Lepape-info : Nicolas, comment vous sentez-vous à 2 mois de ce marathon olympique ?
Nicolas Navarro : On s’était quitté après le marathon de Valence après avoir réalisé les minima une 3e fois mais sans la certitude d’être aux Jeux, ce fut un long chemin semé d’embuches. C’est la concrétisation de plusieurs années de travail, c’est un soulagement, ce sera la course d’une vie. J’ai eu quelques petits soucis physiques en début d’année mais maintenant je me sens bien, je suis impatient d’attaquer le gros de la préparation avec deux mois qui seront très très intenses avec déjà le semi-marathon des championnats d’Europe à Rome qui sera un bon test avant d’enchaîner avec un long stage à Font-Romeu pour préparer les Jeux.
Lepape-info : Qu’attendez-vous de ce semi-marathon à Rome ?
N.N : C’est une sélection en équipe de France, c’est une course de préparation aux Jeux car l’objectif sera bien sur le marathon olympique. Ce sera un bon test pour voir où j’en suis, d’étudier ce que je dois améliorer ou pas. On a beau faire des séances d’entraînement, l’important est de se tester en compétition, j’avais aussi à cœur de remettre un dossard avant les Jeux, c’est important d’y être avant de me concentrer uniquement sur la préparation marathon à Font-Romeu.
Nicolas Navarro : « Lorsque j’ai vu la première fois le parcours je me suis dit que c’était bizarre de proposer un tracé aussi compliqué pour un marathon mais au final tout le monde se souviendra de cette course. »
Lepape-info : Vous allez découvrir Font-Romeu, ce sera une première pour vous là-bas
N.N : Tout le monde m’en parle en bien et me dit que c’est l’endroit idéal pour préparer, cela donne l’envie d’y aller. Changer d’air c’est bien aussi comme l’on fait beaucoup de kilomètres en préparation marathon, c’est toujours mieux de ne pas tomber dans la monotonie des parcours. Nous serons bien encadrés avec toute l’équipe de France de marathon, cela ne peut que nous tirer vers le haut.
Lepape-info : Vous avez reconnu le parcours du marathon olympique
N.N : Je l’ai reconnu à 3 reprises, la dernière fois c’était il y a 3 semaines, j’aime beaucoup ce parcours comme ce fut le cas lorsque je l’ai découvert. Cela me donne l’envie d’y être, je me projette dans une course difficile où il va falloir encore être plus patient que lors d’un marathon classique mais cela me plait. Lorsque je m’entraîne vers chez moi (Aix-en-Provence) il n’y a rien de plat, j’aime faire des montées et des descentes, les enchaîner, le faire sur un marathon ce sera autre chose, ce sera un gros défi surtout qu’avant l’arrivée il restera 10 km de plat, la difficulté sera de relancer et de ne pas s’écraser après la descente. Lorsque j’ai vu la première fois le parcours je me suis dit que c’était bizarre de proposer un tracé aussi compliqué pour un marathon mais au final tout le monde se souviendra de cette course, ce sera peut-être le marathon olympique le plus lent de l’histoire. Je me dis aussi que cela redistribue toutes le cartes, ce n’est pas forcement le plus rapide sur le papier qui sera champion olympique.
Lepape-info : Du coup vous vous dites entre Français que vous avez une belle carte à jouer
N.N : On sait que sur les Jeux il y a toujours ou souvent des surprises, en plus nous sommes à la maison cela peut nous galvaniser, le fait que le tracé soit complètement différent d’un parcours classique peut changer la donne, il y a beaucoup de paramètres qui font que les compteurs seront remis à zéro et il peut y avoir plein de surprises. Quand j’étais sur la reconnaissance du parcours je pensais à différentes choses en vue du jour J avec peut-être une ambiance de dingue dans la côte des Gardes, on s’imagine un tas de scénarios de course même si cela se passera peut-être pas comme prévu.
Lepape-info : Elud Kipchoge et Kenenisa Bekele seront notamment au départ
N.N : Ce sont 2 légendes de notre sport, on pense pas trop encore au fait que l’on va courir avec eux, on se dit juste que ce sont 2 adversaires, que l’on a 2 bras et 2 jambes comme eux et que le jour J il faudra les battre. On pourra dire après que l’on a couru avec eux, se le remémorer plus tard mais pour l’instant on ne se met pas la pression à ce sujet.
Lepape-info : Les descentes vertigineuses se gèrent facilement avec les chaussures carbone ?
N.N : Il faut adapter sa foulée complètement différente que sur le plat, c’est pareil en montée, comme en cyclisme il faut adapter son braquet à chaque côte, descente. J’ai l’habitude des terrains vallonnés dans la région d’Aix-en-Provence, il faut être bien relâché dans la descente pour ne pas perdre trop d’énergie.
Lepape-info : Vous aurez aussi l’avantage d’avoir vos proches au bord de la route
N.N : C’est vrai que lors des Jeux de Tokyo nous n’avions pas nos proches à côté, aucun encouragement personnel. Les jours avant la course, j’aime bien avoir le soutien de mes proches, ce sera cette fois un gros avantage de les avoir avant, après et pendant la course. J’ai aussi l’avantage d’avoir déjà participé aux Jeux notamment pour gérer la médiatisation qui sera bien plus importante qu’à Tokyo, c’est toujours mieux de connaître tout cela pour aborder le jour J plus sereinement, ne pas se disperser et ne pas se mettre trop de pression.
Nicolas Navarro : « Ce n’est pas parce que vous serez en tête au sommet de la dernière côte au 29e kilomètre que vous serez champion olympique, la route sera encore très très longue. »
Lepape-info : Courir ce marathon olympique en France cela représente quoi pour vous ?
N.N : C’est une grande fierté que je pourrai raconter à mon fils Nino (il aura 1 an le 10 juin) qui sera au départ, il comprendra et réalisera plus tard que son papa a participé aux Jeux olympiques à Paris, c’est aussi une fierté personnelle vis à vis de ma famille, mes proches qui me suivent. Ma compagne Floriane Hot (championne du monde 2022 du 100 km et championne de France 2024 de marathon) est dans l’univers de l’athlétisme, elle comprend toute ma préparation, les sacrifices que cela engendre, elle sait pourquoi je les fais, elle accepte un peu plus facilement même si ce n’est pas toujours simple pour elle. Floriane, mon fils Nino et tous mes proches sont pour moi des moteurs au quotidien et le seront le jour de la course.
Lepape-info : Quelles seront les clés de ce marathon ?
N.N : Sur un marathon plat, la prudence et la gestion des allures sont de rigueur, ici les allures il ne faudra pas trop les gérer mais plutôt s’écouter, se connaître parfaitement pour savoir si on n’est pas trop dans le rouge dans les côtes, si on descend pas trop vite aussi. Plein de petits détails feront la différence. Ce n’est pas parce que vous serez en tête au sommet de la dernière côte au 29e kilomètre que vous serez champion olympique, la route sera encore très très longue. Il y a beaucoup d’excitation, de motivation, d’envie, on a vraiment envie d’être acteur de la course le jour J, de donner le meilleur, d’aller chercher la médaille.
Lepape-info : Alain Mimoun champion olympique en 1956 à Melbourne… pourquoi pas vous dans 2 mois ? Vous y pensez ?
N.N : C’est sûr qu’il faut y penser, si vous êtes au départ et que vous vous dites je vais faire du mieux possible c’est quand même mieux de se fixer un objectif, de le mentaliser, de se dire qu’on peut le faire surtout à domicile c’est motivant. Gagner à Paris serait le rêve ultime, après on verra bien…