119 km avec 7 300 m de dénivelé, tel était le programme de l’édition 2013 de la Transgrancanaria. Vainqueur l’an passé en 12h54mn18s (123 km et 11 000 m de dénivelé), Sébastien Chaigneau, avec son dossard N°1, a une nouvelle fois fait sensation. Retour sur sa course.
Lepape-info : Vous terminez avec 25 mn d’avance sur votre poursuivant Oier Ibarbia et presque une heure sur son compatriote Yeray Durán, une victoire somme toute tranquille malgré le plateau de départ ?
Sébastien Chaigneau : C’est vrai sur le papier, quand on regarde les résultats et les chronos. Mais ce ne fut pas si simple et je dois avouer que sur les derniers kilomètres, j’avais hâte d’en terminer. Les conditions ont été difficiles cette année avec un épais brouillard et de fortes pluies pendant les trois quarts de la course puis sur les 20-25 derniers kilomètres, le soleil et un fort taux d’humidité. Le corps a eu beaucoup de mal, limite coup de chaud et j’avoue que la fin de course a été un peu pénible. Heureusement, le fait de doubler les concurrents du 24 km partis quelques heures plus tôt a été d’un grand réconfort. Certains ont couru un peu avec moi, avec de belles rencontres riches en émotions.
Lepape-info : Quelle a été votre tactique de course ?
Sébastien Chaigneau : Je n’avais pas de tactique au sens compétition du terme. Je ne pars jamais sur une course en me positionnant de la sorte. Sur ce genre d’ultra, il faut avant tout gérer les éléments et ses propres sensations. En résumé ne se préoccuper que de soi. Je suis donc resté dans un premier temps en sixième ou septième position car je trouvais que compte tenu du parcours, ils étaient partis trop vite. Ce fut d’ailleurs le cas puisque je les ai repris et que certains se sont rapatriés sur le 83 km en cours de course. Je savais aussi qu’il y avait aussi du beau monde avec Cyril Cointre (8e en 15h41mn06s, NDLR), Christophe Le Saux (il a passé la ligne en 9ème position ex aequo avec Samuel Nef mais est classé 16e en 16h47mn04s après avoir écopé d’une heure de pénalité pour avoir perdu sa lampe arrière, NDLR) ou encore Marco Olmo (qui termine 11e du 83 km en 9h52mn05s, NDLR), je devais donc être prudent. De fait, je suis resté à l’abri durant 20 km (on avait déjà pris cher en dénivelé puisque sur les 10 premiers km il y avait 1000 m de D+) et au 24e, je me suis retrouvé en tête sans avoir forcément changé d’allure. J’ai ensuite géré ma course en prenant toujours soin de bien me ravitailler et de me retaper. Il faut quand même savoir que l’on pouvait essorer notre tenue à chaque stop tellement il pleuvait.
Lepape-info : Le fait d’avoir reconnu le parcours a donc été votre atout ?
Sébastien Chaigneau :Indiscutablement. Il y a un mois j’étais venu trois jours afin de faire le nouveau parcours dans son intégralité. Je savais donc ce qui nous attendait et je connaissais aussi les conditions météorologiques prévues, j’en ai tenu compte tout au long de la course afin de bien gérer mon effort. J’avais bien évidemment des informations sur mes poursuivants et je savais que je disposais d’une certaine marge. Mais si on ne fait pas attention à soi et à ses sensations, cette avance peut être annihilée très vite. Honnêtement, je ne pensais pas avoir à gérer la course comme cela.
Lepape-info : Comment vous êtes-vous préparé ?
Sébastien Chaigneau : J’ai fait une grosse préparation cet hiver, car j’ai un programme costaud cette année. Je me suis entraîné énormément dans la neige par des températures de -25°. Les trois quart de mes entraînements ont été faits dans des conditions très difficiles. J’ai fait et je fais encore des journées à trois entraînements par jour avec de la préparation physique (musculation, PPG), de la course mais aussi du ski de fond ou de la raquette ou du ski d’alpinisme. Mais j’intègre aussi les périodes de récupération, car comme je le dis souvent la récup fait partie de l’entraînement. D’ailleurs durant les dix prochains jours en dehors de quelques marches en famille, je ne vais rien faire.
Lepape-info : Quels sont vos prochains rendez-vous ?
Sébastien Chaigneau : Tout d’abord le Japon du 26 au 28 avril avec l’Ultra Trail du Mont Fuji (l’UTMJ, soit 161 km pour 9 000 m de dénivelé +, NDLR, voir la fiche de l’UTMJ). Je pars début avril afin de m’acclimater et reconnaître le parcours. Ensuite j’espère être au départ de la HardRock , le 12 juillet (soit 100 miles – 160.9 km- avec 10 360 m de dénivelé +, voir la fiche de la Hardrock 100 endurance Run, course remportée l’an passé par l’Américain Hal Koerne en 24h50). Pour l’instant, je suis sur liste d’attente mais en 4e position je devrais donc pouvoir rentrer sur la liste principale. Il faut savoir qu’il y a 400 dossards et que nous sommes 950 postulants ! Tout le monde est à la même enseigne, les dossards sont attribués par tirage au sort et ce même si l’année d’avant vous avez remporté la course. Aucun passe droit, qui que vous soyez. Je saurai normalement en avril, si j’ai un dossard ou pas. Si j’en suis, je partirai deux à trois semaines avant afin de m’acclimater car la course se déroule à une altitude moyenne de 3 350 m avec un point culminant à 4 281 m. Ca ne s’improvise pas.
Lepape-info : Avec un tel programme envisagez-vous d’être au départ de l’UTMB (dont il a terminé 3e en 2011 et 2e en 2009) ?
Sébastien Chaigneau : Tout dépendra de plusieurs facteurs. Le premier, c’est la HardRock : est-ce que je serai au départ d’une part, et d’autre part, si je cours, est-ce que j’aurai récupéré ? Ensuite tout dépendra de la course proposée à Chamonix. Cela fait quand même trois ans que ce n’est pas le vrai UTMB, donc si c’est un parcours de repli, je ne prendrai pas le départ même si je suis apte à courir. Je ne sacrifierai pas une préparation pour un UTMB qui n’en est pas un. Je pense aussi à tous les coureurs qui consacrent une année voire plus à leur préparation et qui se retrouvent sur une épreuve qui n’est pas celle prévue. On imagine leur frustration. Il faut que l’organisation prenne en compte cette donnée et envisage de changer de date car cela ne peut plus durer. Mais il n’y a pas que l’UTMB, je pense aussi à la Diagonale des Fous qui accepte d’avoir plus de 50% d’abandons sous prétexte de faire une course de plus en plus dure. C’est un manque de considération pour le peloton. Je réfléchis donc à ma participation à la Réunion si, par exemple, je ne fais pas l’UTMB. Tout se décidera dans les deux dernières semaines d’août en ce qui me concerne.
Lepape-info : Vous n’envisagez pas de participer aux championnats de France de trail lors de la Gap’en Cimes (voir la fiche de la Gap’en Cimes) ?
Sébastien Chaigneau : Non car c’est le même jour que ma course, le trail des Glières (voir la fiche du trail des Glières), où nous proposons un 50 et un 20 km avec 800 inscrits. Je ne peux être aux deux endroits. Et puis mon programme cette année est assez chargé comme cela car en dehors des gros évènements que j’ai cités, j’envisage d’autres courses un peu moins connues mais tout aussi belles. Ce sera à l’étranger surement mais il y aura aussi quelques rendez-vous en France...