C’est une première. Pour lui, comme pour le marathon de Paris. Jamais Kenenisa Bekele ne s’est aligné au départ de 42,195 kilomètres. Et jamais l’événement n’avait accueilli une star de son envergure. Les visiteurs qui l’ont reconnu sur le Running Expo, ce vendredi 4 avril 2014, en étaient tout retournés. « C’est Bekele ? ». « Attends, je vais le prendre en photo ! ». « Dépêche-toi, tu vas le louper ! ». « Vous pouvez me le prendre en photo s’il vous plait ? Et essayer d’avoir un sourire ? ». On n’a pas tous les jours l’occasion de croiser un triple champion olympique, qui plus est toujours détenteur des records du monde du 5 000 m (12mn37s35) et 10 000 m (26mn17s53).
Aux JO d’Athènes en 2004, il a décroché une médaille d’or (10 000 m) et une en argent (5 000 m). Aux JO de Pékin en 2008, deux médailles d’or (5000 m et 10 000 m). Alors l’Ethiopien a l’habitude de cette effervescence. Il a levé le doigt en posant pour de nombreux clichés, dédicacés tee-shirts et dossards à la chaîne.
On comprend vite qu’il aime davantage s’exprimer sur la piste (et désormais le bitume) que par de longs discours, mais il a pris le temps de répondre à quelques questions. Dont celle qu’évidemment tout le monde se pose depuis l’annonce de sa venue : « Pourquoi Paris ? ». Il sait bien qu’on dit de lui qu’il n’a pas voulu affronter la féroce concurrence à Londres le week-end suivant. « Paris… Londres… il y a une semaine d’écart entre les deux, au fond ça ne change pas grand-chose. Et puis, j’ai de bons souvenirs à Paris (aux Mondiaux de 2003 au stade de France il a décroché le bronze sur 5 000 m et l’or sur 10 000 m, son premier titre de champion du monde, ndlr). C’est un endroit spécial pour moi, et je suis très heureux d’être ici ».
Son sourire parle pour lui. Sourire discret lorsqu’on égraine les longues lignes de son palmarès (entre autres cinq titres de champion du monde). Sourire malicieux à l’évocation de sa plus longue distance courue à l’entraînement. « Oh… probablement autour de 40… 45 kilomètres…. ». Sourire ambitieux en évoquant son objectif chronométrique. « Evidemment, j’ai envie de courir vite. Bien sûr, si je peux battre le record du monde, j’aimerais le faire… Mais on verra dimanche. On en reparlera après la course ». Depuis plusieurs semaines, il ne cache pas sa volonté de frapper un grand coup. De faire tomber le record de l’épreuve (2h05mn10s). Et donc de s’approcher de la référence mondiale actuelle (2h03mn23s par le Kényan Wilson Kipsang). Il annonce vouloir être emmené sur les bases « d’1h01mn30s » au semi. Et avoue que son entourage tente de freiner ses ardeurs. Sourire coquin. « Je verrai aussi en fonction de mes sensations. Un marathon, ce n’est pas un 10 000 m ! Je ne dirais pas que courir un 10 000 m est plus facile, mais c’est différent ».
Forcément. Mais à 31 ans, « l’âge parfait pour se lancer » selon ses propres dires, il respire la sérénité. Sa victoire sur le semi-marathon de Newcastle en 1h00mn09s en septembre dernier (où il avait devancé le Britannique Mo Farah, deuxième en 1h00mn10s) l’a « mis en confiance ». Reste à savoir si cela suffira pour atteindre son but. Difficile d’avoir des certitudes. Sur ce point, Kenenisa Bekele a beau être une des plus grandes stars de l’athlétisme, avoir brillé sur la piste par ses accélérations fracassantes et ses moyenne à plus de 22 kilomètres/heure, il sera, ce dimanche 6 avril à 8h45, un débutant comme les autres.
Quelques photos de Kenenisa Bekele