Marseille – Cassis 2012 : quand les pompiers de Paris viennent travailler leur cohésion

Ils ont préparé leur course dans les meilleures conditions. Du moins, dans les conditions qui leur correspondent, tant en termes de personnalités, que d’ambitions. Ce groupe de pompiers de Paris ne se prend pas au sérieux, aime la course à pied, et tout ce qui l’entoure. Peut-être même surtout ce qui l’entoure. « Finalement, sur le week-end, le moment le plus long, ce sont les 1h30 ou 2 heures de course », plaisante Benoît. « Pourquoi est-ce qu’on aime courir ? Pour tous les moments que l’on vit en dehors de l’épreuve », embraye Thierry. Le décor est planté.

Il n’est pas encore 10 heures, ce samedi 27 octobre, quand les cinq acolytes se retrouvent Gare du Lyon, à bord du TGV qui les emmène pour un premier arrêt à Avignon, avant de monter à bord d’un deuxième train direction Marseille. C’est le chef de la brigade, Christophe, qui a embarqué la joyeuse troupe dans l’aventure… Et dégoté le logement dans un centre de loisirs de Cassis, grâce à son oncle qui travaille tout près. Christophe connaît bien l’épreuve, pour l’avoir déjà courue cinq fois. Alors il rigole doucement quand son homonyme qualifie la Gineste de « petit côte ». « Ca s’appelle un Col, tu vas vite comprendre, ça monte pendant presque 10 kilomètres ».

Viennent les premiers paris. De Christophe (pas le chef, l’autre), ou Thierry, qui arrivera le premier ? Pour la dernière place, tout le monde est d’accord… Ce sera celle du chef. Qui assume… et exagère : « Je trottine ! Mais je suis surtout content de me dire « je l’ai fait », comme c’était le cas sur le Médoc et comme ce le sera, j’espère, sur le 50 km de l’Eco-Trail de Paris (en mars 2013) ».

La course aux épingles à nourrice

Après déjeuner, les pompiers récupèrent leur dossard et se retrouvent dans le hall de la Gare Saint-Charles pour potasser le plan du parcours. Benoît déchante un peu. « On gagne 63 mètres de dénivelé entre le 7^ème et le 8^ème kilomètre ? Mais pourquoi je fais ça ? » Peu importe, les sourires sont là, la bonne humeur aussi. Et le trajet en TER jusqu’à Cassis est animé, sur fond de chansons (un peu) paillardes et de décapsulage de cannettes de bière. Leur façon à eux de respecter les consignes d’hydratation pré compétition. « C’est vrai que niveau diététique, on ne fait pas attention », souligne le chef Christophe. Le repas du midi (viande rouge, sauce et frites, le tout arrosé d’un breuvage pas vraiment réputé pour ses vertus sportives), avait donné les premiers indices. Celui du soir va définitivement le confirmer…

Les éclats de rire sont francs, simples, et bon esprit. L’équipe est soudée et ça se voit. Les pompiers vont même jusqu’à faire des comptes d’apothicaire pour partager les quelques épingles à nourrice dont ils disposent. Parce que le chef est le seul à y avoir pensé, que Thierry a bien acheté une boite à couture dans le centre de Cassis, mais rien à faire… toutes réunies, il n’y en a que neuf… pour cinq coureurs !

Des potins de caserne aux souvenirs du marathon du Médoc (couru par quatre d’entre eux), le repas passe vite. Et avant de succomber à l’appel du digestif qui aurait peut-être été de trop,  le groupe décide de rentrer, poussé par les rafales du Mistral qui laisse penser que la course du lendemain sera rude.

Ce sont d’ailleurs les bourrasques qui ont déclenché l’alarme du centre de loisirs et réveillé tout le monde à 3 heures du matin. « Heureusement que l’on a changé d’heure, et que l’on avait une heure de plus pour dormir », souligne Thierry au petit matin. Après un réveil à 6 heures, chacun prépare ses affaires dans le noir… coupure d’électricité oblige. L’un des deux Benoît quémande des épingles à nourrice à droite à gauche. Sa persévérance paie : son dossard sera donc tenu par deux épingles. Plutôt une bonne nouvelle, vu que le Mistral ne semble pas décidé à baisser la garde.

Dans la navette qui les conduit au point de départ à Marseille, Thierry propose : « Et si on faisait plutôt Marseille-Cassis en bus ? » Derrière la plaisanterie, on sent bien que la météo a quelque peu refroidi les ardeurs des athlètes. Sans leur faire oublier l’essentiel : « Vivement l’apéro ! » Pour l’heure, ce sera un petit chocolat chaud dans un bar pour se tenir à l’abri du vent… avant de se fondre au cœur de la masse qui va bientôt débouler sur le boulevard Michelet.

L’heure des bilans

Lorsqu’on retrouve les pompiers, près de 3 heures plus tard, ils sont près à filer sous la douche… et arborent toujours le même sourire. Celui d’une bande venue « avant tout pour passer un bon moment, ensemble, et se faire plaisir », et qui semble avoir réussi son coup. D’ailleurs, les performances ne sont pas ridicules, loin de là. « J’ai mis trois minutes de moins que l’an dernier, et trois minutes de moins que sur le semi-marathon de Paris », sourit le chef Christophe, qui a passé la ligne en 2h05 environ. Et finalement, il a couru avec Thierry. « Je me suis dit qu’il courait tout le temps tout seul et que cette fois, j’allais l’accompagner. Franchement, j’aime beaucoup l’ambiance de deuxième partie de peloton. C’est très amical, bien plus que quand on vise 1h30… A vingt minutes près, ça change beaucoup de choses ». « C’est vrai, moi j’ai ressenti un peu plus de tension », constate Christophe qui a, lui, bouclé le parcours en 1h39. Quant aux deux Benoît, ils ont fait la course ensemble, n’avaient pas de chrono, mais pensent avoir terminé en un peu moins de deux heures. « J’ai failli me prendre les pieds dans les sacs en plastique qui volaient au départ », note l’un. « J’ai beaucoup plus subi qu’au marathon du Médoc », constate l’autre. Tous vantent les mérites du cadre. « Magnifique », « des vues paradisiaques », et « qui motivent dans la montée ». « Et finalement, le vent était fort, mais on n’a pas eu si froid, lance Thierry. On a même eu des rayons de soleil sur le plateau, on était super bien ».

A ce moment là, ils ne savaient pas encore que leurs efforts du jour seraient récompensés par une douche… froide ! Tant pis, le repas d’après-course devrait gommer ce désagrément… Histoire de respecter au mieux leur maxime : « Allier plaisir et compétition ».