Au coeur des championnats d’Europe de course en montagne (Porto Moniz, Portugal), le 4 juillet 2015

Le chef de délégation tricolore, Michel Huertas, affichait sa satisfaction peu après l’arrivée des seniors masculins, les derniers à s’élancer dans ce championnat d’Europe 2015. En effet, avec deux podiums au rendez-vous de cet événement, l’Equipe de France confirme sa belle prestation de Gap l’année passée (lire le compte rendu des championnats d’Europe 2014) et s’affirme de plus en plus parmi les nations fortes de la discipline. Une performance bienvenue à deux mois des championnats du Monde programmés le 19 septembre 2015 au Pays de Galles.

C’est à l’aéroport de Paris Orly, le jeudi 2 juillet 2015, que le groupe France s’est réuni. Déjà, bonne humeur et ambiance chaleureuse étaient de la partie ! Pour la plupart nous nous connaissont bien, ce qui explique cette entente. Julien Rancon, le chef de file des seniors hommes, en est à sa 23^ème  sélection, autant dire que l’équipe avait une référence sur qui s’appuyer ! Au contraire, les plus jeunes dans les catégories juniors (comme moi) fêtaient leur première apparition sous les couleurs nationales. Mais peu importe l’expérience, c’est toujours une émotion aussi intense que de recevoir l’équipement Asics de la fédération ! Pour une première comme une 23^ème sélection, c’est une immense satisfaction et un plaisir incommensurable, une récompense pour tous les entraînements effectués et une source de motivation pour la compétition à venir, paroles d’athlète aguerri !

(Presque) Au complet (Laura Ruel et Julie Soulet qui passaient leur bac français n’ayant pu se libérer ce jour là ont dû attendre l’avion du lendemain pour rejoindre leurs coéquipières), la délégation a embarqué pour 4h de vol, direction Funchal, avec une petite escale à Porto.

Une fois les bagages récupérés, direction l’hôtel ! Enfin… Après avoir attendu plus d’une heure à l’aéroport… (Visiblement le chauffeur du bus n’avait pas songé à l’heure de décalage horaire).

Pour autant, nous n’ont pas boudé leur plaisir dès les premiers kilomètres du trajet vers leur fief. Des paysages de carte postale, une flore abondante et généreuse (bananes, mangues, vignes etc.) ainsi que… des montagnes aux pentes raides nous ont accueilli. Idéal pour le paysage, un peu moins pour l’accès (850m d’altitude), notre hébergement se situait à 45 minutes du site de course. D’autres pays comme l’Irlande, l’Espagne ou la Belgique logeaient au même endroit. C’est donc assez éprouvée par un long voyage que nous nous sommes endormis sur l’île de beauté portugaise. A noter que les températures, caniculaires en France, étaient bien plus supportables à Madère, puisqu’elles avoisinaient les 25 degrés seulement. Une bonne nouvelle !

Vendredi 3 juillet, J-1 et traditionnelle reconnaissance du parcours le matin. Seules les juniores filles ont pu reconnaître le leur dans la totalité, le format assez court (4km500 avec 400 de dénivelé) le permettait. Pour les autres, la ligne de départ se situait sur des sites différents, au niveau de la plage pour les séniors masculins avec un dénivelé positif de 1250m à gravir et un peu plus haut pour leurs homologues féminines et pour nous, les juniors garçons qui avions 850m à avaler. Pour les trois équipes, le départ et la fin de course ont pu être reconnus. Les parties très très raides restaient alors énigmatiques. Une surprise réservée au lendemain. Et peut-être un mal pour un bien car aucun cauchemar à propos du parcours n’a été recensé la nuit suivante ! Un entraîneur italien a tout de même glissé à Julien Rancon qu’un kilomètre difficile se situait à mi-parcours et qu’il ne faudrait pas moins d’un quart d’heure pour en venir à bout, ce qui annonçait la couleur…

L’après-midi a été bien rempli entre les massages pour certains, la réunion technique pour les dernières instructions, la cérémonie d’ouverture à Porto Moniz et les trajets en bus, il y avait de quoi s’occuper ! Et cela n’a pas laissé le temps au stress de s’installer ! C’était donc la course pour Jean-Jacques, le kiné français qui a massé les athlètes et qui s’est occupé des derniers petits bobos de quelques-uns. Les officiels du groupe ont quant à eux été à la pêche aux informations, pour connaître les astuces utiles comme les horaires de bus ou encore les lieux de ravitaillement.

La cérémonie d’ouverture est un moment convivial qui permet à tous les pays de défiler dans les rues et d’assister tous ensemble à des chants et danses locaux. Une fois terminée, il faut vite retourner à l’hôtel, il ne faut pas se coucher trop tard ! Là-bas, une belle surprise nous attend car les deux jeunes filles manquantes sont arrivées à bon port. Leur épreuve de français à peine finie, Julie et Laura ont sauté dans l’avion pour honorer cette sélection. Un défi se dresse alors devant elles car elles ne connaissent absolument rien du parcours et ne sont que cadettes (2 ans de moins que certaines filles !). Cependant, elles sont tout de suite bien intégrées.

Il est 21h dans le hall de l’hôtel lorsque tous les 16 nous écoutons les dernières consignes. Le stress commence à monter. Les dossards sont alors distribués et nous rentrons dans notre bulle. Un dernier repas, le sac préparé et vérifié, c’est maintenant l’heure de dormir !

Réveil très tôt pour certains, notamment les juniors filles, le départ étant prévu à 9h.

Les courses

Les juniors filles ont ouvert le bal. Salomé Baudoin, Elsa Racasan, Laura Ruel et Julie Soulet avaient une belle carte à jouer car toutes les quatre, bien que très jeunes (aucune junior deuxième année) avaient déjà une ou plusieurs expériences internationales. Leur parcours était régulier. Pas de piège et une difficulté bien répartie. Cependant, elles ont été au bout d’elles-mêmes. En effet, Elsa fait forte impression dans le peloton de tête, surtout lorsqu’au terme d’un finish haletant elle vient prendre une magnifique 3^ème place ! Première athlète française à franchir la ligne d’arrivée et déjà une médaille pour les tricolores ! Et cette performance aurait peut-être pu prendre une tournure encore plus favorable si une vache n’avait pas coupé la route à Elsa alors qu’elle était deuxième… Peu de temps après, arrivent Laura (15^ème), auteure d’une remontée fantastique et Salomé (17^ème) qui s’est appuyée sur son finish de pistarde pour reprendre quelques places. Plus en retrait mais sans démériter, Julie Soulet se classe 31^ème et n’a aucun regret, cette expérience restera un souvenir mémorable à n’en pas douter.

Collectivement, l’équipe peut-être fière de son parcours car elle termine 4^ème (addition des places des 3 meilleures) derrière l’Allemagne, la République Tchèque et la Turquie.

C’est à nous,  les juniors garçons avec 8km250 avec 850m de dénivelé positif. Dès le départ, les pentes s’élèvent et nous voyons se dresser de véritables « murs » sur notre passage, avec des escaliers très irréguliers. Impossible de courir tout le temps, il faut marcher. A ce petit jeu, ceux qui parviennent à relancer dès que le pourcentage ‘’s’adoucit’’ font la différence. Les deux derniers kilomètres sont totalement différents, des portions plates et de descentes obligent à adopter une nouvelle allure, rapide, qui peut s’avérer destructrice pour les jambes. Mathieu Jacquet se révèle comme le plus solide, dans le top 10 toute la course, il termine finalement 11^ème, une vraie belle performance. Junior première année, il découvrait la compétition internationale. Nathan Jovet, adepte de distances plus longues (20/25km) réussit une belle montée mais connaît un peu plus de mal sur le haut, plus roulant. Malgré tout, c’est une bonne 18^ème place à mettre à son actif. De mon côté, j’ai eu du mal à trouver mon compte sur ce parcours, moi qui aime l’alternance montée/descente. Je termine 21^ème mais sans avoir pu relancer comme je le souhaitais tant la montée avait laisser des traces. Enfin, pas très loin, Mathieu Delpeuch, coureur de Kilomètre vertical, signe une 28^ème place très satisfaisante dans un niveau très dense.

Là encore, l’équipe termine au pied du podium, devancée par la Turquie, l’Italie et la Grande Bretagne.

Les seniors femmes sur le podium

Les seniors femmes avaient le même parcours que nous. Leurs visages marqués à l’arrivée témoignaient d’un réel engagement dans la compétition ! Un engagement qui n’a pas été vain… La chaleur se faisant de plus en plus ressentir, les athlètes ont eu un aspect en plus à gérer. Cela n’a pas freiné l’enthousiasme de la jeune (encore espoire) Anaïs Sabrié qui s’arrache pour aller chercher une 8^ème place, superbe performance tant on connaît le niveau des prétendantes au top 10. Derrière elle, l’expérimentée Christel Dewalle et la jeune seniore Adélaïde Panthéon arrivent vite, mettant la main sur la 13^ème et 17^ème place. Ce tir groupé permet d’envisager un podium, l’attente est insoutenable ! Céline Jeannier arrive en 30^ème position et peu de temps après, le speaker annonce les ‘’team results’’… La Grande Bretagne et l’Autriche sont aux deux premières marches. Et là c’est une explosion de joie, les quatre copines s’emparent du bronze, belle récompense pour celles qui se sont livrées à une vraie bataille du début à la fin !

Avant d’emprunter les mêmes chemins que les juniors et les féminines, les seniors hommes devaient s’éloigner du niveau de la mer et faire subir à leurs jambes les premières difficultés de la journée. Il leur était nécessaire de garder des forces pour la deuxième partie qui abritait les plus forts pourcentages. Le ‘’vétéran’’ de l’équipe, Dider Zago (37 ans) qui connaissait le parcours pour l’avoir reconnu lors d’un voyage à Madère en 2014, prenait le meilleur départ des quatre gaillards. Pointé aux alentours de la 7/8^ème place en haut de la montée, il s’est senti moins à l’aise sur le plat et a donc été repris par Julien Rancon, toujours très solide dans les grands rendez-vous continentaux. Finalement Julien intègre le top 10 (8^ème) et Didier n’en est pas loin (11^ème). Benjamin Bellamy vient compléter la belle prestation de l’Equipe de France avec une 14^ème place (une de plus que l’année passée à Gap) et un beau finish où il grappille des places précieuses pour le classement par équipe. Malheureusement, le champion de France 2015 de la discipline, Renaud Jaillardon, perturbé par des points de côté n’a pas pu exprimer tout son potentiel et mettre à profit sur la partie finale son chrono de 30’28 sur 10km, établi cette année. Il franchit la ligne en 43^ème position, bien loin de refléter son niveau.

Jamais deux sans trois… La France qui avait décroché le bronze l’an passé termine à une méritoire quatrième place (à 6 points du podium), comme les juniores filles et les juniors garçons !

Après cet effort, nous avons ont pu profiter du cadre splendide offert par l’île. Les tricolores ont pu apprécier un après-midi de récupération dans les piscines naturelles de Porto Moniz avant d’assister à la cérémonie protocolaire et de clôturer ce championnat par un repas en compagnie des autres délégations.

La course vue de l’intérieur

Et ma course ?

Cette sélection en Equipe de France était ma deuxième (après la Coupe du Monde Cadets en Italie l’année passée où j’avais fini second). J’arrivais à Madère dans une forme correcte, malgré une préparation perturbée par la semaine du bac. Je savais avant le départ que le fort dénivelé en peu de distance n’était pas fait pour m’avantager mais je ne faisais aucun complexe. Cependant, la course a été encore plus dure que je pouvais l’imaginer… Le parcours junior de 8km250 offrait une partie quasi plate voire en descente sur les 3 derniers kilomètres, ainsi le dénivelé positif était de 850m en 5km !! Et pour l’anecdote, mes coéquipiers qui courent avec une montre GPS avaient 920m de D+ à l’arrivée, soit du 18% de moyenne sur 5km… Le début de course a donc été dévastateur. Certains kilomètres dans les parties raides se couraient en 11/12 minutes alors que sur le haut, on était plus en 3min20, un changement de rythme qu’il fallait encaisser. Pour ma part, je pensais pouvoir être plus à mon avantage sur la partie roulante, mais mes muscles tétanisés par les nombreuses marches d’escaliers irrégulières ne répondaient plus efficacement. C’est alors que la tête prend le relais, on regarde son maillot, on pense à l’équipe, on se dit qu’on s’est entraîné dur pour être là et donc qu’on a pas le droit de lâcher. Ainsi je me bats pour doubler un concurrent turc au sprint, une place qui a été cruciale car l’équipe devance la Roumanie d’un seul point et ceux-ci avaient un meilleur troisième que nous, cela nous a donc permis de rester 4èmes.

Je garderai en mémoire l’intégralité du championnat, pas seulement la course. Le fait de partager le voyage avec des personnes plus expérimentées est bénéfique pour nous, jeunes athlètes. Le fait aussi de rencontrer des athlètes étrangers, de partager avec eux des repas et  d’échanger un maillot rend le voyage très sympa et inoubliable.