Depuis sa 1ère réalisation en 1978 à Honolulu (Hawai), le phénomène « Ironman » s’est massivement développé, au point de recenser aujourd’hui quelques 24 Ironman labellisés
(natation : 3.8km ; cycle : 180km ; course à pied : 42.2km, réalisés en ~8h à ~17h) et 42 épreuves 70.3 (natation : 1.9km ; cycle : 90km ;course à pied : 21.1km, réalisés en ~4h à ~7h) – sans compter les triathlons non étiquetés par la marque. Globalement, chaque événement rassemble ~500 à ~2500 participants.
Quelques moments forts depuis sa création :
– 1978 : « Nagez 2,4 miles ! Roulez 112 miles ! Courez 26,2 miles ! Vantez-vous pour le reste de votre vie ! », c’est ce que spécifiait le document remis aux tout premiers participants. L’épreuve a été bouclée en 11h 46min 58s (homme) (12h 55min 38s pour la 1ère femme, édition 1979) ;
– 1983 : le nombre de compétiteurs devient limité. Les meilleurs triathlètes de chaque tranche d’âge seront dorénavant sélectionnés pour s’affronter lors de l’Ironman de Kona (Hawai, en octobre) ;
– 1995 : unique apparition d’un triathlète français sur le podium des championnats du monde : Isabelle Mouthon-Michellys, 2nde place (9h 25min 13sec) ;
– 2011 : le record actuel sur la distance Ironman est établi par Andreas Raelert : 7h 41min 33s ;
– 2016 : le plus vieux triathlète à compléter un Ironman longue-distance a maintenant 84 ans, il boucle l’épreuve en 16h 49min 18s.
À l’image des chronos sur l’Ironman d’Hawai, depuis 1981, les performances ont rapidement progressé jusqu’en 1988, puis se sont stabilisées (<1.4% par décennie ensuite). Entre hommes et femmes, depuis la fin des années 80, les différences moyennes de performance sont de ~9.8% (natation), ~12.7% (cycl) et ~13.3% (càp).
Si l’Ironman est aujourd’hui associé à un style de vie sain, les individus s’y adonnant étaient auparavant considérés « fous »… Parallèlement à la popularisation / rationnalisation de la pratique a grandi la quête d’une préparation adéquate. Et qui dit « préparation » dit « caractérisation » des différentes demandes de l’épreuve.
La demande énergétique
Pour le half- et le full-ironman, cette demande s’élève à ~4500 kcal et ~10000 kcal, respectivement, et est essentiellement basée sur l’utilisation des glucides et lipides au sein des mitochondries du muscle (la protéolyse restant faible) pour renouveler les stocks d’ATP (ie. stocks d’énergie). Sur ~10000 kcal dépensés, ~4000 kcal proviennent des apports ingérés pendant la course (en moyenne >90% de glucides). Les ~6000 kcal restants résultent de la dégradation des stocks initiaux de sucres (~2000 kcal pour un stock initial de ~500g réparti dans les muscles – et un peu le foie) et de graisses.
Les sucres sont la source d’énergie prioritaire du muscle. Cependant, la réserve de glucides s’épuisant plus vite que celle de lipides (ie. après ~4-5h sur ce type d’épreuve, sans apports extérieurs), la contribution des lipides comme source d’énergie peut augmenter jusqu’à fournir >80% de la dépense calorique totale, entraînant alors une baisse de l’intensité d’exercice. Pour éviter cela :
- En compétition, un apport précoce en glucides est nécessaire après la natation. Une ration combinant glucose (60g.h) + fructose (30g.h) permettra d’exploiter 2 voies de transport intestinal des sucres (SGLT1 + GLUT5) plutôt qu’une seule (élevant ainsi le débit d’oxydation des sucres de ~1g.min à ~1.5g.min, donc à 90g.h). Ceci permettra aussi d’éviter les maux de ventre liés à la saturation d’un de ces transporteurs. De tels taux peuvent être atteints tant via des apports hydriques que des gels ou des barres énergétiques. À noter : un effet dose-réponse existe entre la quantité de glucides ingérés et l’effet sur la performance (un minimum de ~20g semble nécessaire pour détecter un début d’effet favorable) ;
- L’ingestion de glucides 30-60′ avant la compétition pourrait résulter en un état d’hypoglycémie 15-30′ après le début d’épreuve (un effet rebond consécutif à l’état d’hyperglycémie). Toutefois, ce phénomène ne semble pas affecter la performance, et seules les personnes sensibles à l’hypoglycémie pourraient être concernées par la mise en place d’ajustements : privilégier les aliments à index glycémique bas (pour favoriser une glycémie stable) ou différer la prise de glucides à 5-10′ avant l’épreuve (induit des effets similaires à une ingestion pendant l’exercice) ;
- Dans les 2-3 jours précédant l’épreuve, un apport journalier de glucides de 10-12g.kg est recommandé afin de « gonfler » les stocks de glycogène (pouvant alors avoisiner ~700g). Ici, l’important sera de respecter les niveaux de satiété/tolérance alimentaire de l’athlète (varier les aliments qui composent l’assiette peut faciliter ce type de démarche). À noter : cette « surcharge » en glucides peut aussi ne pas entraîner d’amélioration (notamment chez des personnes adoptant déjà un régime riche en sucres) ;
- En phase pré-compétitive, l’athlète pourra/devra apprendre à son organisme à soutenir de hautes intensités d’exercice à partir d’une dégradation essentielle des lipides. Périodiser les apports en glucides sur la journée pendant ≥3 semaines peut s’avérer utile, de même que moduler entièrement et durablement le régime en faveur des lipides (70% lipides, 15% glucides, 15% protéines). Cette dernière stratégie s’est notamment montrée efficace à l’égard des troubles gastriques (voir article Iron Man vs Fatwoman). À noter : ces méthodes élèvent souvent la difficulté de l’entraînement (au moins temporairement), et peuvent donc requérir des temps de récupération supplémentaires, ou des ajustements dans la programmation d’entraînements. De plus, ces régimes sont à stopper 3-4 jours avant la compétition pour restaurer l’affinité de l’organisme vis-à-vis de l’absorption et de l’utilisation des sucres (sous peine de ne pas parvenir à les bruler à un rythme important en course).
Les données de terrain montrent, chez les triathlètes, un apport en glucides à hauteur de ~1g.kg.h en compétition Ironman (similaire entre hommes et femmes). Cet apport apparait essentiellement permis grâce à un apport important lors de la partie vélo (1.5g.kg.h, c’est-à-dire 3x plus que sur le marathon).
Un point sur la caféine : elle est utilisée par >90% des triathlètes en compétition (3-6mg.kg) et démontre des effets sur la mobilisation des graisses, la facilitation de l’activation nerveuse sympathique et la baisse de l’impression d’effort. Ses effets (cognitifs et sportifs) sont maximaux après 30-90′, puis s’estompent jusqu’à ~5h, suggérant alors un apport répété en compétition toutes les ~2h (cet apport peut être incrémenté au cours de l’épreuve pour compenser les effets croissants de la fatigue). À noter : une habituation existe à l’entraînement, de telle sorte que son utilisation régulière limite son impact. La caféine peut/doit donc être supprimée lors de la phase d’affûtage. Néanmoins, ses effets secondaires invitent évidemment à son expérimentation préalable lors d’entraînements à allure de compétition (doses, mélanges, goût, etc.).
Retrouvez les autres parties de notre dossier « Ironman en 5 parties » avec :
– La demande thermorégulatoire
– Les variations de poids de corps
– Les règles d’or de l’entraînement – Crampes/Courbatures/Soucis gastriques
Cyril Schmit (Innov.training)
1 réaction à cet article
fabaron
bonjour , je reviens sur votre commentaire « ravitaillement après natation ,une ration combinant glucose (60g.h) + fructose (30g.h) » quelle peut-être la représentation en terme de produit énergétique (pour un individu de 75kg) ? d autre part quel est votre point de vue sur la Maltodextrine lors d un effort de 10h-15h ?
merçi pour votre réponse