L’an passé à Berlin, le champion olympique 2016 du marathon Eliud Kipchoge avait crée la sensation en pulvérisant le record du monde de la discipline en 2h01’39. Absent cette année car en pleine préparation pour tenter de passer sous les 2 heures à Vienne (Autriche) le 12 octobre prochain dans des conditions spécifiques, Kipchoge avait laissé ce dimanche le champ libre à la concurrence.
Une concurrence affûtée et expérimentée emmenée par Kenenisa Bekele qui à 37 ans avait l’intention de montrer qu’il était loin d’avoir dit son dernier mot. 14 degrés, 75% d’humidité et peu de vent les conditions météo sont propices à un nouveau chrono exceptionnel mais avant le départ ils sont peu à imaginer que le record du monde de Kipchoge puisse être en grand danger.
A 9h15 précises, les élites messieurs et dames s’élancent ensemble avec l’objectif d’affoler le chrono comme chaque année à Berlin. Dès le 1er kilomètre, un groupe de 9 dont 3 meneurs d’allure imprime le tempo. Kenenisa Bekele bien évidemment présent est accompagné par ses compatriotes Leul Gebrselassie, Sisay Lemma, Birhanu Legese (tous avec des records personnels en moins de 2h04’30), le Kenyann Jonathan Korir est également de la partie.
Au passage au 5ème kilomètre en 14’25, le ton est donné, le groupe de tête réduit à 8 (dont 3 meneurs d’allure) est sur les bases du record du monde. Tendance confirmée au 10ème kilomètre en 28’52. Le groupe de tête ralentit légèrement l’allure pour atteindre le 15ème kilomètre en 43’29 sur un tempo néanmoins affolant de 2h02’19 à l’arrivée, sur les bases de la meilleure performance mondiale de l’année.
Au semi-marathon en 1h01’05, le groupe de 5 inchangé (Bekele, Gebrselassie, Lemma, Legese, Korir) avec encore un meneur d’allure reste sur les bases du record du monde puisque l’an passé Kipchoge avait couru plus vite la seconde moitié du tracé Berlinois. Bekele décide de durcir l’allure, Leul Gebrselassie est le premier a en faire les frais et lâche prise. Au passage au 25ème kilomètre en 1h12’30 ils ne sont plus que 4 aux commandes. Korir finit par céder à son tour à l’approche du 27ème kilomètre.
Au 30ème kilomètre passé en 1h26’53, Legese et Lemma assurent le rythme, Bekele semble moins à l’aise légèrement ralenti par une douleur. Legese en profite pour se montrer plus incisif et distancer Lemma. Bekele suit à quelques dizaines de mètres mais maintient un écart stable. Rien ne semble définitif. Bekele réagit, revient sur Lemma et le laisse sur place juste avant le 35ème kilomètre. Bekele relancé comme jamais refait progressivement son retard sur Legese qui pensait sans doute avoir course gagnée. La jonction se fait au 37ème kilomètre, Bekele dépose littéralement Legese.
Bekele à pleine vitesse a fait une véritable démonstration en avalant les 10km entre le 30ème et le 40ème kilomètre en 28’35 ! Phénoménal, Bekele à deux kilomètres de l’arrivée seul en tête est en mesure de s’offrir le record du monde du marathon lui qui détient toujours ceux du 5.000 m et 10.000 m. Il ne lui manque que quelques secondes. Suspens insoutenable jusqu’à l’arrivée sur la dernière ligne droite après le passage sous la porte de Brandebourg, on croit à l’exploit de Kenenisa Bekele qui termine finalement en 2h01’41 et frôle le record du monde de seulement deux secondes. Incroyable dénouement qui voit Birhanu Legese prendre la 2ème place en 2h02’48 (4ème meilleure performance mondiale de tous les temps). Sisay Lemma complète le podium en 2h03’36.
A 37 ans, Bekele immense champion que l’on pouvait penser sur le déclin pas toujours à son aise sur le marathon qu’il a découvert en 2014 a démontré qu’il fallait encore compter sur lui. On se prend à rêver d’une explication au sommet avec Kipchoge lors des Jeux Olympiques de Tokyo l’an prochain.
Venu à Berlin avec l’objectif de réaliser les minima pour les Jeux de Tokyo (2h11’30), le premier Français Emmanuel Roudolff-Levisse était dans l’allure pendant plus de 30 km. Le champion de France de cross, qui disputait son premier marathon, a bouclé la course en 2h14’32, à plus de trois minutes du temps requis.