Cyclisme : Comprendre ce qu’est un test à l’effort et son intérêt

Article écrit par Cyril GRANIER - Docteur en sciences du sport / Sport Scientist - Bike Fitter - Entraîneur en sports d’endurance

En cyclisme sur route ou vtt cross-country des termes comme PMA, FTP, seuils reviennent en permanence dans les discussions des coureurs qui à l’heure du tout « Strava », cherchent à comparer en permanence leurs capacités. Mais finalement, d’où tire-t-on toutes ces informations qui définissent notre profil sportif ? L’objectif ici est de comprendre ce qu’est un test de capacité physique et quelles sont les règles à respecter afin d’estimer au plus juste vos qualités physiques.

Avant toute chose il est important de garder en mémoire que les qualités physiques sont multiples, on parle d’endurance, de force, de vitesse, de puissance. Finalement ces tests évoqués précédemment renvoient uniquement à la qualité d’endurance. Le plus connu d’entre eux est le test d’effort croissant (ou test incrémental) permettant de déterminer la Puissance Maximale Aérobie et la consommation maximale d’oxygène (le fameux VO2max) qui se déroule généralement en laboratoire.

 

Tout d’abord essayons de comprendre ce qu’est un test à l’effort en laboratoire ?

 

Un test d’effort en laboratoire, dans un hôpital ou dans un centre d’entraînement est un test qui consiste à évaluer les capacités cardiorespiratoires maximales d’une personne afin de déterminer sa consommation maximale d’oxygène (VO2max), sa fréquence cardiaque maximale (FCmax) ainsi que sa puissance maximale aérobie (PMA). Si l’on fait une analogie avec le moteur d’une voiture, on va finalement chercher à savoir si vous êtes un diesel avec des chevaux sous le capot (profil aérobie) ou une formule 1 ayant beaucoup de chevaux mais nécessitant des arrêts fréquents à la pompe (profil sprinteur ou anaérobie). 

Au cours de cette évaluation vous allez pouvoir monter sur un vélo instrumenté ou courir sur un tapis roulant équipé d’un masque qui va mesurer vos variations d’oxygène et de dioxyde de carbone de l’air inspiré et expiré. Parfois on peut également vous proposer une analyse sanguine afin de mesurer les niveaux de lactates dans le sang. Les Lactates dans le sang sont simplement le reflet de votre consommation énergétique et permettent notamment de déterminer les seuils dits aérobies et anaérobies. Mais laissons cela de côté car il y a autant de façons de déterminer ces seuils que d’expérimentateurs et cette notion est souvent décriée à cet égard.

De plus, Il existe différents protocoles de tests mais tous suivent la même logique à savoir une augmentation progressive de la difficulté à un rythme stable au fil du temps. On trouve par exemple des protocoles ou la puissance de travail est augmentée de 50 W toutes les minutes avec un démarrage à 100 W et un arrêt de test jusqu’à ce que vous ne soyez plus capable de tenir l’intensité demandée. On voit d’autres tests qui proposent 25W/2min ou 30 W/3min ou 25W/min….

 

Que mesure-t-on ?

 

Dans une volonté de mesure des différents paramètres évoqués le paragraphe précédent, il est bon de s’assurer de l’étalonnage des appareils de mesure. Dans votre cas il est difficile de dire à votre expérimentateur de procéder à cette manipulation mais un bon centre d’évaluation doit refaire les étalonnages au mieux avant chaque nouveau sujet au pire une fois par jour si les conditions ambiantes de la pièce ou à lieu l’évaluation ne bougent pas.  

Mon expérience personnelle m’amène à vous demander de la prudence dans le choix du lieu de test. Un outil non ou mal étalonné peut donner des résultats farfelus et il n’a pas été rare pour moi de voir des athlètes d’endurance de bon niveau national ou international me donner leur fiche de compte rendu avec des VO2max supérieures à 92ml/min/kg (que l’on ne retrouve que très rarement au plus haut niveau mondial en ski de fond, triathlon ou cyclisme sur route ) ou d’autres ayant le même niveau national avec des VO2max de 60 ml/min/kg… soit les performances d’un sportif « lambda » entraîné en endurance. Cherchez l’erreur… !

Par chance cet indice qu’est la VO2max hormis pour voir comment elle évolue d’un test à l’autre ne vous sera pas d’une grande utilité sur le terrain d’autant plus si vous avez des valeurs de FCmax ou de PMA cohérentes et là-dessus il n’y a qu’exceptionnellement des erreurs sauf si l’on vous arrête avant d’avoir atteint vos capacités maximales.

 

Quel protocole de laboratoire ?

 

La VO2max est tout de même moins dépendante du protocole utilisé alors que PMA l’est complètement. Mais les chercheurs se sont récemment aperçus que pour évaluer la « Vraie » VO2max ils proposaient à leur cobaye un test incrémental comme nous l’avons décrit auparavant et après une ou deux minutes de récupération demandaient à l’athlète de refaire le dernier palier du test. Généralement ce genre de sollicitation amène l’athlète dans ses derniers retranchements et l’on peut constater une augmentation de la VO2max

Même si cette anecdote est intéressante sur le terrain vous pourrez difficilement vous servir de cet indice de performance, aussi le recours à la puissance est aujourd’hui des plus facile. En effet le développement de nombreux outils évaluant la puissance permet pour une somme comprise entre 450 et 1200 € de s ‘équiper d’un capteur de puissance flambant neuf. Il faudra donc s’assurer que le protocole de tests de la PMA soit adapté à votre effort. 

On sait parfaitement aujourd’hui que la PMA est protocole dépendante, c’est à dire qu’en fonction du niveau de l’incrément (augmentation de puissance de paliers en paliers) la PMA ne sera pas la même. Prenons un exemple pour illustrer ces propos. Je suis vététiste pratiquant le marathon Vtt donc un profil très endurant et probablement une constitution musculaire riche en fibres lentes autrement appelées fibres de type 1. Si on me propose un protocole de détermination de la PMA avec des paliers de 2 à 3 min et une augmentation de puissance de 20 à 30 W, je devrais m’en sortir facilement et probablement atteindre des valeurs qui reflètent bien mes capacités maximales aérobies. Maintenant si on me propose un protocole de 25W d’augmentation toutes les minutes, dans ce cas précis l’augmentation rapide de la puissance pour moi qui suis un cycliste de longue distance risque de m’épuiser précocement, le corps n’ayant pas le temps de s’adapter à ces changements rapides. Pour quelle raison me direz-vous ? La réponse est très simple mais pour comprendre revenons aux fibres musculaires composant notre muscle. Un marathonien Vtt aura majoritairement des fibres de types 1 correspondant à son statut de sportif endurant. A contrario un sprinteur sur piste aura majoritairement des fibres de type 2, rapides, qui développent de hauts niveaux de puissance dans un laps de temps très court. Revenons à mon test de 25W/min. cette augmentation de puissance rapide et élevée va à chaque changement de palier solliciter les fibres de type 2 moins nombreuses pour mon vététiste que les fibres de type 1, ces fibres épuisées rapidement auront du mal à répondre au changement d’effort demandé et du coup l’augmentation de puissance va être gérée par mes fibres de type 1 qui vont assurer à elles seules le travail qu’auraient dû faire un ensemble de fibres (type 1 et 2 réunies). Vous comprenez donc bien que si une intensité I est demandée à 70% des fibres d’un muscle au lieu de 100%, cela veut dire que chaque fibre sera davantage sollicitée et de ce fait s’épuisera plus vite…. CQFD. 

Donc au final, des transitions entre paliers avec une puissance augmentée trop rapidement, des fibres musculaires qui s’épuisent plus vite, cela va amener l’athlète à un arrêt précoce du test à cause d’une sensation d’incapacité musculaire alors que l’on a l’impression de ne pas avoir forcé du tout au niveau cardiaque…

Soyez donc vigilant(e) dans le choix de vos centres de tests, plateaux techniques d’hôpitaux, centre d’entraînement et d’évaluation par un entraîneur privé. Il faut surtout que la personne qui vous fait passer le test, prenne conscience de vos attentes, de votre expérience et de votre niveau et type de pratique. Dans l’idéal, ce genre de test ne doit pas dépasser 20 min pour s’assurer d’obtenir des valeurs cohérentes. 

Si vous êtes un sportif hors norme avec une PMA à 500W, imaginez le temps que vous allez passer à faire le test si l’expérimentateur le fait débuter à 100W et augmente de 30W/2min…. Je vous évite le calcul vous allez rester aux environs de 26 minutes sur votre vélo d’évaluation… Dans ce cas précis nous proposons généralement aux sportifs de débuter leurs tests à une puissance initiale plus élevée comme 150 ou 200 W. 

Maintenant prenons l’inverse, un monsieur tout le monde, qui décide de se mettre au sport de manière sérieuse et de débuter par un test d’effort. Si on débute le test à 100W et que l’on augmente l’intensité de 30W/2min, il est fort à parier qui ne lui faudra guère plus de 4 à 8 min avant d’arriver au bout de ses capacités. Pour se sentir fatigué, il se sentira fatigué et aura eu l’impression d’avoir débuter sont test sur une intensité trop difficile pour lui. Peut-être qu’une sage décision dans ce cas précis serait de débuter à 50 ou 70 W et d’augmenter les paliers de 20W/2min.

Vous le comprenez tout est affaire de dosage et de prise en compte de la personne qui est demandeuse de tests. Comme l’entraînement s’individualise, un test d’effort en va de même.

 

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Des parades aux tests en laboratoire ?

On peut effectivement proposer des alternatives aux tests de laboratoire en les faisant directement sur le terrain avec les mêmes outils qu’en laboratoire, Enfin presque. Je dis presque car un analyseur de gaz portatif est terriblement dispendieux et il est rare qu’hormis des laboratoires de recherche ou des équipes professionnelles, des entraîneurs disposent de cet outil sur le terrain. Mais passons car beaucoup de cyclistes ont aujourd’hui des capteurs de fréquence cardiaque, des GPS, ou des capteurs de puissance et certains entraîneurs disposent d’analyseur de lactates portatifs. Tous les ingrédients sont alors réunis pour s’assurer d’une mise en place cohérente de tests de terrains et nous verrons ce que l’on peut faire dans un prochain article.

 

Combien de tests par an ?

 

La plupart des sportifs quand ils en font, s’adonnent à un test de laboratoire une fois l’an, avant la reprise de la saison pour partir sur des bases saines d’entrainement et définir au mieux leurs zones de travail.

En réalité l’idéal serait d’assurer un suivi de ses performances telles que la PMA ou les seuils aérobies et anaérobies dans les sports d’endurance chaque fois que l’on termine un cycle de travail spécifique à l’amélioration de ces qualités. Généralement les entraîneurs fonctionnent par périodes d’entraînement appelées cycles ou blocs et qui peuvent durer de quelques semaines à deux ou trois mois selon l’objectif recherché. Il conviendra dans ce cas de faire un test à chaque fin de cycle pour voir si le coureur progresse grâce à l’entraînement qui aura été fait auparavant.  Bien entendu le recours à un tests de laboratoire est parfois couteux et on peut lui préférer un test de terrain afin d’assure un suivi régulier. Mais attention à ce que ces conditions de tests soient semblables afin de pouvoir comparer ce qui est comparable. 

Faire un test de terrain avec un vent de 30 km/h et une température extérieure de 10°C, n’est pas la même chose qu’un test effectué sans vent avec une température extérieure de 25°C. C’est pour cette raison que les tests sont préférables en condition « stables » comme cela est le cas en centre d’évaluation ou plateau scientifique » dans lesquels les conditions d’humidité et de température sont normalement maitrisées. 

 

LA PMA, VO2max, FCmax ça sert à quoi ?


Ces données se retrouvent une fois que le test est accompli et que nous avons donné le meilleur de nous-même.

Première chose, il faut bien comprendre que les valeurs obtenues sont celles d’un test, un jour « j », dans un lieu spécifique et sur un matériel spécifique. Pourra-ton s’en servir pour nos efforts sur le terrain ? La réponse est oui mais en les adaptant car il est très fréquent d’observer des valeurs de puissances différentes entre les outils d’évaluations mais également entre un test fait sur ergocycle, home trainer, sur route plate ou en bosse. Donc à chaque situation il faudra moduler la puissance de notre effort. Mais grâce à ces informations on pourra se créer une échelle d’intensité de l’effort comme l’ont proposé certains chercheurs en sciences du sport comme Frédéric Grappe (responsable de la performance à la Groupama-Fdj) avec l’échelle ESIE ou bien celles de Andrew Coggan (Training and racing with a powermeter) ou Joe Friel (The training cyclist bible). Ou plus simplement, si vous posséder des appareils de marque Garmin, Suntoo, Bryton… ou des plateformes comme Vélobook, Strava, Trainingpeaks ou Gutaï dans lesquelles l’analyse des données et le paramétrage de vos zones d’effort sont définies de manière automatique.

Vous pourrez ensuite en fonctions de ces zones précises savoir si vous travaillez plus en endurance, en force, en vitesse, en puissance…. Les possibilités d’entraînement sont dès lors infinies et si vous n’avez pas d’idées n’hésitez pas à vous adjoindre les services d’un professionnel de l’entraînement.

 

Cyril GRANIER

Docteur en sciences du sport / Sport Scientist

Bike Fitter

Entraîneur en sports d’endurance

 

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