Dire qu’il n’a pas changé serait mentir. Il a laissé tomber le blond platine, n’est plus athlète de haut niveau, a quitté l’INSEP et le Bois de Vincennes pour Monaco et la mer Méditerranée et est devenu papa. On change forcément, en dix ans. Mais du haut de son mètre 92, Marc Raquil ne passe toujours pas inaperçu. Continue de baigner dans le milieu de l’athlétisme. De travailler aux côtés de son fidèle sponsor, Asics. Et surtout, il balade son sourire avec autant d’aisance qu’il avalait les tours de piste à sa grande époque. En 2013, l’ancien spécialiste du 400 mètres jouit encore d’une belle côte de popularité. « Sûrement parce que je suis plutôt drôle et abordable ».
Marc Raquil ne vit pas dans le passé. Mais quand on lui demande d’ouvrir la boîte à souvenirs, il évoque notamment la Coupe d’Europe à Brême, en 2001, où il est devenu le premier Français à passer sous les 45 secondes (44s95). Et puis, bien sûr, il y a le « moment d’apothéose ». Ces 44 précieuses secondes qui l’ont fait entrer dans l’histoire de son sport, il y a presque dix ans.
26 août 2003, Saint Denis, Stade de France, championnats du monde d’athlétisme, finale du 400 mètres. Le grand Marc, en dernière position à la sortie de l’ultime virage, remonte comme une fusée, termine en 44s79 (nouveau record de France), et décroche la médaille de bronze (il a depuis récupéré la médaille d’argent suite au déclassement pour dopage du vainqueur Jerome Young). « Je suis encore aujourd’hui le seul Français médaillé sur 400 mètres aux championnats de monde ». Il garde aussi un souvenir ému de son podium avec ses compères (Stéphane Diagana, Leslie Djhone et Naman Keita) du relais 4X400 mètres. Médaille d’argent sur le moment… transformée en or un peu plus tard suite à la disqualification de l’équipe américaine pour dopage.
Les années suivantes, les blessures ont empêché Marc Raquil de s’exprimer pleinement et, peut-être, de vivre d’autres moments aussi intenses. Il y a cinq ans, son déménagement dans le Sud de la France lui a fait prendre un virage. Plus envie de s’inscrire dans un club. Le début d’une nouvelle vie.
Titulaire notamment d’un diplôme d’Etat d’entraîneur 2ème degré, le champion dispense aujourd’hui des séances de coaching individuelles. Ses clients ? « Un public d’hommes d’affaires, des personnes qui voyagent beaucoup ». Pour la marque Asics dont il est toujours l’ambassadeur, il encadre également une équipe de journalistes et les prépare pour une course (marathon de Paris ou 6000D à La Plagne notamment cette année). « J’ai toujours aimé ça. Avant, le coach me laissait parfois la responsabilité d’encadrer le groupe d’entraînement ». Sauf que cette fois, en face de lui, ce ne sont pas des athlètes de haut niveau. « Ce sont parfois des personnes qui découvrent la course à pied. Je les vois progresser, ça me fait vraiment plaisir ». Marc Raquil anime également des séminaires en entreprise. La gestion du stress, de l’adversité, de la concurrence, la planification des objectifs. Des thèmes qu’il a appris à gérer au fil de sa carrière. « En meeting, j’étais plus relâché qu’en compétition. J’avais moins la crainte de mal faire. Le fait de porter le maillot bleu/blanc/rouge impliquait une pression et une adversité plus élevées. Je n’ai jamais perdu une course à cause de la pression. La pression, j’ai toujours aimé ça. Les jambes qui flageolent, le cœur qui bat : ça m’effrayait, mais ça m’excitait aussi ».
Des sensations qu’il avoue avoir du mal à retrouver aujourd’hui. Ce qui ne l’empêche pas de s’ouvrir à de nouveaux horizons, en goûtant à plusieurs reprises à l’ambiance du peloton sur des 10 km ou en lorgnant sur le trail (il prépare le 22 km de la 6 000 D en juillet, voir la fiche de l’événement). « J’aime ce côté nature, baroudeur, moins linéaire. Le fait de pouvoir rencontrer des obstacles différents, que tout ne soit pas attendu, que l’on soit parfois obligé de sauter, de marcher. Le kiff absolu, ce serait la Diagonale des Fous à la Réunion, à la frontale » !
Et quid de prendre, un jour, le départ d’un marathon ? « Promis, jamais ! », soutient-il d’abord dans un large sourire. « Je connais les sacrifices que cela impose. Une perte de poids drastique, un entraînement hyper régulier ». Pourtant, la conversation continue et le non catégorique lâché quelques minutes plus tôt semble avoir du plomb dans l’aile. On ose lui rappeler qu’avant lui, d’autres athlètes avaient juré de ne pas devenir marathonien et ont finalement changé d’avis… « J’aime les défis, donc pourquoi pas ! Mais ce qui est sûr, c’est que si je le fais un jour, ce sera pour le faire bien. Pour tenter 3h30… Et idéalement un petit 3 heures… » On ne se refait pas…