Mais revenons quelques heures plus tôt à 6h du matin à Faro de Fuencaliente à la pointe sud de la Palma….Il fait encore nuit lorsque plus de 1 500 coureurs accoutrés des tenues techniques et multicolores propres au trail s’avancent derrière la ligne d’arrivée. Leurs frontales scintillantes sont bien décidées à percer la pénombre menant à Los Canarios, petit village offrant le premier ravitaillement à 716m d’altitude. Sous les encouragements et autres joutes verbales endiablées du speaker vedette de l’organisation, sous la musique entraînante de Eyes of the Tiger du groupe Survivor, on ressent déjà la pression qui monte. L’île de La Palma, petit bijou îles Canaries au large du Maroc, va certainement vivre l’une des plus belles journées de l’année. Le départ donne la première note d’une symphonie qui sera jouée par les plus grands traileurs de la planète. Comme chaque année les meilleurs mondiaux ont répondu présents à cette première manche des Sky Runner World Series et difficile de pronostiquer le vainqueur du jour.
Pourtant, dans la montée de Las Deseadas puis la descente menant au gros ravitaillement d’El Pilar, quelques favoris se détachent du peloton. Sur cette première portion empruntant le chemin des volcans, c’est un véritable régal pour les yeux, surtout avec l’aurore qui domine l’océan Atlantique, laissant apparaître El Pico del Teide, le plus haut sommet de l’île de Tenerife au dessus d’un lit de nuage. Mais loin des clichés de carte postale, les coureurs doivent se battre avec des appuis parfois instables dans une longue ascension avec comme principal adversaire ce sable volcanique.
Pour la petite histoire, « La Palma est formée de plusieurs volcans juxtaposés qui prennent racine sur le plancher océanique à plusieurs milliers de mètres de profondeur sous le niveau de la mer. Si la caldeira de Taburiente a une structure radiale, la Cumbre Vieja a en revanche une structure axiale car il s’agit d’un ensemble de fissures volcaniques. La lave qui s’injecte dans l’encaissant sous forme de dykes a ainsi découpé verticalement la moitié méridionale de l’île » dixit Wikipédia.
Le tout offrant ainsi des paysages d’un dépaysement total, des sentiers d’une rare particularité, qui si vous ne les avez jamais parcourus restent à découvrir. Lorsque nous arrivons à El Pilar, point névralgique de la Transvulcania, c’est de nouveau une ambiance 100% hispanique qui nous envahit. Ici, la joie des supporters et la musique toujours très rock and roll redonnent du baume au cœur à ceux qui commencent à souffrir, passé les premières heures de course. A 1 500 mètres d’altitude, nichée au cœur d’une forêt luxuriante et préservée, la zone de ravitaillement est à la fois le siège d’arrivée du semi-marathon et le départ du marathon. Les deux épreuves empruntant pour la première citée le début du parcours de l’ultramarathon et pour la seconde la partie menant au point culminant de l’île, le fameux spot Roque de Los Muchachos. Les spectateurs sont nombreux et ne cessent d’acclamer les héros du jour qu’ils soient premiers ou derniers !
Devant, l’américain Sage Canaday (Hoka) a pris les commandes, suivi de l’espagnol Luis Alberto Hernando (Adidas), et surtout du français Nicolas Martin (Sigvaris/Hoka) que peu s’attendaient à voir aux avant-postes. Mais le savoyard était en forme et il le savait même si les jours précédent le départ il nous avouait « vouloir faire un top 10 », il n’osait imaginer qu’il réaliserait une si belle course. Derrière le trio de tête, la résistance s’organise avec Adam Cambell (l’ancien champion de triathlon parti très fort en début de course), l’anglais Andy Symonds ou encore Sylvain Court. Les autres frenchies sont encore dans la course et on retrouve dans le second wagon Aurélien Collet, Guillaume Beauxis, Julien Coudert puis pas très loin Sylvain Perrin, tandis que Benoit Cori est un peu plus en retrait.
Mais la route menant à La Roque De Los Muchachos est encore longue. Et pour gravir le point culminant de l’épreuve perché à 2420m d’altitude au km 51 il faut d’abord avaler Pico de la Nieve (2 038m) puis le Pico De La Cruz (2 294m). Un programme de réjouissances qui n’a pas pas réjouit tous les coureurs, notamment chez les français en lice. Dans cette partie pas simple à négocier, le haut-savoyard du team Craft Julien Coudert, après s’être fait mal à un mollet, décide de finir en roue libre. Le champion du monde en titre Sylvain Court se bloque quant à lui le dos et doit baisser sa garde, terminant pour la gloire, coûte que coûte.
La victoire se jouera certainement entre les 3 hommes de tête, à savoir Canaday, Hernando et Martin. Reste alors la longue et technique descente menant à Tazacorte, petit village de charme situé en bord de mer sur la côte sud de l’île, lieu de départ du KV disputé le jeudi soir. Là encore une ambiance de fête attend les coureurs pour ce dernier ravitaillement où les bénévoles entament des pas de danse endiablés dans l’attente des premiers concurrents. Sans surprise, Hernando passe en tête. Alors qu’on attendait Canaday en seconde position, on voit débouler Nicolas Martin, qui auteur d’une impeccable descente, a finalement repris l’américain. D’une impressionnante fraîcheur, on pense même que tout est possible puisqu’il est alors pointé à quelques minutes seulement du double vainqueur de la Transvulcania. Mais de mauvaises crampes viennent perturber la foudroyante remontée du savoyard qui ne parviendra finalement pas à reprendre l’Espagnol.
On retrouve donc Luis Alberto Hernando une nouvelle fois sacré roi de La Palma porté par son public, un public espagnol qui avait à cœur de voir son champion se voir remettre une nouvelle couronne. Un moment de gloire qu’il savoure sur la ligne d’arrivée avec son bébé de quelques semaines à peine, puis sa femme le rejoignant dans un moment de partage émouvant. Pas chauvin pour le moindre du monde, le public espagnol fait une haie d’honneur sur ce boulevard magique de Los Llanos de Aridane pour notre Nicolas Martin, 2ème à 6 minutes seulement de l’espagnol. 3ème en 7h14mn16s, Sage Canaday est forcément un peu déçu alors qu’Andy Symonds prend la 4ème place lui aussi avouant ne pas avoir eu de supers jambes. Aurélien Collet encore « dans un jour sans » sauve tout même le top 10 avec une honorable 9ème place en 7h40mn39s.
Une bonne nouvelle en cachant une autre, c’est la 2ème place d’Anne Lise Rousset qui acclamée par la foule renvoie encore une fois de fortes émotions au clan français venu en force. Si la suédoise du team Salomon Ida Nilsson était intouchable ce jour là, la française a réussi « la course de sa vie » heureuse d’avoir tenu bon de peur que ça revienne derrière. Et elle a bien fait de s’accrocher car la Tawainaise Ruth Croft, après avoir passé la journée à remonter des places termine sur ses talons en 8h33mn32s, tandis que l’américaine Alicia Shay est au pied du podium en 8h49mn46s.
Les minutes et les heures défilent. Une pluie rafraîchissante vient succéder au soleil d’abord dominant et les supporters toujours très nombreux jonchés sur la spectaculaire aire d’arrivée poursuivent leurs acclamations aux coureurs finishers. La Transvulcania est une ambiance hors norme qui si vous ne l’avez jamais vécue mérite au moins une fois dans votre vie de traileur de l’être. Alors venez-faire un détour par La Palma !
Les résultats de la Transvulcania 2016
- Hommes
- Luis Alberto HERNANDO ALZAGA (ESP), 07h04mn44s
- Nicolas MARTIN (FRA), 07h10mn40s
- Sage CANADAY (USA), 07h14mn16s
- Andy SYMONDS (GBR), 07h25mn04s
- Chris VARGO (USA), 07h26mn53s
- Stephan HUGENSCHMIDT (ALL), 07h26mn58s
- Remigio HUAMÁN QUISPE (PER), 07h35mn15s
- Zaid AIT MALEK (MAR), 07h38mn14s
- Aurélien COLLET (FRA), 07h40mn39s
- Cristofer CLEMENTE (ESP), 07h42mn44s
- Baptiste CAZAUX (FRA), 07h49mn12s
- Femmes
- Ida NILSSON (SUE), 08h14mn18s
- Anne-Lise ROUSSET, 08h31mn53s
- Ruth CROFT (TAI), 08h33mn32s
- Alicia SHAY (USA), 08h49mn46s
- Hillary ALLEN (USA), 08h54mn57s
- Gemma ARENAS (ESP), 08h58mn35s
- Anna FROST (NZ), 09h02mn20s
- Mira RAI (NEP), 09h02mn50s
- Uxue FRAILE AZPEITIA (ESP), 09h12mn59s
- Jodee ADAMS MOORE (USA), 09h24mn05s
Les résultats complets de la Transvulcania 2016