Des cousins aux apports physiologiques similaires

L’un des principes de base de beaucoup de sportifs ou d’entraîneurs sera d’en faire toujours plus. D’un point de vue physiologique cela se tient relativement bien puisque la base de la progression dans les sports d’endurance passera par une base de volume globale d’entraînement – suivant les capacités, la disponibilité et l’investissement de chacun – et dont la plus grande part sera à privilégier dans des intensités faciles, où l’on est capable de pouvoir discuter avec ses partenaires d’entraînement.

 

Les adaptations physiologiques pour ce type d’entraînement seront nombreuses, parmi lesquelles nous pourrons citer :

  • Rendre le cœur plus puissant, notre principal fournisseur d’énergie,
  • Et augmenter la taille du ventricule gauche du cœur, ces deux adaptations permettant à terme, à la fois de pouvoir distribuer plus de sang vers les muscles sollicités lors d’efforts intenses ou d’être plus économique dans la fabrication d’énergie pour des épreuves de longue durée.
  • Avoir une pratique de basse intensité et régulière aura par ailleurs un impact positif sur la résistance des muscles respiratoires et leur tolérance à la fatigue. On n’y pense pas forcément en courant, mais le système cardiovasculaire étant notre fabrique globale d’énergie, plus les différents maillons de chaine de ce système pourront être fortes, plus on sera armé pour sa spécialité de coureur, les poumons en faisant donc parti pour la partie « cardio ».
  • L’oxygène passant de notre ventilation aux alvéoles pulmonaires pour être acheminé au cœur qui aura pour vocation de le redistribuer aux muscles sollicités, majoritairement les jambes pour le coureur, l’aspect « vasculaire » va alors prendre tout son sens. Et, la pratique chronique à basse intensité aura pour conséquence d’augmenter notre réseau sanguin, comme si l’on ajoutait des axes routiers d’acheminement secondaires vers nos muscles pour leur apporter toujours plus d’énergie.
  • L’étape ultime étant l’utilisation du dit oxygène, et nos muscles le feront au travers des mitochondries, de petites usines ayant pour fonction de fournir aux muscles leur carburant. Et, le nombre et la taille de ces usines, va croitre a fait que semaine après semaine on les sollicite, comme si la récurrence de la demande permettait d’augmenter la taille et le nombre de ces entreprises.

 

Finalement on comprend mieux pourquoi les sports d’endurance sont l’archétype du travailleur consciencieux, investi, régulier et patient, puisque ces adaptations physiologiques ne pourront se faire en un jour et demanderont donc du temps. Si les meilleures performances à haut niveau sont le plus souvent atteintes après une dizaine d’années de travail intensif, ce n’est sans doute pas un hasard.

 

Mais la course à pied a comme vous le savez a pour principal défaut le caractère traumatisant des impacts au sol et de leurs répétitions. Par ailleurs, il semble clair que moins l’on est expert, moins l’on sera en capacité d’encaisser tous ces chocs, malgré un volume et une intensité moins conséquente que les coureurs élites.

Les athlètes de très haut niveau auront donc tout intérêt à ajouter une pratique portée pour encore augmenter le volume aérobie lorsque les progrès viendront à manquer ou que la charge deviendra difficile à encaisser.

Pour le sportif amateur cela sera donc encore plus vrai, celui-ci étant souvent plus sujet aux bobos par son geste moins efficace, ses moindres plages de récupération et sa moindre capacité à encaisser.

 

Quoi faire sur un vélo ?

Plusieurs options s’offriront donc alors à nous.

  • Faire ses activités de la vie de tous les jours en vélo: aller au travail, faire ses courses, etc., en vélo. Cela ne sera pas toujours beaucoup plus prenant, pourra s’inscrire dans la charge globale d’entraînement et en passant ne fera pas de mal à la planète. Suivant vos trajets, en additionnant leur récurrence vous pourrez parfois être surpris du volume annuel.
  • Se balader avec sa famille, ses ami(e)s, sur des sorties cyclistes plus ou moins longues, l’intensité n’étant pas ici une priorité, mais plutôt une certaine durée. Vous pourrez joindre l’utile à l’agréable, en améliorant votre préparation sans même vous en rendre compte, écarter les contraintes de vos habituelles séances très planifiées et partager un bon moment avec vos proches, pour lequel ils n’auront pas nécessairement besoin d’être des pratiquants assidus, le fait d’être porté par le vélo permettant un accès plus facile que la course à pied et surtout une pratique commune malgré des niveaux hétérogènes.
  • Enfin, l’étape ultime sera de l’intégrer de façon répétée et planifiée dans votre préparation hebdomadaire pour maximiser son utilisation. Par exemple lorsque vous planifiez vos semaines d’entraînement, la sortie hebdomadaire avec les enfants ou votre ami(e), ou même avec votre groupe d’entraînement « course à pied » étant inscrite dans le marbre.
  • Bonus : les coureurs ont souvent découvert et investi sur le vélo lors de mauvaises blessures, où il devenait l’un des seuls palliatifs à la dépense physique et au défoulement mental. A partir d’aujourd’hui anticipez ces possibles arrêts dans votre préparation en planifiant du vélo dans votre préparation lorsque tous les voyants sont au vert. Cela permettra de limiter la charge mécanique, tout en augmentant votre socle de travail, un choix gagnant sous tous les aspects !  

 

Bien entendu les sollicitations musculaires qu’implique la pratique du cyclisme sont différentes de celles du running, mais vous l’aurez compris l’impact positif sur le système cardiovasculaire sera similaire et tout aussi efficace. De proches cousins pourront exister comme la nage, l’elliptique ou le rameur, si vous souhaitez multiplier les plaisirs ou tout simplement ne pas faire de vélo.

Les meilleurs exemples que nous connaissons tous sont nos les amis triathlètes que nous avons, au même niveau chronométrique à pied, à la pratique pédestre moins soutenue, mais avec souvent plus de volume d’endurance par la pratique des 3 sports. Il n’est bien entendu pas question de devenir triathlète si l’on est runner pur, mais leurs résultats jusqu’à haut-niveau en est la meilleure illustration : Dorian Coninx réalisant 13’49 il y a quelques semaines à la sortie du confinement, les podiums nationaux de Vincent Luis et Léonie Périault aux France élites de cross ou encore les chronos de Raphaël Montoya (28’37 au 10km et 13’31 au 5km) et Cassandre Beaugrand (RF juniors et espoirs 10km) sur route.

 

Améliorer son rendement énergétique

Pour conclure cette partie physio, retenons que pédaler à basse intensité favorise l’amélioration de la consommation de l’oxygène par les muscles des jambes et apprend également à ces derniers à davantage brûler les graisses à l’effort — tout en épargnant les réserves de sucres. Il s’avère qu’à l’effort, l’Homme ne consomme quasiment qu’exclusivement des sucres, hors ceux-ci sont très énergivores et de plus en plus limités à fait que l’on avancera dans l’effort, d’autant plus pour des épreuves longues comme le marathon ou le trail par exemple.

On l’a bien compris en portant une grande attention sur les repas d’avant course ou nos ravitaillements. Mais, ne faire que cela serait comme partir pour un long voyage en voiture avec le plein d’essence et passer régulièrement à la pompe, mais sans se soucier du nombre de litres au 100km.

Les entraînements priorisant ce type d’adaptations le seront au travers d’entraînement à jeun (https://www.lepape-info.com/nutrition/dietetique-de-leffort/5-astuces-pour-bien-sentrainer-a-jeun/) et même de programmes où l’on planifiera le contenu de son assiette, les dits entraînements « sleep low » (https://www.lepape-info.com/entrainement/entrainement-running/progresser/les-seances-a-jeun-aussi-se-planifient/).

 

Mais si l’on prend déjà le temps de s’entraîner très régulièrement à basse intensité se sera clairement une première étape. Encore une fois, les résultats des meilleurs athlètes mondiaux nous montrent que leurs planifications ont chaque semaine un important volume à basse intensité, et que seulement ensuite ils y adjoindront les séances d’intensité, de spécifique, de seuil ou de renforcement musculaire.

 

Idéal pour limiter les contraintes musculaires, articulaires et tendineuses !

Comme expliqué précédemment, il est préférable de rester à l’écoute de soi et de faire l’impasse sur certaines sorties de votre planning course à pied – même si elles sont incluses dans le plan de route « idéal » – pour leur préférer du vélo ou un autre sport porté. D’autant plus, lorsque la récupération musculaire devient compliquée ou qu’une douleur anormale subsiste. Encore une fois il n’est que trop souvent employé lors de grosses blessures où l’arrêt total de la course à pied deviendra nécessaire. Inversez la tendance en prévenant ces dernières. N’oubliez pas que chez le coureur les blessures sont le plus souvent des blessures de contraintes et non des accidents. Nous vous offrons ici la possibilité de diminuer ces contraintes sans pour autant perdre en capacité, voir même trouver un nouvel axe de progression. Notre meilleur marathonien Hassan Chahdi inclue par exemple de façon récurrente des sorties à vélo pour augmenter son foncier sans aller au-delà de ce qu’il est capable d’encaisser à pied.

 

Casser la routine de l’entraînement en pédalant

Faire du vélo peut permettre de varier le contenu des séances, de voir du paysage et de sortir de ses circuits habituels de course à pied qui sont souvent les mêmes.

Des aspects d’autant plus important que la monotonie de l’entraînement constitue l’un des éléments les plus prédictifs du développement des états de surmenage et de grosse fatigue, contreproductif à la progression. Il ne faudra donc pas hésiter à écouter ses envies lorsque le besoin de nouveauté se fait ressentir et même idéalement les anticiper.

 

Garder le cap de l’entraînement

Enfin, lorsque des bobos apparaîtront, même petits et qu’il vous sera important de rentrer certaines séances, par exemple en période de préparation terminale, il sera potentiellement possible de dupliquer votre séance sur le vélo.

Par exemple un enchaînement de 1000 m ou de 2000 m pourra se réaliser en reportant le temps d’effort et l’intensité d’exercice. Un moyen efficace pourra être d’effectuer ces répétitions dans une côte moyennement pentue (4-8%) si vous avez la chance d’habiter dans une région vallonnée. Pour les récupérations, faites l’aller-retour dans la descente pour revenir à votre point de départ. Le kiff ultime étant évidemment de réaliser cet exercice dans un col sans avoir à redescendre, mais simplement en remontant les dents et diminuer l’intensité sur les récupérations.

Pour une séance VMA de 30/30 ou d’une dizaine de 400m enchaînés, il n’y aura qu’à se centrer sur le chrono et à jouer du braquet et votre implication pour vous situer au maximum de vos capacités aérobies.

 

Finalement, les seules limites de l’entraînement en cyclisme pour le coureur à pied résident dans ses aspects non spécifiques, principalement en terme de type de contractions musculaires, de qualité de pied et de capacité à restituer l’énergie emmagasinée à chaque foulée. Son caractère moins contraignant sur le plan articulaire, musculaire et tendineux constitue un avantage. Mais sa contrepartie est de ne pas renforcer les structures de l’organisme que la course à pied met à rude épreuve et qui demande un certain nombre d’adaptations pour à la fois les encaisser et devenir efficace. Si la pratique du vélo permet de mieux gérer la charge de travail lors des périodes d’entraînement intensifié, il est cependant important de conserver un stress mécanique suffisant pour que les muscles, tendons et articulations se renforcent peu à peu. Et cela ne se développe véritablement qu’en courant…C’est pourquoi si vous devrez ne réaliser que du vélo en période de blessure ou à la coupure par exemple, il sera très important de reprendre progressivement par des sorties courtes et espacées.

 

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@AUBRYANAEL
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Anaël Aubry
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Anaël Aubry Sport Scientist