Ils ont terminé à deux. Depuis 18km, ils ne se quittaient plus, suivis comme leurs ombres par un VTT serre-fil. Atef Benyekhlef et Jean-Philippe Wegrich, ont bouclé leur parcours en 40h53mn38s (40h48mn50s temps réel pour Atef), sous les acclamations du public, accompagnés dans la dernière ligne droite par Christian Dilmi, et Stéphanie Le Floch vainqueurs respectivement en 18h05mn41s et 21h24mn31 (nouveaux détenteurs des records de l’épreuve).
Livreur, Atef court depuis trois ans, à 80% sur trail et compte déjà un marathon des sables à son actif en 2011, «ce n’est pas pareil c’est une course en étapes sur une semaine, la gestion de l’effort est tout autre. J’ai fait aussi la SaintéLyon (68km, ndlr), Millau en 2011 et des marathons. Sur 42 km, je tourne entre 4h15 et 4h45 mais je n’aime pas la route.»
Cet Ultra marin du Morbihan est donc la plus longue distance qu’il ait réalisée sur un non-stop. « Au départ, je voulais faire le 87 km mais je me suis dit que si je le faisais, je serais obligé de revenir pour faire le 177 km, alors autant se lancer. »
Au départ, Atef n’est pas plus tendu que cela, décidé à franchir la ligne d’arrivée et surtout à gérer son effort afin de ne jamais aller au delà de ses limites et d’être contraint à l’abandon. Lors d’un effort de 40h, l’organisme doit non seulement gérer les 177 km mais surtout deux nuits sans sommeil ou presque. « J’ai dormi deux fois. Une première fois 30 mn à l’arrivée à l’embarcadère (97e km) et 15 mn au 130e. J’avoue, j’aurais bien dormi un peu plus mais au niveau des barrières horaires je manquais d’information et je ne savais pas trop si ça passait ou pas alors j’ai assuré en ne dormant que 15 mn. En fait, je me suis vite rendu compte qu’il est préférable de dormir un peu, de marcher ou de se poser plutôt que de continuer. On force, on tire sur la corde mais on n’est pas efficace. Lorsque l’on se pose un peu, on repart plus vite avec une allure plus régulière et surtout on est plus lucide. L’arrêt n’est pas du temps perdu. »
Atef se souvient être reparti dernier de l’embarcadère. « J’’ai fermé le poste de contrôle, jusque là je n’étais pas le dernier. J’ai alors eu un petit moment de pression, je n’avais plus le droit à l’erreur mais le serre-fil était aussi rassurant. On s’habitue en fait et puis on discute. »
Atef évoque alors de la magie du trail, la fraternité des coureurs de fin de peloton. Tous dans la même galère, tous avec cette envie de terminer. Au fil des heures, ce sont les mêmes que l’on double et qui nous double. Cela va au gré des arrêts, des changements d’allure, des montées et descentes, des ravitaillements. « On se dit quelques mots, on sympathise, on s’encourage. »
« En fait Jean-Philippe Wegrich était devant moi et semblait bien aller mais à 16 km de l’arrivée, on l’a trouvé sur un banc. On l’a emmené avec nous et on a terminé ensemble. Cette arrivée était chargée d’émotion avec tout ce monde, les vainqueurs avec nous ! Un beau et bon moment, même si j’aurais préféré ne pas être le dernier…«
Pour Atef, il est temps d’aller se reposer mais il a déjà des projets dans la tête, des envies qu’il ne divulgue pas tout en concluant « c’était dur mais pas autant que je me l’imaginais. Je savais que ce serait beau, je ne pensais pas avoir aussi chaud et je suis heureux d’avoir terminé. Je visais 40 heures. Alors 40h50 et quelques minutes, ce n’est pas si mal ! »
Quelques photos de fin de peloton