Aubière, agglomération de Clermont-Ferrand (63), midi et demi, un vendredi pluvieux de janvier. Des scolaires se sont mis à l’abri dans les gradins du Stadium Jean-Pellez pour pique-niquer. Les jeunes du pôle France de course d’orientation s’entraînent dans la salle de musculation. Sur la piste, trois hommes enchaînent les tours. Patrick Bringer, et deux amis qu’il entraîne. La séance est exceptionnellement légère, deux jours avant les championnats d’Auvergne de cross-country. Un peu de PPG. Etienne Diemunsch arrive. Le triathlète de 26 ans qui vise la qualification pour les prochains Jeux olympiques de Rio en 2016, fait le point sur ses sensations avec son entraîneur. « En ce moment, avec la météo, ça devient dur de faire du vélo. C’est un peu dangereux, alors il fait pas mal de home-trainer », confie Patrick Bringer.
Lui-même ancien triathlète de haut niveau, entre autres deuxième de l’Ironman d’Embrun et troisième de celui de Nice en 2007, connaît bien les exigences de ce sport dont il a tourné la page en 2009. « J’avais plaisir à arrêter quand ça allait bien. J’aimais toujours ce sport. Mais j’étais fatigué des journées millimétrées tout le temps ». Exit donc les 20 à 25 heures d’entraînement par semaine. Les longues sorties à vélo de 6 à 7 heures le week-end. Les séances d’entraînement quasi exclusivement en solitaire. Lui qui avait plongé dans le triathlon à seulement 17 ans, « d’emblée au taquet » pendant ses années d’études à la fac, a remis l’accent sur la course à pied. Mais pas « la piste, le cross, les 1 500 m et 3 000 m » comme il les avait connus durant son adolescence. Depuis 2010, c’est sur les chemins, en trail, que Patrick Bringer s’exprime. « Pour une dimension d’endurance, de plaisir ». Et en groupe. « Sinon, je crois que ça ferait longtemps que j’aurais arrêté », lance celui qui s’entraîne souvent le midi la semaine avec ses copains, et le samedi matin avec son compère Fabien Chartoire.
Il enseigne l’histoire géographie à des élèves de sixième et troisième, et a toujours été attiré par le coaching. Il a notamment entraîné Thomas Lorblanchet pendant huit ans de 2003 à 2011. A 39 ans, le vainqueur de la SaintéLyon 2014 gère avec sa structure une douzaine de triathlètes (dont Cyril Viennot, cinquième de l’Ironman d’Hawaï en 2014) et une quinzaine de traileurs. « L’esprit n’est pas le même. En triathlon, c’est davantage une dimension performance. En trail, ça va de Nicolas Martin qui est en équipe de France, à des gens qui se lancent des défis ». L’entraînement se fait souvent à distance. Alors deux week-ends par an, Patrick Bringer organise des regroupements. A Annecy (74) et Nant (12). Et dès qu’il le peut, il mélange les deux groupes, pour les séances de course à pied. « Même pour la VMA. Tout le monde n’a pas le même niveau, mais on s’organise ».
Il n’est pas de ces coureurs qui ont des épreuves qui les font rêver. Alors depuis ses débuts en trail, ce qui lui plaît, c’est « l’esprit bonne franquette » et ce qui le motive, c’est « la qualification pour les championnats du monde ». L’équipe de France, avec « cette ambiance extraordinaire, et ce réel état d’esprit insufflé par Philippe Propage », qu’il met en avant avec un entrain sincère. « Dans ma vie sportive, j’ai vraiment vécu un super moment il y a quatre ans en Irlande, lorsqu’on est devenus champions du monde de trail par équipe », raconte celui qui avait également pris la médaille de bronze en individuel. Après son abandon aux Mondiaux 2013, il aborde le cru 2015 sur la Maxi Race d’Annecy avec excitation. « Le fait que ce soit en France, c’est génial pour le trail. On sent un frémissement qu’on n’a encore jamais eu. Ce n’est pas loin de Lyon, de Paris, je suis sûr qu’il y aura beaucoup de public. Le circuit est extraordinaire. Ça va être beau ». Mais dur, « très dur », à l’entendre raconter sa « peur » lorsqu’il a reconnu le circuit avant de participer à la Maxi-Race en 2014 (dont il a pris la deuxième place avec Fabien Antolinos). « J’aime la montagne, mais là, c’est vraiment dur. Surtout la deuxième partie. Je crois que personne ne fera le malin sur la ligne de départ des championnats du monde ». Il s’attend à un début de course « rapide » mais optera pour une stratégie prudente. Parce qu’il a « l’avantage de connaître l’épreuve », et qu’il compte bien tout faire pour « aider l’équipe de France à remporter le titre par équipe ». Une victoire collective dont il fait son principal objectif.
Et ensuite ? Il courra les championnats de France en septembre, à domicile, dans le Sancy. Le reste dépendra des résultats, sensations et envies. Il ne cache d’ailleurs pas celle d’élargir son coaching à « l’athlétisme pure », au « cross, à la piste », d’ici « deux à trois ans », ou « peut-être avant ». Runnings aux pieds, il ne se dit pas tenté par l’ultra. « Ca me plairait probablement en termes d’effort. Mentalement, j’aurais peut-être ce qu’il faut. Mais je sais ce que cela implique à l’entraînement, et je n’en ai pas envie ». En revanche, il se verrait bien courir un 100 kilomètres sur route. « Pour la dimension défi. La curiosité. L’ambiance fraternelle. Et puis les valeurs du sport. Là, tu cours pour toi, personne ne sait vraiment ce que tu fais ». Une performance personnelle mais un goût de l’effort que Patrick Bringer aime partager. Avec ses poulains, bien sûr. Mais aussi sa femme qu’il a « accompagnée sur trois marathons ». Et leurs trois enfants. Les jumeaux de 12 ans sont en sport études natation. Le petit de 6 ans fait du tennis et du rugby. « Ils font ce qu’ils veulent, au niveau où ils veulent. Mais ce sont des valeurs de rigueur qu’ils n’oublieront jamais ».
Patrick Bringer en bref
Né le 23 décembre 1975 au Puy-en-Velay (43)
Club : Beaumont Athlétique Club
Membre du Team Sigvaris Trail
Palmarès principal
2014
Vainqueur du Gruissan Phoebus Trail
Vainqueur de la SaintéLyon
2013
Vainqueur du Trail du Ventoux
Vainqueur du Trail Faverges Icebreaker
2012
Vainqueur de la 6000D
Vainqueur du Marathon des Burons
Vainqueur du Lyon Urban Trail
Vainqueur du Trail du Vulcain
2011
Médaillé de bronze aux championnats du monde trail (Irlande) et champion du monde par équipe
Vainqueur du Marathon des Burons
2010
2ème du Trail Tour National
vainqueur du Trail Hivernal du Sancy
Vainqueur du Trail du Vulcain (58 km)
Vainqueur du Pilatrail
Triathlon : 2ème de l’Ironman d’Embrun en 2007, 3ème en 2003 et 2005 ; 3ème de l’Ironman de Nice en 2007 et 2008