L’exercice sous la chaleur fait probablement partie des situations les plus délicates à gérer pour le sportif, risquant sa performance comme sa santé : les probabilités d’abandon y sont plus élevées en compétition, tout comme les cas de malaise ou simplement les vomissements.
Face au « stress thermique », l’acclimatation s’avère être la contre-mesure la plus efficace à adopter – notamment pour le sportif amateur dont le temps de course est plus élevé que le sportif élite.
Aujourd’hui, le consensus général autour de cette stratégie veut que les sportifs s’entraînent 60 à 90 minutes par jour en chaleur pendant 2 semaines avant la compétition.
Cependant, bien que la physiologie humaine soit commune, des différences interindividuelles influencent la réaction de chacun à la chaleur.
Cette notion de réactions individualisées n’est pas nouvelle. Il y a 30 ans déjà, on montrait par exemple que la température centrale d’un individu au repos ou à l’exercice dépendait à la fois de ses caractéristiques anthropométriques (masse graisseuse, rapport surface/masse) et physiologiques (VO2max, sudation).
Plus récemment, on démontrait que des facteurs génétiques expliquaient aussi les différences en chaleur, avec des augmentations de température et de FC plus faibles chez ceux présentant un polymorphisme ACE I+ par rapport à un polymorphisme DD.
Enfin, contrairement à la croyance populaire, on sait aussi aujourd’hui que le sexe n’a aucune influence sur les réponses thermorégulatoires (dès lors que les données anthropométriques et physiologiques de l’individu sont prises en compte).
Ce type de différences interindividuelles est également évident quand le corps est exposé régulièrement à la chaleur, c’est-à-dire pendant qu’il s’acclimate. Par exemple, tandis que certains sportifs montrent encore d’importantes baisses de performance sous la chaleur après une semaine d’acclimatation, il n’est pas rare d’en voir d’autres avec des niveaux d’activité physique similaires à ce qu’ils sont capables de produire en ambiance tempérée.
Dans ce contexte, il est important de noter que ces différences entre chacun ne doivent pas être interprétées comme des répondeurs VS. non-répondeurs – en effet, les humains s’adaptent à la chaleur en général – mais plutôt comme des répondeurs lents par rapport à des répondeurs rapides. Toutefois, aucune mesure anthropométrique ou physiologique ne peut fournir ce type d’information à l’avance ; même les tests d’effort en milieu tempéré ne permettent pas de prévoir ce qui se passera lors d’un exercice en chaleur.
Ainsi, la seule façon de déterminer comment un sportif réagira à la chaleur est de le tester en chaleur, et la seule façon de déterminer comment il s’y adaptera est d’effectuer une acclimatation préalable.
Pour illustrer cette idée, voici les rythmes d’acclimatation de 2 sportifs au cours d’un même stage en chaleur :
On le voit donc, le sportif A bénéficie d’une adaptation initiale rapide avant que sa performance ne stagne. À l’inverse, le sportif B présente une inertie plus longue et requiert 3 semaines en chaleur pour obtenir les mêmes gains que le sportif A.
Sans cette distinction obtenue à partir d’une procédure d’acclimatation initiale, les 2 sportifs auraient pu réaliser le même stage d’entraînement (eg, 2 semaines) sans toutefois obtenir les mêmes bénéfices. L’intérêt de cette première procédure est donc de pouvoir réguler l’acclimatation suivante – potentiellement celle d’avant-course.
Pendant l’acclimatation du sportif, plusieurs indices peuvent être utilisés comme des repères du niveau d’adaptation du corps, tels que la fréquence cardiaque à l’effort, le débit de sueur, le ressenti ou la température centrale.
Ces mesures n’évoluent toutefois pas au même rythme durant le stage bien que leur évolution globale suive une même chronologie (par exemple, la baisse de FC précède la hausse de la sudation).
Évidemment pour le sportif, c’est surtout la performance qui servira de repère final pour dire si oui ou non l’acclimatation aura été efficace ; cependant ce type de mesure n’est pas réalisable au quotidien et des indices collectés à des allures sous-maximales sont donc nécessaires.
En plus de l’acclimatation précompétitive généralement recommandée, il est donc important de réaliser une première procédure d’acclimatation dans les semaines/mois avant la course. En effet, si certains sportifs peuvent avoir besoin de 7 à 10 jours seulement pour préparer leur corps, d’autres auront besoin de plus de 2 semaines, en particulier les femmes.
Source : Racinais & Ihsan. BJSM, Juin 2020