« Il faut du temps pour comprendre cette ville et les gens qui habitent ici ». Originaire de Tahiti, Liliane vit aujourd’hui à Jérusalem, après avoir vécu aux Etats-Unis. « Avec mon mari, nous sommes au départ venus pour épauler ma belle mère qui était malade. On devait rester un an… ça fait quinze ans qu’on est là. La vie n’est pas toujours facile, comme partout, mais on s’y sent bien. Et en sécurité, contrairement à ce que toute ma famille pensait quand je me suis installée ».
Postée à un virage de la rue Yafo, une des grandes artères empruntée notamment par le tramway, cette photographe attend le passage des marathoniens. Ils sont environ 1 400 à avoir pris le départ de l’épreuve, dès 7 heures, sous un ciel lumineux. Au total, les organisateurs de ce troisième marathon international de Jérusalem ont distribué environ 20 000 dossards, toutes épreuves confondues, dont 1 700 à des étrangers. Peu d’entre eux se contentent de chausser leurs runnings et de rentrer chez eux, la plupart prolongent leur séjour afin de découvrir la Ville Sainte, à défaut de percer tous ses mystères.
« C’est un peu un pèlerinage », confirme Michel. A quelques dizaines de minutes du départ, ce Rennais attend le coup de starter aux côtés de Nathalie, venue elle de Haute-Savoie. « Je me suis décidée sur un coup de tête, il y a quinze jours. Avec Michel, on ne se connaissait pas avant, mais on est un groupe de Français venus par l’intermédiaire d’un tour operator. On va ensuite visiter une partie d’Israël, jusqu’au Lac de Tibériade. On est arrivés il y a deux jours. Le côté sécuritaire est surprenant, mais la population est chaleureuse ».
Comme la plupart des participants, les deux Français s’attendant à souffrir pendant leur marathon. « Je prévois 20 minutes de plus que mon temps habituel, souffle Michel habitué des chronos en 3h30. Jérusalem se mérite ! » « C’est un gros challenge », renchérit Charles quelques mètres plus loin. Ce Britannique qui vit à Jérusalem sait de quoi il parle : il a couru les deux précédentes éditions et lui prévoit même une demi-heure de plus par rapport à son temps référence. En clair : mieux vaut savourer les rares moments de plat, la majorité du tracé n’étant faite que de montées, descentes, et autres virages.
« Ce n’est clairement pas une épreuve pour venir battre son record, mais c’est l’endroit idéal pour s’entraîner » : le maire de Jérusalem lui-même –par ailleurs marathonien et qui a participé au semi cette année – ne cache pas que ce n’est pas ici que l’on verra un jour le record du monde de la spécialité tomber.
Un nouveau record a pourtant été établi, ce vendredi 1er mars 2013 : celui de l’épreuve, par l’Ethiopien Abrham Kabeto Ketla : 2h16mn30s. Mais plus que ce chrono, ce sont les écarts qui en disent long sur les efforts que demandent ce tracé : la première féminine, l’Ethiopienne Mihiret Anamo Anotonios est sixième au scratch( !) en… 2h47, et seulement dix coureurs terminent en moins de 3 heures.
Mais l’essentiel n’est pas là. Il est plutôt dans le plaisir de courir « dans une ville dont l’histoire s’écrit depuis des millénaires », comme le raconte Thierry, venu du Havre. « Je pense qu’il faut varier les plaisirs en courant. On est dans un lieu où se retrouvent toutes les religions. On n’a pas la même ferveur populaire qu’à Londres par exemple, mais on est tout de même encouragés. On capte des petits sourires ici ou là… »
Quelques points d’animations avaient été répartis sur le tracé. Comme à la porte de Jaffa où le DJ s’en donnait à cœur à joie, et des équilibristes s’amusaient sur les remparts. De là, les coureurs rentraient dans la vieille ville, foulaient ses pavés… pour en ressortir quelques centaines de mètres plus loin. Une courte incursion dans ce secteur hautement symbolique de Jérusalem. Le même où se pressent des millions de touristes… et où retourneront, certainement, les coureurs dans les prochains jours. Pour passer du quartier juif au quartier musulman, chrétien ou arménien en quelques rues. Parce que c’est aussi ça, Jérusalem…
Les résultats
Hommes
1. Abrham Kabeto Ketla (Eth), vainqueur en 2h16mn29s, nouveau record de l’épreuve
2. Luka Kipkemoi Chelimo (Kén), 2h19mn01s
3. Vincent Kiplagat Kiptoo (Kén), 2h20mn12s
4. Samson Kiptoo Bungei (Kén), 2h21mn31s
5. Amos Tirop Matui (Kén), 2h24mn04s
Femmes
1. Mihiret Anamo Anotonios (Eth), vainqueur en 2h47mn26s
2. Radiya Mohammed Roba (Eth), 3h05mn59s
3. Elissa Ballas (USA), 3h11mn38s
4. Frida Sodermark (Suè), 3h11mn38s
5. Claudia Cruchaudet (Fra), 3h28mn55s
Quelques photos du marathon de Jérusalem 2013