Samedi 1er novembre 2014. 9 heures du matin. A quelques blocks de Central Park, la 6ème Avenue, devient multicolore. Des milliers de runners arborent fièrement leurs couleurs et drapeaux. « Good job guys ! » (beau boulot), hurle une passante sous un abribus. Au même endroit, un homme s’interroge avec le sourire. « Le marathon, c’est bien demain ? ». Il vient de Suède pour boucler les 42,195 kilomètres les plus courus au monde, et ce long cortège qui remplit la chaussée à perte de vue lui a fait craindre d’avoir manqué le départ.
Non, ce n’est que le « Dash to the Finish Line ». Cinq kilomètres qui permettent aux moins endurants de se laisser contaminer par la fièvre du running qui transpire depuis plusieurs jours dans les rues de Manhattan.
New York est passée à l’heure d’hiver dans la dernière nuit avant l’épreuve reine, offrant ainsi une heure de sommeil supplémentaire aux plus de 50 000 coureurs inscrits. Dès 4h30, dans un petit restaurant italien de la 8ème Avenue, assiettes de pâtes, bananes, toasts et cafés sont servis à la chaîne. 326 petits déjeuners engloutis par des coureurs qui ont une principale préoccupation : le vent glacial qui souffle sur la Grosse Pomme. Christophe, triathlète venu de la région toulousaine, a d’ailleurs choisi de rester un peu au chaud avant de rejoindre Staten Island. « J’espérais un chrono autour de 3h40, mais dans ces conditions, si je fais 3h50, ce sera bien ».
Les participants ont été invités à multiplier les couches de vêtements pour affronter les longues heures d’attente avant de pouvoir s’élancer sur le pont Verrazzano. Les policiers new yorkais du secteur de Bay Ridge, à la pointe Sud de Brooklyn, ont sorti les cagoules. Et les habitants se réchauffent au rythme des sonos et autres groupes de musique installés au fil du parcours. Le passage des élites femmes, parties avant le gros de la troupe, permet à tous de se chauffer les cordes vocales. Avant un flux ininterrompu de coureurs dont les visages ne laissent que peu de doute sur leur état d’excitation.
Aux alentours du 8ème mile (13ème km), les abords du Barclays Center sont noirs de monde et ont des allures de discothèque à ciel ouvert. Certains se laissent aller à des photos pour immortaliser ce moment. D’autres lèvent les pouces en l’air. Les sourires sont encore bien francs.
Arrivés dans Manhattan, en passant sous le Pont de Queensboro qu’ils viennent de traverser, les visages se font plus crispés et les foulées moins aériennes. 16ème mile (26ème km). Le vent souffle fort dans la très longue 1ère Avenue. Les proches massés le long de la chaussée savent que leur soutien est déterminant. « Ha, voilà un meneur d’allure en 4 heures, on se concentre », lance une Française à la recherche de son protégé au tee shirt bleu. Oliver, un autre tricolore bien reconnaissable à son haut bleu blanc rouge, prend la pause auprès de son fan club, et repart sous les encouragements de toute une partie du public. « Bonne chance », articule gentiment une Américaine.
Partout, on scande des prénoms, on garde l’appareil photo à portée de main, on applaudit. Ce marathon de New York est vanté pour son ambiance et les derniers kilomètres font honneur à sa réputation. Le long de la 59ème Rue, alors que les crampes en paralysent certains, les performances des musiciens installés le long de Central Park en électrisent d’autres. « L’ambiance est monstrueuse », résume Oriane qui, quatre mois après son accouchement, a couru environ la moitié de l’épreuve. « Il faut le faire une fois, confirme Matthieu. C’est un peu le marathon Walt Disney, avec un volontaire tous les trois mètres qui vous encourage. L’organisation est irréprochable, mais c’est très sécurisé et je suis un peu déçu par l’arrivée qui nous impose de beaucoup marcher pour sortir de la zone coureurs ». Dans le hall de son hôtel idéalement situé près de Times Square, ce Français installé à Genève a retrouvé ses proches. « On ne l’a pas vu dans les derniers kilomètres, il avait enlevé une veste qu’il était censé avoir », regrette sa compagne. La famille s’apprête à rejoindre l’aéroport. « On ne pouvait pas faire manquer plus d’un jour d’école aux enfants ». Retour à la réalité. Mais les Américains ont l’art de prolonger le plaisir. Poncho, médaille : afficher au moins un indice qui prouve que l’on est finisher du TCS New York City Marathon, c’est s’assurer d’entendre des « Congratulations » (félicitations) à tout-va de la part de passants admiratifs.
Quelques photos