Audrey Tanguy a réalisé une belle saison 2018.
Audrey Tanguy a réalisé une belle saison 2018.

Audrey Tanguy : « Cette saison a été une énorme surprise »

– Vous avez bouclé votre dernier objectif de l’année avec une première expérience sur 160 Km sur le Grand Raid de la Réunion (2e féminine, voir article). Comment avez-vous vécu la course ?

J’ai beaucoup souffert, je ne peux pas le nier, surtout sur un parcours si exigeant. Peut être que c’était un peu tôt, que je n’étais encore prête physiquement et mentalement. C’était très long, j’ai eu plusieurs moments de black-out. Vous savez, ces instants en trail quand vous rentrez en méditation, le cerveau débranché, à avancer (rires)… Les 30 derniers kilomètres ont été interminables, j’étais épuisée. Mis à part cela, j’ai aussi pris du plaisir comme lors du passage du Maido ou avec cette ambiance de dingue à la Réunion. Ça a été très enrichissant. Après la course, c’est surtout mentalement qu’il a fallu récupérer car j’étais très fatiguée.

 

« Antoine Guillon m’a poussée à me lancer dans de grandes courses »

 

– Après une année 2017 de découverte, comment expliquez-vous ce bilan 2018 qui ferait rêver bon nombre des meilleurs athlètes mondiaux (2e du 85 Km du Madeira Ultra Trail, 2e du 90 Km du Mont Blanc, 1ère de la TDS et 2e du Grand Raid de la Réunion) ?

C’est une énorme surprise, et beaucoup de bonheur. Je ne m’attendais pas à ça et je ne me l’explique pas. J’ai pris les courses comme elles venaient, sans repère ni objectif. Inévitablement, c’est ma victoire à la TDS (Traces des Ducs de Savoie, 121 Km et 7300m D+, l’une des épreuve de l’UTMB) qui reste mon meilleur souvenir. Par l’ampleur de l’événement, ses paysages, les émotions qu’elle a provoquées et parce que j’avais mes proches à mes côtés. C’est aussi une course où j’ai pris beaucoup de plaisir du départ à l’arrivée (Audrey Tanguy s’est imposée devant Rory Bosio, favorite et victorieuse de l’UTMB en 2013 et 2014).

 

– Antoine Guillon, l’une des figures du trail dans l’Hexagone, a joué un grand rôle dans votre arrivée dans la discipline. Pouvez-vous nous parler de vos relations ?

Antoine, avant d’être un coach, c’est surtout un ami. Nous partageons beaucoup de choses ensemble, il me transmet son expérience et m’a tout appris. On s’appelle presque tous les jours. Quand nous sommes ensemble en déplacement, je regarde comment il fait, je m’en imprègne et je reproduis ! Il m’a poussée à me lancer dans de grandes courses dont j’avais peur, à progresser techniquement, à être compétitive, à me dépasser. Je lui dois beaucoup.

 

« La compétition a toujours été mon gros point faible »

 

– Vous êtes professeur d’EPS en Savoie. Quel est votre passé sportif ?

J’ai fait 10 ans de patinage artistique, plusieurs années de tennis, pas grand chose à voir avec la course à pied ! Mais j’ai toujours eu l’habitude de courir, et étant originaire de Savoie, je faisais déjà du trail sans le savoir. J’ai juste accroché quelques dossards sans ambition. Ce qui m’a amenée à m’y investir pleinement, c’est peut-être bateau à dire, mais c’est l’amour de la montagne. L’entrainement, souvent sur des parcours que je connais par coeur, n’est jamais une contrainte, je m’amuse. Je me suis étonnée moi-même à me découvrir des capacités d’endurance et mentales que je ne soupçonnais pas. Je suis consciente d’avoir une marge de progression dans de nombreux domaines.

 

– Vous avez rejoint la marque Hoka One One récemment et avec ces résultats, vous allez être attendue sur les courses. Comment assumez-vous ce nouveau statut ?

La confrontation, ça a toujours été mon gros point faible. Pendant les cross du collège, je stressais presque un an avant la course (rires). En trail, je suis encore très stressée mais c’est différent. Le côté compétition, je ne le ressens pas forcément. Bien sûr, on veut être compétitif et tout donner, mais il y a un esprit de partage et d’entraide qui apaise les choses. Quel que soit le résultat, on est aussi heureux pour les autres. Et être au départ avec de grands champions, ça met des étoiles dans les yeux.

 

« J’ai même fait une séance d’escaliers de 2h30 à Montmartre »

 

– Vous êtes revenue cet été en Savoie après 3 ans à Paris. Comment vous entrainiez-vous dans la capitale ?

On s’adapte. J’habitais dans le 15e arrondissement et j’allais souvent faire des boucles au parc de Saint-Cloud. J’ai même fait une séance d’escaliers de 2h30 à Montmartre, l’enfer ! Mais je sais que pas mal de coureurs viennent faire du dénivelé là bas. Ça fait bien sourire les montagnards mais ça marche. Je revenais souvent m’entraîner en montagne le week-end avec un club parisien et j’ai aussi fait beaucoup de vélo d’appartement. Je vais d’ailleurs devoir le ressortir cet hiver, entre deux sorties de ski de fond.

 

– Avez-vous déjà bouclé votre programme 2019 ? Nous avons entendu dire que vous alliez voir du pays.

Oui, presque tout est bouclé. Allier trail et voyage, c’est un peu conjuguer deux passions. Je commencerais en janvier par le « Défi des 5 grottes » (150 Km d’aventure en 3 étapes avec un mix de course à pied, de vélo et de spéléologie), en duo avec Antoine Guillon. Ensuite j’irai faire la Translantau, un ultra de 100 Km en mars (Honk Hong). Puis il y aura le 100 miles d’Istria en avril (Croatie), le Lavaredo Ultra Trail en juin (Italie) et de nouveau la TDS en août (Chamonix). On réfléchira ensuite si je retourne ou non sur le Grand Raid de la Réunion en octobre. Mais il va déjà y avoir de quoi bien s’occuper, avec l’idée de prendre toujours autant de plaisir !

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