Djilali Bedrani : « Ce qui me manque c’est une concrétisation au niveau international. »

Début ce jeudi des Championnats d'Europe en salle d'athlétisme à Toruń (Pologne). Coté Français, le demi-fond sera à l'honneur avec au total 10 athlètes sur les 26 de l'équipe de France en lice sur les 4 jours de compétition.
Parmi eux, Djilali Bedrani (Sa Toulouse Uc) champion de France du 1500 m en salle à Miramas s'aligne sur 3 000 m avec de sérieuses ambitions et l'envie d'un premier podium européen. Entretien.

Crédit photo : Romain Bourven

Lepape-info : Djilali, vous êtes devenu champion de France du 1500 m en salle au terme d’un incroyable finish  

Djilali Bedrani : J’en retiens que du positif, je n’étais pas venu sur cette course en tant que favori et je l’ai quand même emporté. Il y’a aussi ce finish où j’arrive à me faufiler dans la dernière ligne droite in-extremis, c’est une satisfaction personnelle, j’avais besoin de cela. Ces derniers temps c’était assez compliqué avec mes dernières courses où je n’avais pas réussi à faire ce que j’espérais. Ce 1 500 m à Miramas m’a rassuré à tout point de vue.

 

Lepape-info : Vous avez participé à ce 1 500 m à Miramas pour travailler votre vitesse en vue des Championnats d’Europe sur 3 000 m  

D.B : Oui, le finish et la vitesse terminale. Avec mon entraîneur Sébastien Gamel on avait prévu de faire le 1 500 m plutôt que le 3 000 m dès le début et nous sommes restés sur ce choix même si la Fédération Française d’athlétisme n’a pas vraiment cautionné ce choix car l’un des enjeux des Championnats de France était la sélection pour les Europe en salle de Torun. Dans les modalités de sélection j’aurais du normalement faire le 3 000 m pour être retenu sur cette distance (Djilali Bedrani avait déjà réalisé plus tôt cet hiver le niveau de performance requis sur 3 000 m) mais bon ce n’est pas forcément très grave, le plus important était de travailler sa vitesse, ce fut le cas et c’est positif.

 

Djilali Bedrani : « Ma 5ème place sur 3 000 m steeple aux Mondiaux de Doha en 2019 m’a aussi appris non pas à courir en patron mais à courir devant en prenant des responsabilités, à un moment c’est ce qui va faire que cela va payer. »

 

Lepape-info : Ce titre de champion de France en salle sur 1 500 m vous a étonné

D.B : Je voyais mes adversaires au-dessus de moi vu que c’était leur distance de prédilection avec notamment des temps aux environs de 3’38. Avec mes 3’41 en début d’hiver, je n’avais pas fait un gros chrono. Cela prouve qu’il ne faut jamais se sous-estimer avant la course parce que l’on ne sait pas ce qu’il peut arriver. J’ai pris conscience à 400 m de l’arrivée que je pouvais gagner. J’ai vraiment géré la course de bout en bout, je ne me suis jamais affolé, j’ai laissé faire devant avant d’attaquer au bon moment. Ma gestion du finish sur cette course est très instructive, j’apprends au quotidien, cela m’a rassuré avant le rendez-vous en Pologne.

 

Lepape-info : Quelles sont vos ambitions sur 3 000 m lors de ces Championnats d’Europe en salle ?  

D.B : Donner le meilleur de moi-même comme d’habitude, il y’a deux ans à Glasgow je termine 4ème au pied du podium. L’objectif est de faire mieux que 4ème, je ne me mets pas de pression, je reste serein, lucide. Il y’a un gros niveau (Djilali Bedrani est le 9ème meilleur performer européen de la saison en salle) mais sur un championnat tout est remis à zéro et j’ai fait en sorte d’être au meilleur de ma forme sur le championnat. Ma 5ème place sur 3 000 m steeple aux Mondiaux de Doha en 2019 m’a aussi appris non pas à courir en patron mais à courir devant en prenant des responsabilités, à un moment c’est ce qui va faire que cela va payer.

 

Lepape-info : Avec Jimmy Gressier, Hugo Hay et vous cela fait un sacré trio Français sur 3 000 m   

D.B : Nous sommes tous capables de faire un podium après c’est l’envie, la rage qui va faire la différence. Jimmy et Hugo progressent bien et il faudra bien sûr les suivre à l’avenir. C’est à celui qui aura le plus l’envie et le courage de prendre des risques.

 

Lepape-info : Toruń est un moment important dans la saison

D.B : C’est une passerelle avant les Jeux Olympiques de Tokyo. Ce championnat en salle ne va pas définir ma saison estivale mais ce sera un bon indicateur en vue de l’été. Les Championnats de France nous permettent d’y voir plus clair avant les prochaines courses mais rien n’est acquis. Chaque course est différente, c’est du 3 000 m, cela dure presque 8 minutes, il va falloir rester lucide le plus longtemps possible. Je sais que je suis en forme, je me suis entraîné pour être au top, je ne suis pas favori mais cela me va très bien.

 

Crédit photo : Romain Bourven
Crédit photo : Romain Bourven

 

Djilali Bedrani : « L’athlétisme est un sport qui m’a fait grandir en tant qu’homme, qui m’a apporté des valeurs, qui m’a appris le dépassement de soi. L’athlétisme est un sport d’humilité, on apprend à se connaître physiquement, mentalement. J’espère que cela va sourire à un moment donné, on s’entraîne, on persévère en espérant que cela va arriver un jour. »

 

Lepape-info : Que préférez-vous ? Les championnats ou les meetings ? 

D.B : Les championnats, j’aime trop cela. Les meeting sont bien aussi mais les championnats me donnent vraiment envie vu que je n’ai pas encore obtenu de médaille internationale. C’est un petit défi que je me lance aussi, j’ai vraiment envie de monter sur un podium le plus rapidement possible. Il me manque pas grand chose, je progresse à mon rythme, je me compare à personne j’ai juste envie d’être récompensé à un moment pour tout le travail réalisé avec Sébastien Gamel depuis 5 ans. Les chronos sont des indicateurs, à un moment on recherche quelque chose de concret, qui reste.

 

Lepape-info : Vous avez monté une structure autour de vous, Djila Communication ? 

D.B : C’est une société de droits d’images où je fais notamment passer mes sponsors etc… Stéphanie Durr, la responsable communication gère toute la partie visuelle, les réseaux sociaux avec un adjoint. J’ai aussi un responsable des partenaires qui est un ami d’enfance, il y’a bien sur mon entraîneur Sébastien, un préparateur mental, un kiné, un manager général, un responsable financier. C’est une équipe qui montre qu’au final on peut très bien réussir même si l’on ne fait pas partie d’une grosse infrastructure. Plus tard après ma carrière je veux développer cette structure, je veux pouvoir investir sur cette société qui me servira toujours si par exemple je veux travailler dans la communication d’athlètes ou me lancer dans la structure sportive auprès de clubs etc… On n’a pas ou peu de visibilité sur le lendemain, on l’a vu avec la COVID-19. On peut tout perdre du jour au lendemain, il faut trouver de nouveaux moyens pour rebondir plus tard comme par exemple le digital qui est moins impacté par la crise. Depuis 2-3 ans j’ai beaucoup pris en maturité et je pense que c’est important de gérer son avenir, le futur, l’après-carrière. J’ai délégué pour éviter de perdre trop d’énergie mais cette société se monte tranquillement.

 

Lepape-info : Cette idée n’est pas fréquente en athlétisme de monter une telle structure en vue de l’avenir 

D.B : C’est bien d’être athlète mais on ne gagne pas de l’argent comme les footballeurs. On essaye de s’en sortir, l’argent est mal réparti on le voit dans le sport. Certains choses pourraient être mieux faites, organisées. L’athlétisme est un sport qui m’a fait grandir en tant qu’homme, qui m’a apporté des valeurs, qui m’a appris le dépassement de soi. L’athlétisme est un sport d’humilité, on apprend à se connaître physiquement, mentalement, cela m’a permis de réussir dans ma vie en général avec maintenant tout ceux et toutes celles qui m’entourent et m’aident au quotidien. Ce qui me manque c’est une concrétisation au niveau international. J’espère que cela va sourire à un moment donné, on s’entraîne, on persévère en espérant que cela va arriver un jour.

 

Lepape-info : Vous avez 27 ans, en quoi avez-vous mûri depuis 2-3 ans comme vous venez de le dire ? 

D.B : À tous les niveaux, professionnellement parlant j’arrive à prendre conscience de beaucoup de choses, je réagis vite, j’ai passé un cap dans ma vie dans la manière de voir ce qui m’entoure. Juste avant les Mondiaux de Doha en 2019 j’avais déjà eu un déclic, ma 5ème place sur 3 000 m steeple m’a permis de passer un cap supplémentaire. Je le sens psychologiquement maintenant il faut que cela se voit sur les compétitions. À l’entraînement tous les feux sont au vert, j’ai progressé dans tous les secteurs y compris la vitesse.

 

Lepape-info : Les Jeux Olympiques de Tokyo restent évidemment l’objectif majeur de l’année

D.B : J’ai déjà fait les minima il y’a deux ans sur 3 000 m steeple lors des Mondiaux à Doha avec un record personnel en 8’05″23, je les ai refait l’an passé au meeting de Monaco. Il faudra bien sûr montrer son état de forme au niveau des chronos avant les Jeux. Cette année, j’espère battre mon record personnel. Être aux Jeux c’est un rêve de gosse, depuis que je les ai vu à la télévision en 2008. J’espère qu’ils vont bien avoir lieu l’été prochain.

 

 

Championnats d’Europe en salle d’athlétisme à Toruń (Pologne) du 4 au 7 mars 

Séries du 3 000 m messieurs le samedi 6 mars à partir de 11h25

Finale du 3 000 m messieurs le dimanche 7 mars à 17h52

 

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