La plupart du temps, quand on parle de musculation à un cycliste les images renvoyées sont celles d’un bodybuilder et la majorité de ceux que j’interroge à ce sujet me disent tous… « Je fais du gainage l’hiver… ».
Bravo à eux, c’est déjà un premier pas mais gardons à l’esprit que toute qualité acquise et non travaillée se perdra rapidement. Qui dit gainage l’hiver, dit maintien de ces séances tout au long de l’année, avec adaptation de leur nombre en fonction des objectifs recherchés.
Pour revenir à ma musculation, on parlera de gainage, de renforcement musculaire, de musculation sous appareils, en poids libres, d’haltérophilie et de CrossFit…
Le CrossFit pour moi entraîneur est à l’image du Fartleck en course à pied ou à vélo. Ce sont des séances ludiques, dynamiques, riches d’exercices. Mais qui dit grande variété dit interférences d’adaptations donc soyons vigilant.
Un tout petit peu d’histoire
Pour nourrir ce débat sur l’intérêt de la musculation dans le cyclisme et comprendre ce qu’est le CrossFit, il faut revenir à ses origines.
Cette pratique est née dans les années 70 aux Etats Unis et a très vite été introduite dans l’armée américaine pour l’entraînement de ses soldats. Ses créateurs voyant l’intérêt grandissant susciter par leur mode de travail ont vu une brèche et ont créé tout un concept autour de ces différents mouvements sportifs en créant leur propre site et en mettant en place de très forts moyens de communication et de promotion.
L’objectif dans cet article est de comprendre en quoi cette pratique peut ou non être intéressante pour des cyclistes venant de différentes disciplines.
WOD mais qu’est-ce que c’est ?
Tout tourne dans ces séances autour du concept de WOD, comprenez Workout Of the Day, un anglicisme résumé en français par séance du jour… Ils sont bon ces ricains, SDJ ça sonne moins bien.
L’intérêt de ces WOD est de les adapter au public que l’on a face à soi et ainsi de gérer au mieux, l’intensité des efforts, leur durée, le nombre de répétitions, de séries, le type de récupérations, leur technicité….
Prenons maintenant le terme CrossFit, que l’on pourrait traduire ou définir comme de l’entraînement croisé. Croisé car il permet d’aborder des notions de force athlétique, d’haltérophilie, de gymnastique mais également de sports d’endurance. On peut si vous me suivez encore passer d’un exercice de 1000 m au rameur, à des séries de corde à sauter, de squat jump sur leur fameuses jump boxes (va falloir se mettre à l’anglais), faire de l’arraché puis passer à des tractions et la liste peut encore être longue.
Finalement toutes ces activités peuvent très bien développer l’ensemble des qualités physiques que sont la Force, la Vitesse, l’Endurance, la Coordination et la Souplesse.
Quel intérêt pour le ou la cycliste ?
En vérité ils sont multiples mais avant de voir ce qu’ils sont, il va falloir se prémunir de quelques mésaventures trop vues dans ce secteur.
– Assurez-vous avant l’exécution de chaque geste, de maitriser la technique avant de vouloir faire comme les copains et d’ajouter du poids.
– Pensez à votre hydratation au cours de l’effort, elle primordiale et vous permettra de mieux gérer votre récupération. Associé à des produits énergétiques c’est encore mieux.
– Évitez lors de ces séances, notamment si elles demandent une grande technicité, de les faire sur un corps fatigué. La fraicheur physique et mentale sont de rigueur car généralement on vous pousse dans vos retranchements.
– Dernier élément, la tenue et plus particulièrement les chaussures pour pratiquer. Assurez vous d’avoir à minima un équipement non abimé ou avec des semelles en bon état afin d’éviter des déséquilibres qui réapparaitront sur le vélo.
Je viens maintenant à l’intérêt d’une telle pratique. Le travail lié à ces différents mouvements notamment si vous n’avez pas beaucoup de temps pour vous entraîner, vous permettra d’améliorer chacun des pans de la performance.
Je pense surtout à l’équilibre et la coordination qui font le plus souvent défaut aux pratiquants de vélo de route. La multitude d’exercices imposant des mouvements pluri-articulaire vous aidera à mieux appréhender les mouvements de votre corps et ainsi être mieux coordonné. Meilleure est la coordination plus grande sera votre efficacité sur un vélo.
L’avantage d’avoir des efforts dynamiques sera de vous permettre de gagner en explosivité et d’apprendre à vos muscles à travailler en synergie pour une tâche définie et in fine enrichira votre répertoire moteur, gage d’une meilleure adaptation corporelle au situations cyclistes que vous rencontrerez par la suite. De plus cela aura un impact énergétique forcé et vous permettra de développer vos capacités anaérobies.
Cette pratique reste attachée à ses origines de la force athlétique et de l’haltérophilie, donc faire ces mouvements de musculation, en plus d’améliorer de nouveau votre coordination, va développer votre force quelle soit d’endurance, maximale ou de vitesse. Cet élément sera un atout sur votre monture.
Dernier élément, ces mises en situations sportives vont venir renforcer vos ceintures abdominales, lombaires et scapulaires. Rien de mieux pour gagner en stabilité et en puissance sur votre vélo.
Ne considérez pas ce sport comme un effet de mode mais essayez plutôt de voir ce qu’il peut vous apporter dans votre activité. Et dites vous bien que la musculation et ses déclinaisons sont un sport à proprement parler. On peut donc en faire ce que l’on souhaite, du bon comme du mauvais.
Soyez d’ailleurs méfiant à ce propos car comme tout effet de mode, il y a toujours les vrais professionnels qui vous encadreront en vous apprenant les bonnes postures et réalisations gestuelles et il y a ceux qui misent tout sur la forme avec un contenu de séance incongru et aucun correctifs techniques. Fuyez ces derniers car la blessure sera au rendez-vous.
Au secours je vais prendre du poids !
Il est possible que vous preniez de la masse musculaire lors de ce type d’entraînement. Tout dépendra évidemment de la fréquence de vos WOD (j’y arrive) et de la part que vous accordez à cette pratique vis-à-vis du nombre de séances de vélo ou de sports d’endurance dans la semaine.
Rassurez-vous, au rythme d’une séance par semaine, vous tirerez les bienfaits du CrossFit sans en avoir d’inconvénients majeurs, d’autant plus si vous faites 2, 3, 4 voire davantage de séances de vélo chaque semaine. Avec tout le travail d’endurance et de développement des fibres musculaires de type 1, peu de chance que vous vous transformiez un bodybuilder.
Par contre si vous vous prenez au jeu et que vous faites 2 à 3 séances par semaine de CrossFit et que le nombre de séances d’endurance soit inférieur, il est fort à parier que vous prendrez du poids. Je précise, de la masse musculaire.
Reste à vous de savoir, si cette prise de masse musculaire est néfaste pour vos performances, mais sur ce point je suis convaincu qu’il vaut mieux parfois se développer un peu plus musculairement pour être plus fort sur son vélo. Tout est question de dosage.
Vous l’aurez donc compris, je vous encourage fortement à essayer cette pratique et éventuellement l’adopter dans votre préparation cycliste. Rien ne vous empêche de démarrer par du gainage durant votre phase de préparation et d’enchaîner ensuite par du CrossFit plus tard. Mais en tout cas soyez surtout vigilant sur la qualité de l’enseignement qui est dispensé dans la salle dans laquelle vous allez.
Votre séance de CrossFit adaptée aux cyclistes
Faire 3 séries de ces 5 exercices en augmentant la difficulté d’une série à l’autre. On passe de 5 réalisations à 10 sur le 2ème série et 15 sur la 3ème série. Pour les durées d’effort de l’exercice 3 on fait 1 min puis 1 min 30 s.
– Échauffement : 2 min de mouvements articulaires en partant des pieds et remontant jusqu’à la tête. Gainage en appuis coude frontal, dorsal et latéral, tenir chaque position 30 s. Faire 2 fois par position. TRX, Chest fly consistant en une ouverture des bras latéralement et en les ramenant devant soit en position debout inclinée vers l’avant. 2 min de corde à sauter technique libre. 5 burpees.
– Exercice 1 : Jump box. Saut en contre haut sur une box de 40 à 60 cm faire 5 sauts.
– Exercice 2 : Faire 5 tractions complètes (Pleine amplitude de l’articulation du coude). Vous pouvez vous aider d’un élastique si vous n’êtes pas en mesure de faire une traction. Ajustez la dureté de l’élastique en fonction de vos capacités.
– Exercice 3 : Corde à sauter. Alterner bondissements sur place sur 30 s pieds alternés puis 30 s pieds joints.
– Exercice 4 : TRX 5 pompes suspendues. Mettez vos pieds dans les sangles du TRX et effectuez 5 pompes.
– Exercice 5 : Sur home trainer braquet 52 x 21, 5 sprints de 7s départ arrêté avec 53 s de récupération entre chaque sprint.
– Retour au calme : Étirements, démarrez du bas du corps, les étirements dureront 2 x 30s par muscle étiré en cherchant le picotement musculaire sans aller au-delà et en travaillant sur la posture globale de son corps et le relâchement de la respiration.
Cyril GRANIER
Docteur en sciences du sport
Entraîneur Cyclisme, Trail, Triathlon
Bike Fitter, Level 2 IBFI
Formateur STAPS Musculation et physiologie, BPJEPS APT et AG2F
Facebook : @CyrilGranierPerformance
Instagram : cyrilgranierperformance