Même le brouillard ne lui a pas résisté. Comme un symbole, alors que le panorama était complètement bouché, le ciel s’est brusquement dégagé lorsqu’il a entamé la dernière ascension pour s’approcher de la ligne d’arrivée. Quant au chrono référence de l’épreuve, dire qu’il n’a pas résisté serait un euphémisme.
Kilian Jornet n’a pas fait les choses à moitié pour cette dixième édition du Marathon du Mont-Blanc qui restera à coup sûr dans les annales. Il lui aura fallu précisément 3h38mn24 pour boucler ses 42.195 kilomètres. Presque 15 minutes de moins que le précédent record (3h52mn41s). Largement de quoi justifier un tonnerre d’applaudissements durant ses derniers mètres. Une forte clameur alimentée par les commentaires du speaker… que l’on entendait de loin. « J’étais de l’autre côté de la Vallée, et j’ai entendu « Et voici l’arrivée de Kilian Jornet !!! ». Je me suis dit : « C’est pas vrai ? », souriait Greg Vollet, qui a lui terminé 14 minutes après le champion, à la troisième place derrière Tofol Castaner-Bernat.
C’est en fait dans la montée vers la Flagère que Kilian Jornet a fait la différence sur son dauphin qui courrait pour la première fois en France, en pleine préparation pour la CCC. Jusque-là, les deux hommes avaient couru côte à côte, après avoir lâché leurs quatre autres coéquipiers de tête dans la montée des Posettes. « A Vallorcine, Kilian s’est mis devant au pied de la montée, et là, c’était une autre planète », racontait Greg Vollet. Le groupe de six a alors explosé, après avoir pris un départ très rapide. « Je savais que le niveau était relevé, confiait Kilian Jornet, et donc que l’on partirait vite. Il y avait en plus de bonnes conditions météo. Pour moi, c’est un parcours roulant, la première partie jusqu’à Vallorcine est vraiment plate ».
Si « plate » que l’Espagnol ne s’est pas privé de faire partager à Greg Vollet quelques vidéos tournées lors d’une soirée/concert la veille. « Ces moments où l’on court ensemble, où l’on peut discuter, partager des choses, ce sont les plus beaux », souriait le troisième de l’épreuve.
Maude Mathys s’envole dans la montée des Posettes
Les femmes de tête, elles, n’ont pas vraiment eu l’occasion de faire la course ensemble, se retrouvant rapidement espacées de plusieurs mètres. Pour elles aussi, c’est la montée des Posettes qui a fait la différence. Là où la Suissesse Maude Mathys, pour sa première dans le monde du trail, a creusé un écart irrattrapable. Là où Maud Gobert, double vainqueur de l’épreuve, s’est définitivement retrouvée distancée. Entre Maude et Maud, Sylvia Serafini a réussi à conserver sa deuxième place. La toute jeune Italienne (22 ans depuis trois jours), a profité de sa bonne gestion de la première partie de course pour assurer ensuite malgré une grande sensation de « soif dans la dernière montée ».
A l’arrivée, la bonne ambiance et la bonne humeur étaient de mise. Anna Frost, brushing impeccable, vernis à ongles de toutes les couleurs, et sourire radieux, accueillait ses copains et copines à bras ouverts. « J’ai des douleurs qui remontent du pied jusqu’au épaules depuis de longues semaines. J’ai préféré ne pas prendre le départ aujourd’hui, pour mieux récupérer, confiait la Néo-Zélandaise. Et je me suis dit que je pouvais en profiter autrement qu’en courant ». Elle a donc crapahuté sur le parcours pour suivre, entre autres, Kilian Jornet, applaudi à tout-va et lancé des « bravo, bravo » lorsque les coureurs arrivaient à Planpraz. Pour ce 10ème Marathon du Mont-Blanc, la grande famille du trail et des amoureux de la montagne était bel et bien au rendez-vous. En pointant sobrement son doigt au ciel à l’arrivée, Kilian Jornet a même associé Stéphane Brosse à cette journée. Un geste certainement aussi parlant que de longs discours pour signifier que cette victoire est aussi celle de son ami disparu tragiquement lors de leur tentative de traversée du Mont-Blanc.
Quelques photos du Marathon du Mont-Blanc 2012