intensité du sprint long voire très long…

 

 

Intensité 7

FC non significative

Puissance maximale sur 1 à 10sec

Épuisement au bout de 5 à 10sec

 

L’intensité 7 est celle du sprint court. Ici c’est la filière anaérobie alactique (sans oxygène, sans production de lactates) qui fournit la grande majorité de l’énergie (filière très puissante mais dont les réserves s’épuisent en quelques secondes).

Quand on travail à I7 on ne réfléchit pas vraiment. On donner tout sur quelques secondes.

 

 

Conseil pour cette zone

– Prenez au moins 4 min de récupération entre chaque sprint pour enchaîner correctement les efforts à I7.

 

 

L’objectif de ce billet était donc de regarder cette échelle d’intensité (et les échelles d’intensité en général) avec un peu de recul et de comprendre les mécanismes derrières les pourcentages énoncés. Et pour réviser cette échelle d’ESIE dans ses aspects pratiques je vous invite à vous référer à cet excellent article du site, qui date un peu mais reste d’actualité :

https://www.lepape-info.com/entrainement/entrainement-cyclisme/apprenez-a-calibrer-lintensite-de-vos-seances-dentrainement/

 

2 réactions à cet article

  1. Article interessant.
    j’ai appris quand temps que débutant il était préférable de pas dépasser 80% de la FCM pendant les premiers semaines/mois. Détails qui est pas précisé sur les autres site Internet.

    je vais l’ajouter à mes favoris.

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