Les années passent et il est toujours là. Dans ce qu’il qualifie lui-même « d’ère comète », où certains coureurs/traileurs explosent aussi rapidement qu’ils disparaissent, Thomas Lorblanchet fait figure d’athlète qui dure. « C’est vrai que parmi ceux qui étaient avec moi au début, il n’y en a plus beaucoup aujourd’hui », sourit-il. A 33 ans, il est un des mieux placés pour parler de l’évolution du trail. Depuis ses premiers pas dans la discipline en 2001, il a vu le marketing s’installer, des dizaines de courses fleurir chaque week-end et les « teams » se multiplier. « Depuis 2008/2009, les choses ont vraiment changé. Il y a de plus en plus de teams, mais il ne faut pas se leurrer, les sommes en jeu n’ont absolument rien de comparable avec d’autres sports, ne serait ce que le cyclisme ».
Son changement d’équipementier l’an dernier est étroitement lié aux évolutions du milieu. Alors que Salomon joue de plus en plus la carte de l’international – avec de nombreux déplacements à la clé – le Clermontois a choisi de rejoindre le Team Asics. Question d’équilibre personnel dans une discipline qui n’en était qu’à ses balbutiements il y a dix ans. « Ce que j’ai choisi à l’époque, c’est de courir en nature. Le reste s’est fait naturellement ». Manière de préciser qu’il n’avait pas « forcément la volonté d’aller vers le haut niveau ». Ou plutôt, le « quasi haut niveau », comme il le lâche au détour de la conversation. « Oui, parce que je sais ce qu’est vraiment le haut niveau. Il y a beaucoup d’effervescence autour du trail actuellement, mais il faut redescendre sur terre. Une vraie vie de sportif de haut niveau, qui prépare les Jeux Olympiques par exemple, est difficilement compatible avec une vie de famille, un vrai boulot… ».
Or s’il s’entraîne tous les jours et explique avoir les exigences d’un athlète de haut niveau, Thomas Lorblanchet n’en reste pas moins un mari et papa de deux filles (de quatre et six ans), par ailleurs kinésithérapeute ostéopathe, qui n’entend pas sacrifier cette vie personnelle essentielle à son épanouissement. Et donc à sa réussite.
Dans son cabinet, celui qui est devenu en 2009 le premier champion du monde de trail, traite des sportifs, mais pas que. « Parce que le sportif est particulièrement chiant », lance-t-il en connaisseur. « Je suis bien placé pour comprendre. En revanche, j’ai de plus en plus de mal à accepter les personnes qui mettent en péril leur famille pour des choses qui n’en valent pas forcément la peine. Quand on est blessé, on comprend les choses qui comptent vraiment. J’ai l’impression que les gens vivent beaucoup à travers le regard des autres. Mais pas forcément celui des personnes qui sont les plus proches d’eux. Pourtant, c’est peut-être ce regard-là qui est le plus important… »
Pour autant, « Tom Tom » se défend de « donner des conseils de vie » à ses patients, tout comme il ne tient pas à passer pour le « donneur de leçons » auprès des jeunes traileurs. « Bien sûr, si on me demande de faire partager mon expérience, il n’y a pas de problème. Mais chaque expérience est différente ».
A propos d’expérience, il en est une qui l’a profondément marqué : le Leadville Trail 100 Run, en juillet 2012. Outre sa victoire (voir plus d’informations), ce qu’il retient, c’est le mois passé autour de « cette ville minière au fin fond des Etats-Unis », en famille, à découvrir « l’US spirit ». « Cette expérience m’a permis de relativiser énormément. Les approches européennes et américaines sont très différentes. Aux Etats-Unis, on est pas là pour taper sur le voisin ».
A l’image de Leadville, Thomas Lorblanchet est le genre de traileur qui vibre pour les épreuves « mythiques ». « Qui ont une histoire. Ou qui se déroulent sur un terrain qui a une histoire. Je pense à la Western States. Ou à l’UltraVasan (nouvelle épreuve en 2014, ndlr) sur le parcours de la Vasalopett. Ca, ça me parle. Le problème de certaines courses aujourd’hui en Europe, c’est qu’elles ont tendance à vouloir devenir un mythe avant d’exister ».
S’il prenait en compte uniquement ses qualités athlétiques, le Clermontois qui s’entraîne sur les sentiers du Puy de Dôme et du Sancy, se verrait bien réussir sur 100 kilomètres. « Mais je ne m’imagine pas du tout sur ce type de format. En revanche, je suis actuellement loin d’avoir le niveau d’un Xavier Thévenard sur l’UTMB (voir les résultats et la vidéo de l’édition 2013), mais je préfère me dire que je vais travailler pour ce genre de choses ».
Après un premier semestre 2013 terni par des blessures (fracture de fatigue puis entorse qui l’ont notamment empêché de s’aligner sur la CCC), Thomas Lorblanchet évite de se projeter plus de « deux mois en avant ». Dans l’immédiat, il sera à Gap pour les premiers Championnats de France de trail. Trois semaines plus tard, il retournera à Millau. Au programme : les Templiers, où s’il s’est imposé quatre fois (2007, 2008, 2010 et 2011). Quant à son nombre de participations, comme une énième illustration de sa longévité, il doit s’y reprendre à deux fois pour les compter. « Ce sera ma onzième ».
Palmarès principal
2013
Vainqueur du Trail des Cabornis
2012
Vainqueur de la Verticausse
Vainqueur du Leadville Trail 100 Run
2011
2ème des Templiers
2ème au Trail du Ventoux
2010
1er du Trail des Templiers
1er du Trail des Citadelles
1er du Trans Aubrac
1er de l’Oxygène Challenge
1er sur l’Aravis Trail
1er de l’Ultra Trail Sancy
2009
Champion du monde de trail
2e du Swiss Alpine Marathon
1er de L’Ardéchois