Eric Lacroix ASICS

Eric Lacroix, l’homme qui enseigne le trail

Il dit que « la course à pied a changé (sa) vie ». « Je n’étais pas un très bon élève à l’école. Et puis, au lycée, la course à pied a été un déclic. Je me suis lancé en STAPS, je suis sorti major de promo ».

Eric Lacroix court depuis 30 ans. Avec des parents militants du mouvement Spiridon, il a baigné dans l’univers du hors-stade. « En 1982, je suis parti deux mois en vacances en montagne. J’avais 17 ans. Je faisais des sorties de 3, 4 heures ». Il a pratiqué la piste, sur 3 000 m, le cross, le marathon (avec un record à 2h18 en 1996), les courses en montagne (il a été sélectionné en équipe de France entre 1991 et 95). Quand on lui parle du trail que certains préfèrent à la course sur route pour ne plus regarder le chrono, ça le « fait sourire ». « Il y a quand même un chrono, qu’on le veuille ou non, ça reste une course en ligne. On fait tous partie de la même famille. On peut très bien voir des coureurs d’ultra sur 1 500 m, ou l’inverse. Même si ce n’est pas facile ! »

La course à pied, pour lui, c’est avant tout une aventure humaine. « Des rencontres », avec des « personnes de tous les pays » dans lesquels il a été amené à se déplacer. « J’ai fait des voyages au Québec, en Nouvelle-Calédonie, avec des échanges très forts. Je me souviens aussi de Marvejols-Mende où l’on allait boire des bières entre copains. Ca permet de relativiser la performance, on n’est pas obligé d’avoir une vie de moine ».

Lui qui se définit comme « un coureur de bon niveau, mais pas de très haut niveau » se réjouit d’avoir su trouver « un équilibre entre vie familiale et professionnelle ». Eric Lacroix vit depuis huit ans à La Réunion, après avoir décidé de « changer de vie ». Il avait découvert l’île dans les années 90, invité à participer à une course. « J’ai été séduit ». Le voilà donc aujourd’hui directeur du Comité Régional du Sport Universitaire sur place. Parce qu’à La Réunion, les lycéens peuvent notamment passer une épreuve de course en montagne comptant pour le baccalauréat. « J’enseigne le trail », résume-t-il. Normal pour celui qui a toujours « voulu transmettre. Peut-être en partie parce que j’ai eu de bons profs d’EPS qui m’ont donné envie ». Peut-être aussi parce qu’il aime le contact et regrette qu’aujourd’hui, on fasse « du sport virtuellement ».  Peut-être, encore, parce qu’il tire un constat : « Le trail a beaucoup évolué en ce qui concerne le matériel, mais très peu sur les méthodes d’entraînement. Les gens ne prennent plus leur temps. Il y a 15 ans, quand on faisait 2 ou 3 marathons par an, on était gourmands ! Aujourd’hui, il y a 35 courses de trail à La Réunion, du 15 janvier au 15 décembre. Un mois de coupure, c’est peu ». Et d’enchainer par cette question « Est-ce que les gens tiennent un cahier d’entraînement ? ». Il connaît la réponse : « Non. Mais avant de performer, il faut s’entraîner. Et assimiler l’entraînement par des périodes de développement ».

Eric Lacroix ASICSEntraîneur du Team Asics Trail, mais aussi d’athlètes comme Thomas Lorblanchet, Eric Lacroix est une sorte d’équilibriste qui se nourrit du « contraste entre les pratiques ». L’homme prend donc autant de plaisir à « développer le trail sur l’Ile Maurice », à s’occuper du Trail de Rodrigues (voir la fiche de l’événement) dont il est le directeur technique, qu’à déambuler à travers les allées du salon de l’ultra-trail lors de l’UTMB. Restent ses valeurs qu’il martèle avec vigueur. Ce « processus santé » qui lui tient à cœur, parce qu’il n’y a pas que la performance sportive. Lui vient d’ailleurs une autre question : « Pourquoi adule-t-on toujours celui qui a gagné la course la plus longue ? La discipline prend de l’ampleur, c’est excellent. Mais on est dans une surenchère du long ».

Eric Lacroix, vainqueur du Marathon du Mont-Blanc en 2003, a bouclé une fois le Grand Raid de La Réunion (voir la fiche de l’événement). « Et je ne le referai pas ! », lance-t-il. « J’ai terminé dans un état pitoyable. Au-delà de 100 km, l’approche est complètement différente. On ne sent plus rien. J’ai terminé 42ème, ce n’était pas un échec, mais j’étais un vrai légume, avec des crampes énormes. J’avais l’impression d’avoir du ciment dans les jambes. J’ai terminé pour ma famille. J’ai mis 2h15 à parcourir les 5 derniers kilomètres en descente ».

Aujourd’hui, l’ultra pour lui, « c’est terminé. Si je veux continuer à courir, je dois me contenter de plus court. 50 kilomètres maximum. Je veux vraiment me faire plaisir ». Il envisage aussi de continuer à écrire. Après avoir notamment soutenu un mémoire sur« les femmes et la course à pied hors stade à La Réunion », publié un « guide d’entraînement à l’ultra trail, l’exemple du Grand Raid », Eric Lacroix envisage de s’attaquer à l’histoire des courses en montagne. A 46 ans, il lâche cette phrase qui lui tient à cœur : « Je préfère me perdre dans ma passion plutôt que perdre ma passion ».

Eric LacroixEric Lacroix
Né le 8/12/1965
Professeur agrégé d’Education Physique et Sportive
Directeur du Sport Universitaire à La Réunion
Entraîneur fédéral 3ème degré

Record sur marathon : 2h18mn52s à Paris en 1996

Palmarès principal : Champion de France Espoir des 25 km en 1986, vainqueur du Marathon du Mont-Blanc en 2003, champion de France vétéran de course de montagne en 2005.