Voilà une question fort complexe à laquelle il est très difficile de répondre ! L’entraînement est à la source de la progression : personne ne contestera cette affirmation. Oui mais… combien de fois par semaine faut-il s’entraîner ? Cette question renvoie au débat « quantité versus qualité » qu’un ancien collègue résumait si joliment : « Il faut de la qualité dans la quantité et de la quantité dans la qualité » ! C’est juste et incontournable. Mais comment répondre de manière opérationnelle à cette quadrature du cercle ? Rappelons quelques principes fondamentaux.
Fréquence des séances
Se dire que le champion du monde ou du club fait 14 séances par semaine, et donc qu’en en faisant 15 je serai meilleur, ne sera pas la bonne solution. Avoir cette démarche du « toujours plus » pourra s’avérer parfois même destructeur pour le coureur.
Le ticket gagnant de l’entraînement, c’est le bon compromis entre la charge de travail et la récupération. La récupération est un principe fondateur de la méthodologie de l’entraînement (lire également « récupération et entraînement sont indissociables« ). Il faut récupérer : sur une saison, entre deux compétitions, entre deux entraînements, entre deux séries, entre deux répétitions… On ne peut pas raisonner en termes de charges de travail sans penser à la récupération. Et ceci est vrai quel que soit le niveau du coureur.
Le profil du coureur est l’élément central. Pour chacun, il s’agira de trouver de trouver le juste équilibre entre le potentiel et niveau initial (très fortement marqué par notre héritage génétique), l’objectif qu’on se fixe et le nombre de séances nécessaires pour y arriver. Trop souvent de nombreux coureurs s’entraînent trop par rapport à leur niveau, ils sont du coup fatigués, manquent de fraîcheur et d’allant en compétition (« je n’étais pas motivé le jour de la compétition ») car chaque séance est quasiment une compétition.
Les moyens (les séances d’entraînement) se substituent à l’objectif, ils ne se sentent jamais prêts, manquent de combativité en compétition alors que c’est le but ultime… Bizarrement lorsqu’ils se sentent prêts… pas de chance il n’y a pas de compétition !
En faire trop par rapport à son niveau réel amenuise la motivation. Le plaisir d’aller à l’entraînement est pourtant fondamental pour progresser. A contrario, ne rien faire ne vous fera pas progresser du tout.
Quelques constats
1 séance par semaine = entretien
2 séances par semaine = signes de progrès
3 séances par semaine = progrès sensibles
4 séances par semaine = l’entame d’un véritable processus d’entraînement.
Bien sûr, l’environnement du coureur joue un rôle prépondérant : les contraintes professionnelles (travail, déplacements,…) et familiales sont essentielles dans l’approche qu’un coureur pourra avoir de sa préparation. Ainsi se lever tous les matins à 5h30 pour faire son footing, puis assumer une vie professionnelle et familiale, ne sera pas tenable, sans dégâts à long terme. Il faut donc impérativement en tenir compte.
La nature de l’objectif est également très importante. Faire un 10 kilomètres n’est pas pareil que se lancer sur marathon. Si on peut se lancer sur 10 kilomètres avec un ou deux entraînements par semaine ou même sans entraînement spécifique course (pour un pratiquant d’un autre sport à dominante aérobie), un marathon (et ce quel que soit le niveau visé, 3h30 comme 4h30), nécessite une préparation adaptée. Pour faire le kilométrage adéquat et préparer son organisme à affronter 42 kilomètres, il faut bien entendu aller au-delà de deux séances par semaine. Mon conseil est de ne pas se lancer sur marathon si on n’a pas pu suivre pendant 12 (le minimum) à 16 semaines une préparation ciblée avec 3 à 4 séances hebdomadaires.
En résumé, trois éléments sont donc à prendre en compte :
- Le niveau initial (le potentiel)
- Le temps disponible pour s’entraîner et … récupérer
- L’objectif visé (distance et objectif chronométrique)
L’envie d’aller à l’entraînement et votre ressenti doivent être les indicateurs majeurs dans votre démarche. Bien sûr il faut être régulier et constant à l’entraînement mais si aller courir devient une contrainte c’est le signe qu’il faut lever le pied, alléger la charge ou prendre du repos. Les athlètes que j’entraîne disposent (et ils le savent) d’un joker qu’ils peuvent utiliser quand ils pensent qu’ils ont besoin de souffler et d’annuler un entraînement. Cela ne perturbe guère une planification établie longtemps à l’avance … car il suffit de l’ajuster.
Pour progresser, l’idéal est de disposer de suffisamment de temps pour placer l’ensemble des séances nécessaires au développement dans tous les secteurs de la performance. Dans cette perspective, il faut toujours se souvenir de cette règle :
- 2 x 30mn sont plus efficaces qu’une fois une heure.
- 3 x 40mn plus efficaces que 2 x 1 heure
- 5 x 35mn ou 1 x 1 h plus 3 x 40mn seront plus efficaces que 3 x1 heure
Le premier objectif pour progresser sera donc d’augmenter le nombre de séquences d’entraînement.
Le deuxième consistera à bien ajuster les contenus des séances, c’est-à-dire trouver les bonnes intensités des allures d’entraînement : aller (trop souvent) trop lentement ne déclenchera aucun processus d’adaptation physiologique, aller trop vite (trop souvent) bloquera le processus d’adaptation. Il faut donc trouver les bonnes allures, pour produire un travail qualitatif qui sera ajusté en fonction de la distance.
Le combien de fois est ainsi dépendant du niveau, de l’objectif et du temps disponible mais ces facteurs ne suffisent pas car il y a aussi le « comment », c’est-à-dire ce qu’on ait pendant l’entraînement.