Michel Lanne Team Salomon 2012

Michel Lanne : « J’ai été contaminé par le virus du trail »

Comment êtes vous venu au trail ?

Michel Lanne : Depuis longtemps, je rêvais de découvrir le trail. Les ultras trails me fascinaient et j’ai toujours su qu’un jour, je me lancerais dans cette aventure. Pendant cinq années, j’ai consacré mon temps à préparer et obtenir les diplômes de guide de haute-montagne et de moniteur de ski alpin. En fin d’année 2010, j’ai décroché ces deux diplômes et me suis lancé immédiatement dans le trail. Au début, c’était juste un pari avec mon père. Le but était de participer au grand raid des Pyrénées et de faire mieux que l’autre ! Mais rapidement, j’ai été contaminé par le virus du trail. Quand je cours en montagne, je me sens bien. Je n’ai rien besoin de plus. Le trail est une façon de voir la nature, de la parcourir et de découvrir ses mille visages. L’aspect compétition est une façon de concrétiser les entraînements et une source importante de motivation.

Quels sont vos distances et terrains préférés ?

Michel Lanne : Je suis attiré par l’ultra. Il représente le trail running dans sa pratique la plus extrême. Les notions d’effort, d’engagement, de dépassement de soi et de gestion de course sont poussées à leur paroxysme. L’aspect psychologique devient plus important encore que l’effort physique. L’ultra nous permet de jouer et de repousser les limites de notre mental et de nos ressources.
Je n’ai pas encore assez de recul pour savoir exactement quelle distance me convient le mieux mais je pense être assez efficace dès que je dépasse les 50 km. Dans la pratique de l’alpinisme, j’évolue souvent hors sentiers, dans des zones non aseptisées où la recherche de l’équilibre et de l’efficacité cohabitent. J’ai donc un peu plus l’habitude de me déplacer dans des pierriers, des terrains accidentés et inégaux, où l’anticipation et la réactivité priment. J’adore courir sur des crêtes rocheuses déchiquetées, sur des terrains qui demandent un peu d’engagement et de risque aussi. Je prends également beaucoup de plaisir à courir sur de beaux singles en sous-bois, ou un large GR de montagne. En fait, en trail, le plaisir est omniprésent dès lors que je suis dans la nature !

Quel est votre état d’esprit avant et au départ d’une course ?

Michel Lanne : Je suis assez perfectionniste dans la vie. Quand je décide de participer à une épreuve, c’est parce que je sais que je suis entraîné et que je peux rivaliser avec la concurrence. Au départ, je me sens bien. Je ne me prends pas la tête à essayer de cerner l’ensemble des paramètres ou à tenter de jauger l’adversité. Je m’efforce seulement de gérer au mieux l’unique point que je peux maîtriser, c’est-à-dire moi !
La compétition est un aboutissement dans l’entraînement. J’ai besoin d’entraînement pour prendre du plaisir en course, mais l’inverse est tout aussi vrai. Esprit de compétition et découverte des paysages cohabitent très bien. La compétition n’est que la partie visible et médiatique de l’iceberg !

Michel Lanne Team Salomon 2012Que retenez-vous de 2011 ?
Michel Lanne : L’année 2011 a été ma toute première année de trail. Je n’avais aucun objectif en terme de résultat mais une seule envie, découvrir la discipline et prendre du plaisir. C’est une totale réussite ! Je suis parti de loin et de rien et je n’ai pas cessé d’apprendre chaque jour davantage. J’ai eu la chance de côtoyer de grandes personnes, de grands champions qui ont su me transmettre leur savoir et leur vision. J’ai surtout eu l’opportunité d’intégrer un team qui excelle dans le domaine du trail, du matériel, du management. Je suis fier en 2012 de faire partie de cette famille.

Quel sera votre calendrier 2012 ?

Michel Lanne : Avant de m’orienter vers l’ultra distance au fil de la saison, je vais privilégier des trails plus courts pour progresser en vitesse. Chaque objectif sera précédé d’un gros bloc de 6 à 8 semaines d’entraînement spécifique pour préparer la course.

Comment se compose votre entraînement ?

Michel Lanne : Je m’entraîne entre 3 et 6 fois par semaine en fonction de l’objectif visé, de la période de l’année et du temps que me laisse mon activité professionnelle. Dans le cadre de mon métier, nous nous devons de rester en parfaite condition physique toute l’année. Le trail est aussi une façon de rester au top et je peux le pratiquer pendant mes heures de travail. C’est une chance de pouvoir allier passion et activité professionnelle. J’affectionne particulièrement les entraînements longs. Je recherche de nouveaux sentiers sur le logiciel de cartographie, avec plusieurs montées, de gros dénivelés et plusieurs heures de course en montagne.
Courir seul ne me pose aucun problème. C’est une façon de se retrouver, de réfléchir, d’analyser certaines situations et de s’évader de la réalité. Je ne suis pas pour autant un solitaire. J’ai besoin des autres, c’est sûr. Et puis mon métier est un métier d’équipe où l’esprit de cordée est omniprésent.

Quel regard portez-vous sur l’essor du trail, son organisation ?

Michel Lanne : L’explosion du trail est liée à un contexte particulier de notre société actuelle. Dans un climat préoccupant de crise économique, chômage, incertitudes en l’avenir, nous ressentons de plus en plus un besoin de retour aux sources, de rapprochement avec la nature. C’est une façon de fuir la réalité et ses problèmes pour se retrouver seul face à soi-même et à la nature.
Le trail touche un public très large, hommes et femmes, jeunes ou moins jeunes, montagnards comme citadins. L’équipement est minimaliste et accessible pour bon nombre. On peut courir partout, dès lors qu’on est en extérieur.
Le trail running est un sport jeune, qui ne demande qu’à grandir. J’ai confiance en son avenir, à condition que nous sachions le protéger des dérives néfastes. Dans le mot « dérive » il ne faut pas voir que le dopage ou l’argent, même si le dopage est le plus grand des fléaux dans le sport. Il me semble aussi important de rester proche des racines du trail et éviter d’en faire une activité sportive trop élitiste ou réservée à une minorité de coureurs. Il ne faut pas tomber dans la surenchère dans la difficulté ou la distance.
Mais surtout, sachons entretenir cette notion de liberté, dans un univers où le sport en général est aseptisé et répond à de trop nombreuses règles.

Michel Lanne Team Salomon 2012Quels seraient vos conseils à un traileur ?
Michel Lanne : Ne pas brûler les étapes pour éviter de se blesser. Prendre le temps de découvrir la discipline. Rester à l’écoute de son corps et humble face à la montagne. Elle sera toujours la plus forte. Ne pas se surestimer, mais croire en soi. La prudence est la seule façon de durer. Le trail est une façon magique de découvrir la nature et de se découvrir soi-même. Il faut toujours avoir plaisir à courir, c’est ce qui entretient la motivation.

Quels champions admirez-vous ?

Michel Lanne : Il y a une personne qui m’a toujours servi de guide et d’exemple, c’est mon père. Il a une carrière sportive hors norme, autant en escalade, alpinisme, ski de fond, qu’en ski alpinisme, avec dans cette spécialité un titre de champion de France et une deuxième place à la Pierra Menta. Il m’a transmis sa passion pour le sport et la montagne. J’essaie de suivre ses traces et j’écoute aussi ses conseils avisés ! Mais au-delà, c’est son mental d’acier, sa volonté et sa motivation à toute épreuve qui m’impressionnent toujours autant.
En trail, je suis fan de Kilian ! Outre ses capacités physiques hallucinantes, son palmarès incroyable et sa faculté d’être aussi performant sur un KV que sur un ultra, en trail comme en ski alpinisme, j’admire son état d’esprit, sa simplicité et sa vision de la compétition.

Si vous étiez une montagne et chemin ?

Michel Lanne : Je serais le Balaïtous. Un des plus beaux sommets Pyrénéens, avec ses arêtes déchiquetées et aériennes, et son sommet défendu par de grandes parois rocheuses.
Si j’étais un chemin, je serais un petit sentier perché en haute montagne, au milieu d’un univers minéral et sauvage, où seuls quelques cairns et quelques isards surpris, accompagneraient le traileur.

Michel Lanne
Né le 26 octobre 1984 à Tarbes
Membre du Team Salomon 2012
1,84 m –  67 kg

Palmarès

2012
1er du Trail Blanc Serre Chevalier

2011 
1er du Snow Trail des Ecrins
1er du Trail de Glanum
1er du Trail Sainte-Victoire
1er du Trail du Galibier
1er du Trail des Aiguilles Rouges

2010 
1er du Via Lattea Trail