2 mai 2010, Trail Nivolet-Revard, 49 km. L’épreuve rapporte des points bonus pour le classement du Trail Tour National. Le plateau est dense. François D’Haene s’impose, devant Thierry Breuil et Patrick Bringer. A plus de 25 minutes du vainqueur, Nicolas Martin prend la vingtième place. « Je venais de terminer mes études. Je me suis rendu compte que j’étais vraiment loin de la tête. J’ai demandé à Patrick (Bringer, ndlr) de m’entraîner ». A l’époque, ce dernier est l’entraîneur de Thomas Lorblanchet, véritable icône du trail, champion du monde de la spécialité en 2009, et alors double vainqueur des Templiers (en 2007 et 2008, il s’imposera ensuite encore en 2010 et 2013). « Moi, j’avais deux rêves, raconte Nicolas Martin. Entrer en équipe de France et gagner les Templiers ».
Il s’entraîne déjà « six fois par semaine environ, mais sans faire de séances spécifiques ». « J’ai rapidement compris ce que c’était », sourit-il. La collaboration avec Patrick Bringer porte ses fruits. Dès fin 2012, l’Isérois termine quatrième de la Grande Course des Templiers et décroche son billet pour les championnats du monde de trail 2013. La première moitié de ses objectifs est remplie. « La plus facile », concède-t-il parce que « sur les Templiers, le niveau se densifie année après année ».
« Mentalement, je ne lâche pas facilement »
Sportivement, sa première expérience avec le maillot tricolore sur les épaules est une « déception ». Au pays de Galles, il prend la neuvième place (quatrième Français) d’une course sur laquelle il garde le sentiment de ne pas s’être « vraiment exprimé ». Mais il se souvient d’une « belle aventure humaine », avec son coach comme camarade de chambre. Et puis il y a cette fierté de représenter son pays. Lui qui a « toujours aimé le sport », regardé les compétitions à la télé et se définit comme un « supporter du beau jeu ». Lui qui a vibré et rêvé devant « les Jeux olympiques », tout en sachant qu’il n’aurait pas « l’occasion d’y participer ».
Il n’est pas issu « d’une famille de sportifs » mais a toujours eu une « grosse activité physique », a joué « au foot jusqu’à 15 ans » et « passé de nombreux week-ends d’automne dans les bois à la chasse » avec son père. Mais on ne lui a pas inculqué « l’esprit de compétition ». « C’est peut-être pour ça que je n’ai pas gagné beaucoup de courses », souffle-t-il. Avant de nuancer : « Je me dis aussi que pour durer, il ne faut pas avoir de pression trop tôt. Et puis, ça n’empêche pas que mentalement, je ne lâche pas facilement. J’ai une bonne régularité ».
Nicolas Martin n’a donc pas un palmarès tonitruant. Mais à 28 ans, l’Isérois participera fin mai 2015 sur la Maxi Race, à ses deuxièmes championnats du monde de trail. Preuve qu’il sait répondre présent quand il le faut. Pour décrocher sa sélection cette fois, il a terminé deuxième des championnats de France 2014. La récompense, entre autres, de son « sérieux » à l’entraînement. Lui qui n’a que « 50 mètres à faire » en sortant de chez lui, à Cornillon en Trièves près de Grenoble (38), pour se « retrouver sur les chemins », peut se programmer une séance avec « 1 200 mètres de dénivelé sans prendre de voiture », mais doit composer avec un emploi du temps professionnel atypique. Livreur dans une minoterie, il se lève du mardi au vendredi à deux ou trois heures du matin pour approvisionner les boulangeries en farines. A la clé : des déplacements, parfois jusqu’à Villefranche sur Saône (69) ou Cavalaire (83), et un travail physique. Il tempère avec les côtés positifs : « C’est à côté de chez moi et ça me laisse du temps libre ». Trois jours de repos par semaine, sur lesquels il condense le volume de ses séances d’entraînement. « Je m’entraîne en général cinq à six fois sur ces trois journées ». Un emploi du temps qui lui fait dire qu’il est, à l’image de ses collègues traileurs de son rang, dans une « démarche proche du haut niveau. En tout cas plus proche du haut niveau que du loisir ». Et de compléter : « Mais on travaille. Et ce qui fait la différence avec les professionnels finalement, c’est surtout le temps de récupération ».
La démarche de champion transparaît aussi dans son discours, prônant le fait de se mesurer à des adversaires plutôt que d’ajouter des lignes à son palmarès à tout prix. « Ce qui compte, c’est qui était en face de toi, qui tu as battu ». Tout en rappelant : « A un moment donné, les autres sont un révélateur. Mais tu cours surtout pour toi. Surtout en trail long, tu cours contre toi-même ». Preuve qu’il n’est pas forcément indispensable de tomber dans la marmite du haut niveau dès son plus jeune âge pour en comprendre les rouages.
Nicolas Martin en bref
Né le 29 juillet 1986
Club : Entente Athlétique Grenoble
Membre du Team Sigvaris Trail
Palmarès principal
2014
Vice-champion de France de trail
Vainqueur de l’OCC
2013
Vainqueur du Trail de l’Ardéchois (57 km)
2012
Vainqueur du Trail de l’Ardéchois (34 km)